Intervention de Nicolas Turquois

Séance en hémicycle du mardi 2 octobre 2018 à 15h00
Équilibre dans le secteur agricole et alimentaire — Discussion générale

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaNicolas Turquois :

Monsieur le président, monsieur le ministre, monsieur le rapporteur, mes chers collègues, nous arrivons au terme d'un travail de réflexion et de concertation engagé en juillet 2017 lors des états généraux de l'alimentation, qui ont suscité un grand intérêt de la part de l'ensemble des parties prenantes, notamment des agriculteurs. Le vote solennel de ce jour revêt un sens tout particulier, plus d'un an après le début de cette grande concertation. En tant que premier projet de loi agricole de la législature, ce texte a suscité de fortes attentes chez ceux qui défendent depuis longtemps la ferme France et s'investissent pour une agriculture plus compétitive, plus rémunératrice mais aussi plus attentive aux questions environnementales.

Ce projet de loi est celui, je dois bien l'avouer, qui m'a le plus marqué : des semaines de débats intenses, sans discontinuer. Malgré la longueur des échanges et le nombre de sujets abordés, les débats ont été posés, intéressants et j'ai éprouvé un réel plaisir à écouter les discours et les argumentations de tous les députés, de quelques bancs qu'ils proviennent.

Le travail parlementaire a permis un véritable enrichissement et approfondissement du texte. Cet enrichissement a été aussi rendu possible par votre ouverture et votre écoute, monsieur le ministre et monsieur le rapporteur, sans oublier le président de la commission des affaires économiques, Roland Lescure, et je vous en remercie sincèrement. C'est en effet grâce à votre sens de l'écoute et votre volonté de consensus que le projet de loi a fortement évolué, je pense notamment à la question des indicateurs, laquelle a fait l'objet de nombreux débats dans cet hémicycle. Je salue, monsieur le rapporteur, l'adoption de votre amendement qui permet aux interprofessions d'élaborer et de diffuser ces indicateurs ; cette disposition répond à l'objectif de responsabilisation des filières que nous défendons.

C'est la raison pour laquelle je regrette l'adoption par le Sénat de la motion tendant à opposer la question préalable sur le projet de loi, laquelle a eu pour effet le rejet du texte sans même qu'il soit examiné. Ce refus du travail parlementaire est vraiment regrettable lorsqu'on sait la situation d'urgence dans laquelle se trouve notre agriculture, laquelle ne rémunère plus les agriculteurs malgré des financements publics importants et fait injustement face à la défiance croissante de nos concitoyens à son égard, que ce soit pour la qualité des produits ou son impact environnemental.

Je salue donc un projet de loi important qui ambitionne de soutenir nos agriculteurs en mettant en valeur leur métier. Pour ce faire, j'estime qu'il actionne deux leviers novateurs : le renversement de la logique de construction des prix pour assurer une meilleure répartition de la valeur ajoutée entre les acteurs ; la valorisation de la restauration collective, souvent synonyme de malbouffe, pour, au contraire, promouvoir des produits alimentaires de qualité.

Nous nous sommes attelés, durant tout l'examen du texte, à convaincre nos agriculteurs de son bien-fondé sans stigmatiser leurs pratiques, qui ont leur histoire et leurs raisons. Nous nous sommes mobilisés pour valoriser leur travail, leur importance vitale pour notre économie, mais aussi leur place si particulière dans notre pays.

La majorité, comme l'opposition, doit prendre conscience de l'importance des avancées de ce texte. Le groupe MODEM souhaite que cette loi soit adoptée et mise en oeuvre rapidement, avant le début des prochaines négociations commerciales. L'objectif du texte étant d'inverser la logique de construction des prix afin de mieux rémunérer les agriculteurs, il importe en effet qu'il soit appliqué le plus tôt possible.

Cette loi appellera d'autres rendez-vous, notamment la réforme de la PAC, sur laquelle nos agriculteurs comptent beaucoup. Rien ne peut se faire sans elle, à condition qu'elle demeure solidaire. Nous avons besoin d'une politique agricole forte qui demeure commune, à l'inverse de nombreuses autres politiques qui ne le sont plus – ou, soyons optimistes, ne le sont pas encore.

Nous devons également être attentifs aux débats qui auront pour cadre l'examen du budget pour 2019 et notamment à celui sur la suppression du dispositif d'exonération TO-DE – travailleurs occasionnels et demandeurs d'emploi – , bénéficiant aux salariés embauchés sous contrat à durée déterminée à caractère saisonnier. Les dernières annonces ont soulevé un certain nombre d'inquiétudes, et nous devrons être la majorité qui permet d'alléger les charges sociales dans les secteurs les plus employeurs de main-d'oeuvre. Il importe de préserver le travail saisonnier, un lien formidable entre l'agriculture et la société.

Si l'on doit être exigeant sur la transformation de notre agriculture en un modèle vertueux, débarrassé des produits phytopharmaceutiques, il convient d'apporter les nécessaires mesures de soutien et de bon sens que le monde agricole attend.

Monsieur le ministre, mon groupe votera avec enthousiasme pour ce projet de loi, dans lequel nous croyons et dont nous soutenons les objectifs. Mais nous attendons désormais avec impatience les rendez-vous à venir sur la fiscalité agricole, l'installation des jeunes agriculteurs, le foncier agricole, le stockage de l'eau, la nécessaire simplification des normes et, bien sûr, la réforme de la PAC.

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