De notre point de vue, le texte issu de la CMP ne répond pas aux besoins des 14 millions de personnes qui sont victimes du mal-logement dans notre pays. Il ne résout pas les problèmes de surpeuplement des logements, ceux des familles qui vivent dans quelques mètres carrés. Il ne résout pas non plus le problème de la précarité énergétique : aucun plan de réhabilitation ni de rénovation thermique n'y est prévu, qui permettrait de réduire la consommation d'énergie de certains logements. Aucun plan non plus pour les banlieues, les zones rurales, les outre-mer, zones pourtant particulièrement concernées par les tensions et les déséquilibres qui affectent le logement.
S'agissant du logement social, le fait de pousser les organismes HLM à se regrouper ou à vendre des logements les oblige à adopter des logiques budgétaires contraires à leur mission sociale. Et cela vient après la suppression de 1,5 milliard d'APL dans le projet de loi de finances pour 2018. La remise en cause de l'expertise des architectes des bâtiments de France va aussi fragiliser la qualité architecturale de nos bâtiments.
Alors que vous vous étiez engagé à ne pas « toucher à la loi SRU », monsieur le ministre, de nouvelles dérogations ont été entérinées. Loin de relancer la production de logements sociaux, vous promouvez une politique de renoncement en réduisant les moyens du secteur social et en détruisant les outils dont il dispose.
Avec le bail mobilité, vous ajoutez la précarité du logement à celle de l'emploi, notamment pour les plus jeunes.
Pour ce qui est des personnes en situation de handicap, ce point a été déjà longuement évoqué. Alors que, jusqu'à présent, 100 % des nouveaux logements devaient leur être accessibles, ce taux est tombé à 10 % après la première lecture du texte à l'Assemblée. Le Sénat a proposé 30 %, la CMP a tranché à 20 %. Pourquoi ? On ne le comprend pas bien. Ce que l'on sait, en revanche, c'est que le quotidien de nos concitoyens en situation de handicap, loin d'être amélioré, va être profondément affecté par ce pourcentage, qui n'a l'air de rien mais va poser des problèmes de logement à nombre d'entre eux.
Quant à l'environnement, le projet de loi s'attaque à la protection du littoral en permettant de construire dans des lieux jusqu'à présent protégés.
Le Sénat a aussi ajouté au texte des mesures facilitant l'expulsion des occupants de logements et stigmatisant fortement ces habitants. Pourtant, si ces personnes sont dans une telle situation, ce n'est pas par choix, mais parce qu'elles n'ont pas d'autre solution.
De manière générale, la loi ÉLAN précarise encore davantage les plus fragiles et ne contient aucun moyen d'améliorer les conditions de vie de millions de parents, d'enfants, de personnes vivant dans des situations indignes.
Nous avions déposé plus de 250 amendements. Deux d'entre eux ont été votés. Le premier porte sur l'obligation d'informer les locataires de la fusion de leur bailleur social avec un autre. Le second, dont la portée est bien supérieure, tend à ajouter des critères d'attribution prioritaire de logements sociaux au bénéfice des victimes de violences sexuelles.
Il s'agit à nos yeux d'une avancée très importante, mais cela ne suffit pas à nous convaincre de voter ce texte qui va, comme l'a très justement dit M. Peu, aggraver la situation de personnes déjà fragilisées. Nous voterons donc contre.