Intervention de Bruno le Maire

Séance en hémicycle du jeudi 4 octobre 2018 à 15h00
Croissance et transformation des entreprises — Article 55

Bruno le Maire, ministre de l'économie et des finances :

Je tiens à préciser la philosophie qui sous-tend cet article important et qui répond à ceux qui caricaturent le projet de loi PACTE en disant que nous libéralisons à outrance. Non : nous redéfinissons la place et le rôle respectifs de l'État et de l'entreprise dans l'économie française.

Nous sortons de plusieurs heures de discussion et de décisions sur les cessions d'actifs de l'État dans Aéroports de Paris et dans la Française des jeux, ainsi que sur la possibilité de baisser le seuil de participation de l'État dans le capital d'ENGIE. Mais, dans le même temps – c'est ce qui fait l'équilibre du texte – , nous renforçons les pouvoirs de l'État pour contrôler les investissements étrangers en France, avec un objectif – M. Lachaud l'a rappelé – : éviter le pillage de nos technologies. Je pèse mes mots, car je considère que dans l'économie mondiale actuelle, oui, certains États ont comme ambition de piller les technologies d'autres États qui ont investi, qui ont dépensé beaucoup d'argent public, beaucoup d'argent du contribuable, pour former des chercheurs, pour financer des laboratoires et de nouvelles technologies. Nous devons donc nous protéger.

On peut être favorable au commerce libre et ouvert, comme je le suis, et, dans le même temps, exiger le renforcement du contrôle de l'État sur les investissements étrangers en France. Je crois même que l'un va avec l'autre. Plus le commerce est ouvert, plus nous devons veiller à ce que nos technologies les plus sensibles soient protégées.

Ce mouvement ne touche pas seulement la France, il est global. Cependant, notre pays est certainement en pointe parmi les États européens dans ce domaine. Aux États-Unis, le CFIUS confère aux autorités fédérales américaines un pouvoir considérable pour interdire des investissements étrangers dans les technologies les plus sensibles. En Europe, un nouveau règlement sur le contrôle des investissements étrangers permet d'exercer un droit de regard sur les investissements dans les États membres. L'Allemagne s'est également dotée d'un dispositif de contrôle.

La France peut s'appuyer sur le décret que nous vous proposons de renforcer de deux manières : d'une part, avec des sanctions graduelles plus efficaces ; d'autre part, en élargissant son champ d'application à des domaines très sensibles tels que le stockage des données ou l'intelligence artificielle.

En vertu de l'équilibre des pouvoirs, la décision est prise par l'exécutif, mais sous le contrôle du Parlement. Nous renforçons le pouvoir de l'exécutif en matière de contrôle et de sanctions sur un champ élargi, et nous renforçons aussi, monsieur Lachaud, le pouvoir de contrôle a posteriori : la délégation parlementaire qui doit s'assurer que les bonnes décisions ont été prises rassemblera désormais toutes les groupes politiques – ce n'était pas le cas auparavant – et pourra contrôler de manière rigoureuse les décisions de l'exécutif. L'exécutif prend la décision a priori, le Parlement contrôle a posteriori : cette méthode me semble conforme au principe de séparation des pouvoirs et respectueuse du pouvoir de contrôle qui est le vôtre.

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