Hier soir, la séance touchait à son terme et nous n'avons pas pu répondre à vos remarques, monsieur Fasquelle. Le ministre vous l'a dit : il est aujourd'hui nécessaire d'ancrer la vie de l'entreprise dans le XXIe siècle, y compris juridiquement. Le droit a parfois quelque chose de conservateur, mais pas toujours, et je pense que nous pouvons être fiers d'appréhender cet objet juridique, qui est nouveau en droit interne mais absolument pas en droit international. La responsabilité sociale et environnementale a déjà une longue vie, vous le savez, et plusieurs documents ont permis d'établir une liste de normes : je songe au rapport Brundtland, au pacte mondial des Nations unies, au travail de l'Organisation internationale de normalisation – ISO – ou encore aux principes directeurs des Nations unies et aux communications et livres verts de la Commission européenne. Cette notion, on le voit, a déjà été largement abordée.
J'ajoute que nous avons fait le choix d'introduire dans l'article 1833 du code civil d'introduire la notion d'intérêt social, accolée à celle d'enjeux sociaux et environnementaux, sous la forme d'une question. Nous n'introduisons pas une obligation de résultat : nous demandons aux chefs d'entreprise de se poser la question.
En commission spéciale, je vous ai indiqué qu'il existe trois niveaux d'engagement. Le premier est général et va effectivement s'appliquer à tous les types de sociétés, y compris les sociétés civiles immobilières : il s'agira, pour chaque entreprise, de se poser la question des conséquences sociales et environnementales de ses choix à court et à moyen termes. Je précise que l'arbitrage revient pleinement à la société. La loi ne précise pas dans quel sens il faudra arbitrer et nous laisserons au juge le soin de dialoguer avec les sociétés.
Au sujet, deuxièmement, de la « raison d'être », vous me permettrez de vous répondre lorsque nous aborderons les amendements qui concernent cette notion.
La commission, enfin, a introduit un troisième étage de responsabilité, sur la base du volontariat, avec la notion de « société à mission ». À ce troisième niveau, la notion de résultat est beaucoup plus présente, mais il s'agit d'un engagement volontaire, qui fait l'objet d'une inscription dans les statuts.
Vous ne pouvez donc pas accuser la nouvelle rédaction de l'article 1833 du code civil d'introduire une insécurité juridique, puisque cet article prévoit seulement que les entreprises prennent en compte les enjeux sociaux et environnementaux et posent la question des conséquences de leurs choix. Je trouve, comme le Conseil d'État, que nous sommes parvenus à un excellent équilibre. Avis défavorable.