Intervention de Laure de La Raudière

Séance en hémicycle du vendredi 5 octobre 2018 à 15h00
Croissance et transformation des entreprises — Après l'article 62 sexies

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaLaure de La Raudière :

Avec cet amendement, nous abordons un nouveau sujet qui touche les chefs d'entreprise.

Le code du travail définit le délit de marchandage comme « toute opération à but lucratif de fourniture de main-d'oeuvre qui a pour effet de causer un préjudice au salarié qu'elle concerne ». Une telle opération est interdite par la loi, ce qui est normal, et constitue un délit civil et pénal. L'employeur du salarié est qualifié finalement de « faux sous-traitant ».

Je vous invite à prendre conscience de ce que recouvre ce terme. La notion date du XIXe siècle et sa définition dans notre législation remonte aux années cinquante.

Or, vous l'avez dit, nos entreprises, leur organisation et la spécialisation des métiers ont considérablement évolué depuis la moitié du XXe siècle. Les entreprises se concentrent de plus en plus sur leur coeur de métier et sous-traitent à des sociétés spécialisées de nombreuses fonctions.

Ainsi, une direction d'hôtel peut décider que son coeur de métier est l'accueil et la restauration, par conséquent concentrer ses recrutements sur ces métiers, et choisir de sous-traiter le nettoyage auprès d'une société extérieure. Dans un tel cas, un directeur d'hôtel peut être poursuivi en justice par l'inspection du travail, au civil comme au pénal, du fait de cette disposition de « délit de marchandage », dont la définition juridique mérite d'être adaptée à la réalité de l'organisation économique des entreprises actuelles.

J'ai connaissance de plusieurs condamnations en première instance et en appel de chefs d'entreprise de bonne foi qui n'ont eu gain de cause qu'en Cour de cassation, tout en ayant au-dessus d'eux l'épée de Damoclès d'une condamnation finale au pénal et d'une peine de prison.

Il est injuste de faire peser cette menace sur un chef d'entreprise, uniquement parce que la loi actuelle est source d'insécurité juridique. En effet, il ne faut pas confondre un faux sous-traitant, qui doit évidemment être condamné, comme son client, au titre du prêt de main-d'oeuvre illicite ou du délit de marchandage, et un vrai sous-traitant qui développe son activité en se professionnalisant sur un métier, par exemple le nettoyage ou la vente, et qui propose ces services à ses clients.

En 1950, ces activités étaient réalisées en interne par les sociétés. Il convient donc de préciser que le préjudice visé par le délit de marchandage ne résulte pas d'une différence de statuts collectifs, souvent difficiles à comparer, ce qui entraîne une réelle insécurité juridique.

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