Intervention de Daniel Fasquelle

Séance en hémicycle du vendredi 5 octobre 2018 à 15h00
Croissance et transformation des entreprises — Article 71 ter

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaDaniel Fasquelle :

On parle parfois de cavalier législatif : avec l'article 73 ter, il s'agit non pas d'un cavalier, mais d'une charge de cavalerie ! Il est incroyable que vous ayez pu ajouter au projet de loi PACTE cette disposition qui n'a strictement rien à voir avec le texte. À mon avis, du reste, cet amendement du Gouvernement, devenu un article du projet de loi, ne passera pas le cap du Conseil constitutionnel : je ne vois pas comment cela serait possible.

Toutefois, à supposer qu'il y réussisse, nous dénonçons cet article que vous avez ajouté au texte et qui habilite le Gouvernement à légiférer par voie d'ordonnance afin de mettre fin au tarif réglementé du gaz pour les particuliers et – même si personne n'en parle – de l'électricité pour les entreprises électro-intensives. Les députés présents lors de l'examen du texte en commission spéciale ont pour le moins été surpris de voir le Gouvernement déposer un tel amendement : comme je l'ai déjà souligné, le véhicule législatif est plus que surprenant. Cette question, qui concerne l'énergie et les droits des consommateurs, nécessiterait pour le moins une étude d'impact.

Même si des débats sont possibles sur les conséquences d'une telle disposition, il faut savoir que la suppression, en Belgique, de la tarification réglementée de l'énergie s'est traduite par une véritable catastrophe sur le marché belge. Avant de s'engager dans une telle aventure, il faut, a minima, prendre le temps d'une étude d'impact. Je n'ai pas d'a priori sur le sujet, mais je pense qu'il exige d'être très prudent, d'autant que le tarif réglementé est considéré par les Français comme un acquis qu'ils ne souhaitent aucunement remettre en cause : il permet un tarif fixe, non volatile et moins soumis aux fluctuations du marché. Je le répète : nos voisins européens ayant pris la décision de supprimer ce type de tarif ont vu les coûts du gaz et de l'électricité exploser.

Vous nous expliquez que des concurrents de l'opérateur historique proposent des prix plus attractifs : or ils le font par rapport aux tarifs réglementés. Pour faire venir les clients, ils offrent, par exemple, des tarifs inférieurs de 10 % à un tarif réglementé qui, même dans un marché ouvert à la concurrence, demeure un point de repère très utile.

Par ailleurs, la fin du tarif réglementé pour les entreprises électro-intensives n'est rien d'autre qu'un mauvais coup porté aux entreprises industrielles, le tarif réglementé leur offrant la possibilité d'avoir recours à une source énergétique à tarif fixe et donc moins volatile. Revenir sur ce tarif risquera de mettre à mal l'activité de beaucoup de petites entreprises industrielles qui ont besoin de grosses quantités d'électricité. Des entreprises et, donc, des emplois pourraient être demain menacés dans notre pays.

C'est pourquoi cet amendement, sur lequel nous avons demandé un scrutin public, vise la suppression de l'article, afin que cette question soit étudiée comme il se doit, dans le cadre, par exemple, de la PPE – programmation pluriannuelle de l 'énergie. Je ne comprends pas, d'ailleurs, pourquoi elle n'a pas du tout été évoquée lors des réunions que nous avons eues, salle Lamartine, où nous avons fait le point sur la PPE. Ce sujet est arrivé là, comme un cheveu dans la soupe, dans le cadre du projet de loi PACTE, sans que l'on comprenne très bien pourquoi et, de plus, à la veille de l'hiver.

Car je veux appeler votre attention sur les difficultés qu'auront les Français pour se chauffer cet hiver. Le sujet est très sérieux ! On constate une explosion du prix du fioul et du gaz. Sur le terrain, j'observe – comme vous, j'imagine – que les Français ne remplissent plus leur cuve de fioul en entier, mais seulement à moitié.

Le prix du fioul a augmenté de 25 à 30 %, et il y a eu plusieurs augmentations à répétition du prix du gaz. Il faut faire très attention ! On parle beaucoup de l'impact de l'augmentation du prix du gazole sur la capacité des Français à se déplacer, notamment en milieu rural. Or les Français auront des difficultés non seulement pour se déplacer, mais également pour se chauffer ! Il s'agit de sujets importants, qui touchent à la vie quotidienne des Français les plus modestes. Se loger, se déplacer et se chauffer sont des besoins primaires. Vous ne pouvez pas toucher de façon aussi légère et improvisée à ce qui est l'essentiel de la vie de nos concitoyens. C'est pourquoi nous demandons la suppression de l'article 71 ter.

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