C'est avec un grand plaisir que nous sommes réunis dans le cadre de cette table ronde sur la fiscalité écologique. Je souhaite en préalable remercier M. le président Éric Woerth d'avoir associé la commission des finances à cette initiative, qui nous a paru particulièrement utile avant l'examen du projet de loi de finances.
Dans ce cadre, nous avons le plaisir d'accueillir plusieurs intervenants : notre collègue Bénédicte Peyrol et M. Dominique Bureau, président du Comité pour l'économie verte, qui viennent de produire un rapport intitulé « Comment construire la fiscalité environnementale pour le quinquennat et après 2022 ? » ; M. Guillaume Sainteny, enseignant en politiques de l'environnement, et qui a produit de nombreux ouvrages et études sur la question de la fiscalité écologique ; des représentants du collectif d'associations qui a publié, en avril 2018, une contribution « Pour un PLF 2019 écologique et solidaire » : il s'agit de Mme Lorelei Limousin, pour le Réseau Action Climat, de M. Kévin Puisieux, pour la Fondation pour la nature et l'homme (FNH), et de M. Romain Riollet, pour le CLER – Réseau pour la transition énergétique.
Mesdames, messieurs, nous vous souhaitons la bienvenue.
En préalable, je souhaiterais expliquer pourquoi nous avons voulu organiser cette table ronde. Il me semble que nous devons aujourd'hui nous interroger sur la place accordée à la fiscalité écologique dans notre modèle fiscal. Cette fiscalité a été construite au coup par coup, en agrégeant divers dispositifs sectoriels, mais sans réellement s'intégrer dans une vision globale et stratégique. Il est aujourd'hui nécessaire de faire sortir la fiscalité écologique de sa relative marginalité pour la concevoir comme un élément central de la réforme fiscale.
On a assigné à cette fiscalité divers objectifs, qui ne sont pas forcément contradictoires, mais dont la lisibilité n'est pas toujours évidente, alternant entre l'incitation à des comportements plus respectueux de l'environnement et la perspective de dégager des ressources publiques supplémentaires. Ce manque de trajectoire claire et d'information du public a fini par faire émerger la notion d' « écologie punitive » et par donner une image négative du développement durable.
Il est donc aujourd'hui indispensable de clarifier les objectifs poursuivis par la fiscalité écologique : lutte contre le changement climatique, transition énergétique, préservation de la biodiversité et de ses ressources. Des avancées ont été réalisées, notamment dans le cadre du projet de loi de finances pour 2018, avec la révision à la hausse de la trajectoire de la contribution climat-énergie. Mais des signaux contradictoires demeurent, avec certaines niches fiscales qui soutiennent des pratiques nocives à l'environnement. Et nous sommes toujours face à de grands enjeux, comme la prise en compte des émissions de l'ensemble des gaz à effet de serre et pas seulement du CO2.
Il est aussi nécessaire de connaître les leviers pour améliorer l'adhésion du corps social à la fiscalité écologique : pour ne pas être discréditée, elle doit aussi être mise en oeuvre avec discernement et doit conduire vers un avenir commun positif. L'accompagnement des ménages modestes ou des secteurs qui doivent se reconvertir est donc un enjeu connexe, car ce qui est visé, c'est bien une transformation systémique. La prévisibilité, elle aussi, est importante, pour un signal-prix visible sur la durée, qui conduise à de réels changements de pratiques et de comportements.
Enfin, la question de l'utilisation des ressources dégagées est aussi essentielle : la logique « pollueur-payeur », poussée à son terme, impliquerait que ces ressources soient affectées à un objet environnemental, ce qui n'est pas toujours le cas.
Sur tous ces sujets, je ne doute pas que les intervenants auront de nombreux éclairages à nous apporter.