Intervention de Jacqueline Dubois

Réunion du mercredi 3 octobre 2018 à 16h15
Commission des affaires culturelles et de l'éducation

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaJacqueline Dubois :

En inscrivant à l'ordre du jour une proposition de loi relative à l'inclusion des élèves en situation de handicap, les députés de l'opposition ont voulu soulever un sujet particulièrement sensible.

Ce sujet suscite une attention toute particulière du Gouvernement, mais aussi de la majorité, puisque notre ambition est de construire une société véritablement inclusive ; c'est une de nos priorités. Dès le début du mandat, le ministre de l'éducation nationale, M. Jean-Michel Blanquer, et la secrétaire d'État chargée des personnes handicapées, Mme Sophie Cluzel, se sont attachés à tracer une trajectoire pour aboutir à une école de la République pleinement inclusive d'ici à 2022, qu'ils ont présentée le 18 juillet 2018. La première année d'action a permis de nombreuses avancées : meilleure formation des enseignants et des personnels d'encadrement, nombreuses créations d'unités localisées pour l'inclusion scolaire (ULIS) et d'unités d'enseignement externalisées (UEE). Les emplois aidés sont progressivement transformés en contrats publics pérennes d'accompagnants d'élèves en situation de handicap. Prochainement, 100 postes supplémentaires d'enseignants ressources seront créés et 180 unités d'enseignement autisme seront mises en place en maternelle. Une expérimentation de pôles inclusifs d'accompagnement localisés sera aussi bientôt lancée dans chaque académie.

Le chantier pour une école inclusive est donc en cours ; il porte une réelle ambition parce que l'école inclusive ne peut se réduire au recrutement des AESH. Or la présente proposition de loi ne traite la problématique de l'inclusion que sous l'angle des accompagnants scolaires. Si, depuis la loi de 2005 pour l'égalité des droits et des chances, la participation et la citoyenneté des personnes handicapées, les AESH ont joué un rôle majeur dans la scolarisation des enfants handicapés en milieu ordinaire, une telle disposition ne saurait suffire pour que l'école devienne pleinement inclusive, c'est-à-dire en mesure d'accueillir tous les enfants.

Si cette proposition de loi a le mérite d'ouvrir un débat, les réponses qu'elle prétend apporter ne sont pas à la hauteur des enjeux. Nous partageons le sentiment des personnes que nous avons pu auditionner : elles regrettent le manque d'ambition de ce texte. Les propositions, tout comme la sémantique utilisée, ne conviennent pas et montrent que le sujet n'a pas été abordé avec suffisamment de sérieux. Les articles de cette proposition de loi ne tiennent compte ni des études publiées au premier semestre 2018, ni du dernier décret sur les AESH. Non seulement le langage utilisé est maladroit, mais certaines des propositions n'apportent rien de nouveau, tandis que d'autres ont été pointées lors des auditions comme non souhaitables, y compris par les représentantes des AESH.

Nos amis du groupe LR demandent la création d'un statut unique d'aidant à l'inclusion scolaire. Le Gouvernement est déjà à l'oeuvre sur cette question, avec l'accélération de la transformation des emplois aidés. Il est à noter que, pour la première fois depuis dix ans, cette année, le nombre d'accompagnants ayant le statut d'AESH de droit public dépassera 43 000 équivalents temps plein (ETP), alors que les emplois aidés – 29 000 ETP cette année – étaient jusqu'alors majoritaires.

Nos collègues souhaitent que les AESH puissent accompagner les élèves pendant les sorties scolaires. L'idée est tout à fait louable, mais c'est déjà le cas ! Ils veulent supprimer l'obligation de faire deux CDD pour espérer décrocher un CDI. C'est déjà possible depuis la publication du décret du 27 juillet 2018. Ils voudraient contenir la lenteur des MDPH. Mais c'est l'engorgement qu'il convient de réguler ; je crains que leur proposition ne l'aggrave. Enfin, ils se soucient d'élargir l'accompagnement en dehors du temps scolaire.

Est-ce à dire que la situation des AESH est pleinement satisfaisante ? Non. Et les délais de notification des MDPH pas davantage. La coordination des différents temps de l'enfant, y compris à la cantine ou dans un cadre périscolaire, doit-elle être améliorée ? Évidemment oui, une meilleure coordination est indispensable. Mais la réflexion doit être plus large et prendre en compte tous les besoins de l'enfant.

Tout cela est dans la feuille de route du Gouvernement. Mais attention : il s'agit bien de mettre l'enfant au coeur du dispositif, afin de mobiliser les dispositifs correspondant à ses besoins particuliers. Cela nécessite de repenser la place du secteur médico-social, d'organiser l'efficience, de rapprocher de l'école les différents intervenants et de construire la confiance et la coopération entre tous les partenaires. Alors oui, rendre l'école pleinement inclusive, c'est pleinement notre objectif ; mais cette proposition de loi n'y répond pas.

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