Intervention de Daniel Fasquelle

Séance en hémicycle du mardi 9 octobre 2018 à 15h00
Croissance et transformation des entreprises — Explications de vote

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaDaniel Fasquelle :

Votre loi, monsieur le ministre, comme toutes les lois de simplification, comporte évidemment des avancées que nous pouvons saluer. En revanche, vous devez l'avouer, vous avez largement survendu un texte par bien des aspects insuffisant, incomplet, qui soulève de nombreuses questions et qui pourrait même complexifier la vie des entreprises sur certains points.

Un texte insuffisant, disais-je, au regard des objectifs affichés. Ainsi, en ce qui concerne les seuils, sujet largement débattu en commission et dans l'hémicycle, vous n'avez fait le travail qu'à moitié en ne supprimant que le seuil des 20 salariés et en ne touchant pas aux autres seuils mentionnés dans le code du travail. Quant à la suppression du forfait social qui devrait concerner toutes les entreprises, là non plus, vous n'allez pas au bout de votre logique. Vous maintenez tous les statuts juridiques très complexes qui s'offrent aujourd'hui aux créateurs d'entreprise, passant complètement à côté du sujet. Et puis, s'agissant de la protection des intérêts stratégiques de notre pays, votre texte, là aussi, est très insuffisant.

Un texte incomplet aussi, puisque, cela a été relevé avant moi, il comporte de nombreuses lacunes. L'économie numérique, par exemple, alors qu'elle bouleverse aujourd'hui l'économie moderne et notre pays, en est la grande oubliée. Vous avez dit vouloir faire entrer l'économie française dans le XXIe siècle, mais vous passez à côté de l'essentiel. Quant à la sous-traitance ou encore la transmission d'entreprises, elles sont soit oubliées, soit traitées de façon beaucoup trop superficielle.

Ce texte insuffisant et incomplet cache parfois ses vraies motivations. Ainsi, s'agissant de la privatisation d'Aéroports de Paris et de La Française des jeux, on a un peu de mal à comprendre l'intérêt stratégique de vendre aujourd'hui ADP, point d'entrée sur le territoire national, et l'intérêt juridique de vendre FDJ, un monopole qui ne tient que parce qu'il est détenu par l'État et qui pourrait demain être remis en cause s'il est confié à un acteur privé. On peine surtout à comprendre l'intérêt financier de l'ensemble de l'opération. L'État va vendre Aéroports de Paris, La Française des Jeux et une partie de ses parts dans Engie pour créer un fonds pour l'innovation de rupture doté de 10 milliards d'euros, chiffre qui peut impressionner mais qui ne générera en réalité que 250 millions d'euros par an – 250 millions pour financer l'innovation de rupture, avouez que c'est tout de même vraiment très peu. On le comprend d'autant moins que vous renoncez ainsi à plus de 500 millions d'euros de dividendes par an. Tout cela n'a aucun sens. La seule motivation, puisque votre gouvernement n'est pas capable de faire des économies dans le budget de l'État, c'est de diminuer la dette de 10 milliards d'euros pour ne pas flirter de trop près avec la barre des 100 % du PIB. Nous avons très bien compris les réelles raisons de votre texte.

Enfin, ce texte pourrait paradoxalement complexifier la vie des créateurs d'entreprise et la vie des entreprises elles-mêmes. Pourquoi supprimer les centres de formalités des entreprises alors qu'ils ont fait la preuve de leur efficacité et qu'ils sont aujourd'hui présents, à travers les chambres de commerce et d'industrie, les chambres d'agriculture et les chambres de métiers, sur l'ensemble du territoire ? Le créateur d'entreprise, au lieu d'être face à un conseiller, sera demain face à son écran d'ordinateur pour des démarches qui ne s'effectueront plus que de façon numérique. Vous supprimez aussi le stage préalable à l'installation alors que celui-ci était utile, voire nécessaire, …

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