Monsieur le président, madame la ministre, madame la présidente de la commission des lois, monsieur le rapporteur, mes chers collègues, au mythe de la technologie libératrice apparu lors des printemps arables, où l'on parlait de « révolution Twitter » et de « révolution Facebook », où l'on considérait qu'une information plus libre et plus abondante était nécessairement une information de meilleure qualité, a succédé la conscience que la viralité prime parfois – et c'est déjà trop – sur la vérité.
De fait, nous sommes désormais tous acteurs de l'information : chacun peut produire et faire circuler ce qu'il veut, le vrai comme le faux. Aujourd'hui, peu importe qu'une vidéo soit truquée, tant qu'elle génère des clics ; peu importe qu'une information soit mensongère, tant qu'elle sème le doute, polarise la société ou alimente une défiance malheureusement bien enracinée dans les sociétés occidentales.
Entendons-nous, les fausses informations ont toujours existé, mais, par le biais technologique qui en permet la diffusion accélérée, elles se sont démocratisées et ont connu une propagation exponentielle. La crise de confiance que connaissent nos démocraties, et qui dévalue la parole publique, n'a rien arrangé.
Virtuelles, ces fausses informations ne le sont que par leur support ; leurs conséquences, elles, sont bien réelles, tangibles et déjà quantifiables. On sait ainsi que les fausses informations circulent six fois plus vite que les vraies ; que 48 % des gens ont déjà cru à une fausse information avant qu'elle ne soit démentie ; qu'elles peuvent faire changer d'opinion ou faire passer d'une conviction passive à une conviction active, donc à un acte. Et cet acte peut être le vote.
La perméabilité reconnue des sociétés modernes aux fausses informations doit nous alarmer. Elle inquiète aujourd'hui tous les experts, les journalistes, les ONG, les gouvernements et, désormais, elle est une préoccupation pour les populations elles-mêmes. L'ampleur des fausses informations fait peser un danger existentiel sur les démocraties, même les plus abouties et les plus solides. Les ingérences réitérées, ces dernières années, prouvent que les démocraties occidentales ne sont pas immunes : en font foi les événements survenus au Bundestag, le référendum néerlandais, le Brexit, le référendum en Catalogne et les élections présidentielles américaine et française. Il ne s'agit pas d'un épiphénomène mais d'un fléau durable, contre lequel nous devons collectivement oeuvrer.
La lutte contre les fausses informations est éminemment complexe parce qu'elle repose sur le comportement humain. C'est d'abord à la société qu'il revient de développer sa propre résilience. Cet objectif présume un temps long. Mais les effets, bien réels, des fausses informations nous interdisent d'attendre. Le législateur ne peut pas se désintéresser d'une menace qui vise à miner le fondement de la démocratie ; il doit proposer un commencement de réponse, et bien entendu le faire avec le recul et la prudence nécessaires, de manière à préserver un équilibre fondamental entre, d'une part, le droit de tout électeur à une information loyale et transparente et, de l'autre, l'exercice de la liberté d'expression.
Je regrette que le Sénat ait rejeté en bloc les deux propositions de loi.
Le 11/10/2018 à 19:07, Laïc1 a dit :
"apparu lors des printemps arables"
Définition de "arable" :
"Une terre arable est une terre qui peut être labourée ou cultivée (latin arabilis : labourable). Les terres arables comprennent les terrains en jachère, les cultures maraîchères et céréalières et les prairies artificielles. Quand ils sont intensivement cultivés et labourés, les sols arables peuvent perdre certaines de leurs qualités (richesse en humus, diversité génétique et richesse en champignons y diminuent généralement, de même parfois que leurs capacités de rétention et épuration de l'eau)."
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