Dix-huit mois après l'élection présidentielle, le deuxième budget qui nous est présenté témoigne de l'échec sans appel de la politique économique de la majorité. En dépit de la croissance favorable des débuts du quinquennat, le Gouvernement s'est refusé à conduire les nécessaires réductions de dépenses publiques tout en augmentant la pression fiscale, qui écrase aujourd'hui les ménages. J'ai entendu, à l'ouverture de la séance, M. le ministre Bruno Le Maire indiquer que des dispositifs seraient mis en place à ce sujet d'ici la fin du mandat, mais nous en sommes déjà au deuxième budget, et il n'y a aucune mesure !
Alors que la première loi de finances s'était déjà traduite par une baisse considérable, de 4,5 milliards d'euros, du pouvoir d'achat des Français et n'avait produit aucun effet positif sur l'activité, la dégradation de la santé économique de notre pays a atteint un paroxysme inquiétant : aujourd'hui, tous les voyants économiques sont au rouge, témoignant de l'ampleur des erreurs. À son arrivée au pouvoir, le Gouvernement a bénéficié pourtant d'un cycle économique providentiel avec une croissance du PIB de 2,3 % en 2017. Malheureusement, enivré par cette explosion des recettes, le Président de la République n'a pas su mettre en place les réformes indispensables à la pérennisation de cette dynamique. Face à une baisse anticipée de 0,6 point, force est de constater que les 1,7 % de croissance prévus pour 2019 placent la France à la traîne de l'Europe, 0,2 point en deçà de la moyenne envisagée pour la zone euro.
Mais les conséquences de l'incurie gouvernementale ne se limitent pas au rendez-vous manqué de la croissance : culminant à 98,5 % du PIB fin 2017, notre dette publique est insoutenable et ne diminue pas. M. le ministre Bruno Le Maire a du reste reconnu que nous faisons moins bien que nos voisins. Alors que la France s'apprête à dilapider 40 milliards d'euros en 2019 pour payer des taux d'intérêt qui pourraient encore augmenter, cette ardoise colossale fait peser un risque immense sur les épaules des générations futures. Or, l'augmentation des dépenses publiques de 25 milliards d'euros prévue pour 2019 et l'aggravation de 0,7 % des dépenses en volume prouvent que le Premier ministre n'a pas pris la pleine mesure de l'urgence de la situation. Au contraire, la dégradation anticipée du déficit public à 2,8 % pour l'année 2019 est une première depuis 2008. Et pour autant, le Gouvernement pratique l'autosatisfaction ! En réalité, le budget prévu pour l'année à venir relève d'une politique d'illusionniste basée sur des transferts massifs de la poche des uns à celle des autres, et je vais le démontrer.
Mesure démagogique par essence, la suppression de la taxe d'habitation, à hauteur de 20 milliards d'euros, doit être vue pour ce qu'elle est : un transfert du contribuable local au contribuable national. Au final, les dépenses locales ne vont pas s'évaporer et il faudra bien que quelqu'un paye la facture ! Financée par la dette, cette mascarade n'est pas un jeu à somme nulle, mais bien un jeu à somme négative destiné à tromper les Français.
Quant à l'augmentation de 25 % de la CSG, qui a frappé les retraités de plein fouet cette année, c'est une mesure indigne qui dissimule un gigantesque transfert de pouvoir d'achat entre les actifs et ceux que le Gouvernement juge inactifs. Seuls 300 000 retraités bénéficieront de l'exonération accordée par le pouvoir en place aux plus modestes de nos aînés. Faut-il rappeler que les plus de 7 millions de retraités restants n'ont pas volé une pension acquise à la sueur de leur front ?
Au terme de ce bilan non exhaustif de votre politique budgétaire illisible et injuste, monsieur le ministre, il est plus urgent que jamais de s'insurger contre une politique de transferts qui divise les Français. Parce que c'est de cela qu'il s'agit. L'économie, c'est avant tout de la confiance. Or la division, c'est l'inverse de la confiance. Le climat d'incertitude engendré par une politique qui ne fait que prendre aux uns pour redonner aux autres sape le moral des Français et ralentit la consommation, moteur de la croissance.
Pourtant, des mesures existent pour endiguer cette fuite en avant, mais vous ne les retenez pas. Au contraire, rien qu'avec le prélèvement à la source, ce sont plus de 2 milliards d'euros qui vont être prélevés, au titre de l'impôt sur le revenu, dans la poche des Français en 2019. Et je ne détaillerai pas les mesures de mise en place du prélèvement à la source : on sait les Français vont recevoir des acomptes, des crédits d'impôt, des réductions d'impôts, avec des régularisations l'année suivante…. Bref, cette réforme, c'est La Complexité en marche !
Afin de lutter contre la dégradation ininterrompue du déficit du commerce extérieur, qui atteignait 62,7 milliards d'euros en 2016, soit 15 milliards de plus qu'en 2017, il est urgent d'instaurer une fiscalité qui encourage la compétitivité des entreprises afin de favoriser la création de richesses. En poursuivant l'effort de diminution de l'impôt sur les sociétés, le Gouvernement emprunte la bonne direction mais ne retient pas la bonne trajectoire. Il faudrait faire mieux, en passant dès maintenant à un taux d'impôt sur les sociétés de 25 %. Et puis le durcissement exceptionnel du dernier acompte de l'impôt sur les sociétés à l'encontre des grandes entreprises, prévu à l'article 15, est une véritable fuite en avant. Il s'agit d'un gonflement à l'hélium des recettes budgétaires sur le dos des entreprises de notre pays !
Et quelle idée de vouloir supprimer le taux réduit de TICPE pour le gazole non routier, qui concerne de nombreux secteurs ! Vous souhaitiez faire supporter le poids d'une hausse d'impôts colossale, de près de 1 milliard d'euros en 2019, sur quelques secteurs, comme les travaux publics, la chimie ou la métallurgie ! Certes, en commission des finances, notre ténacité a eu raison des députés de la majorité.
Ainsi, plutôt que de favoriser notre compétitivité en renforçant un certain nombre de dispositifs favorables, vous préférez tromper les Français avec des promesses intenables car financées par la dette. Nous, Les Républicains, avons pourtant proposé des mesures qui pourraient formidablement booster la croissance de notre pays.
Néanmoins, tous ces constats pourraient être nuancés si le Gouvernement tenait sa promesse de rendre 6 milliards d'euros de pouvoir d'achat aux Français en 2019. Malheureusement pour nos compatriotes, sur cette question aussi, le bât blesse. De la hausse de la fiscalité du tabac, en passant par l'augmentation de la fiscalité sur les carburants, jusqu'à la baisse des APL ou encore la désindexation des retraites et des prestations familiales, responsable à elle seule d'un manque à gagner de 3 milliards d'euros, l'impact négatif de la politique gouvernementale est évalué à 10,9 milliards. En définitive, à mille lieues des promesses enchanteresses du Gouvernement, vos mesures devraient diminuer le pouvoir d'achat des Français de 300 millions d'euros au cours de l'année à venir !
Et que dire de la trajectoire carbone votée l'année passée, qui a pesé en 2018 sur le pouvoir d'achat des Français, et qui continuera à peser ? Rappelons qu'un couple avec deux enfants à charge, chauffé au fioul et assumant des dépenses classiques de gazole, risque de voir le montant de ses taxes énergétiques augmenter de 600 euros d'ici à 2022. Dès lors, augmenter de plus de 30 % le prix du carburant comme vous le faites est une pure folie alors que le prix du baril est en train de flamber ! C'est le pouvoir d'achat de tous les Français qui n'ont pas d'autres choix que de se déplacer en voiture que vous sacrifiez par pure idéologie ; ce sont véritablement les territoires ruraux qui sont atteints. Nous vous proposerons, tout au long de ces débats, une série de mesures pour corriger les vôtres et redonner vraiment du pouvoir d'achat en Français, en priorité aux classes moyennes que vous ne cessez de ponctionner.
Que dire également de cette amputation du budget des collectivités locales à hauteur de 54 millions d'euros, soit le montant affecté aux conséquences de l'ouragan Irma ? S'il me paraît légitime d'accorder un soutien financier à Saint-Martin – et j'approuve à cet égard l'engagement du Président de la République – prendre ces 54 millions sur le budget des collectivités est inacceptable.
En conclusion, il m'apparaît que ce budget n'est pas acceptable, pour plusieurs raisons. Il est illisible, du fait d'une politique de transferts dépourvue de cohérence puisque vous prenez dans une poche pour reverser dans l'autre. Il est brouillon en raison d'un calendrier d'application des mesures sans cesse modifié, nous l'avons constaté, par exemple, avec l'allégement renforcé sur les bas salaires reporté au 1er octobre alors qu'il était annoncé pour le 1er janvier. Il est inefficace – les résultats économiques sont déplorables. Et il est injuste car il oppose des catégories de Français.