Il ne faut en effet pas confondre mamans solos et mamans seules. Interrogé à ce sujet, Serge Hefez signale qu'il reçoit beaucoup de mamans, seules alors même qu'elles sont en couple, qui rencontrent des difficultés à intégrer le père dans la relation avec l'enfant. Les mamans solos, elles, ne sont pas seules : comme vient de le souligner Isabelle, l'enfant est intégré dans une famille élargie, avec un parrain, des oncles, un grand-père, des amis, des institutions. Ces mamans sont particulièrement attentives au fait que l'enfant interagisse avec les autres. Les mamans solos et leurs enfants ne se sentent pas amputés d'un père, car ils ont construit dès le départ un équilibre familial incluant ces données. Les différentes études le démontrent : ce n'est pas le format de la famille qui compte, mais la qualité des interactions avec les enfants. Les anti-PMA pensent qu'il est presque criminel qu'un enfant naisse sans un père à ses côtés ; nous considérons pour notre part que ce type de considération sur nos familles est davantage susceptible de faire souffrir nos enfants que l'absence d'un père.
Il faut, à chaque âge, accompagner les questions qui se posent ; mais comme le souligne Irène Théry, « en l'absence d'encadrement par la loi, les parents solos se retrouvent bien seuls pour accompagner leurs enfants et expliquer leur histoire ». Il est important d'utiliser les bons mots et de parler d'un donneur, d'un monsieur qui a donné une graine, plutôt que d'un papa inconnu ou anonyme. Nos enfants ne rencontrent en général pas de difficulté conceptuelle à comprendre la différence entre un père et un donneur. Ma fille, qui a six ans, a tout à fait intégré le fait qu'elle n'avait pas de papa. Elle n'en souffre pas et me le dit, au point que je suis même obligée de lui rappeler parfois qu'il est aussi très bien d'avoir un papa. Je me souviens avoir évoqué avec elle, lorsqu'elle avait cinq ans, la possibilité que je rencontre un homme et lui avoir demandé si elle pensait que ce monsieur pourrait alors être un peu comme son papa. Elle m'avait répondu la chose suivante : « Non, maman, tu peux avoir un amoureux, mais pour le papa, c'était possible jusqu'à mes trois ans, maintenant c'est trop tard ». Je n'ai ressenti aucune amertume dans sa réponse, mais un pragmatisme qui m'étonne encore.
Nous demandons donc l'égalité pour toutes, c'est-à-dire non un droit à l'enfant, mais un égal accès aux techniques de procréation, sans distinction en fonction du statut conjugal ou de l'orientation sexuelle. Le passage des frontières étant permis, nous vivons actuellement une hypocrisie, qui réserve la PMA aux femmes seules et homosexuelles les plus riches. Si l'on pense au bien des enfants avant tout, donnons-leur une légitimité et proposons des structures d'accompagnement, des conseils d'éducation, des moyens de sortir de l'isolement pour certains cas un peu exceptionnels. Voilà le véritable intérêt de l'enfant.