La demande des personnes nées de PMA est tout à fait digne d'intérêt et légitime. Effectivement, la situation que vous avez décrite se retrouve souvent. La réponse à cette demande qui consiste à connaître la personne du donneur, ne peut se trouver que dans l'organisation du consentement à l'origine. La proposition que j'ai faite est une sorte de compromis, et ne va pas jusqu'à la connaissance de l'identité des personnes. Mais si le législateur allait jusque-là, plus encore que pour l'accès à des éléments non-identifiants, il faudrait que le consentement du donneur soit recueilli dès le départ, et de manière très explicite et très informée. Si, évidemment, la personne née de PMA est concernée, celui qui a permis de donner la vie l'est tout autant.
Quant à la proposition de fixer l'âge à seize ans au lieu de dix-huit, la question peut être discutée, je n'ai pas de position préétablie.
Madame Thill, les questions que vous avez posées sur la procréation artificielle ne sont pas liées au débat actuel. Depuis 1989 et le premier rapport du Conseil d'État sur ces sujets, ces questions sont posées. La loi de 1994 a tranché dans un certain sens, les révisions des lois de bioéthique depuis vingt-cinq ans ont confirmé ces choix sans remettre en cause l'utilisation de ces techniques. La question est de savoir quelles personnes peuvent utiliser ces techniques, et s'il faut les réserver à certaines personnes.
La position que j'ai eue l'occasion d'adopter, est que la loi française autorise l'adoption par les couples homosexuels et les personnes célibataires. Un couple de femmes, comme une femme célibataire, peut donc avoir un projet parental. Ces femmes peuvent ainsi adopter un enfant dès sa naissance, alors même qu'on leur refuse l'accès à la PMA. Il ne s'agit pas d'une égalité en droit, mais de l'égalité face à la possibilité de mener, dans la société, des projets parentaux, ainsi que dans la liberté de procréer comme élément de l'autonomie personnelle, étant entendu que la question que vous avez posée sur l'égalité pouvait aussi se poser lors du débat sur le mariage. La position du Défenseur des droits n'est pas de considérer qu'il existe des différences qui n'autorisent pas l'égalité.
Monsieur Mbaye, je ne me suis pas prononcé sur les données, mais j'ai abordé cette question dans l'avis que j'ai rendu au CCNE. Nous avons beaucoup d'inquiétudes concernant les dérapages dans le domaine des données personnelles, particulièrement dans la santé. Nous sommes très préoccupés par ces questions, et je serai sûrement amené à rendre un rapport au mois de décembre sur les excès de la numérisation et de la dématérialisation. Il portera plutôt sur les difficultés des usagers dans leurs relations avec les services publics, mais j'aurai aussi l'occasion d'aborder ces questions. Nous devons utiliser les ressources juridiques actuelles, d'une part le règlement général sur la protection des données, mais aussi la loi française, qui est plus restrictive en l'état actuel des choses, et elle doit le rester.
Bien entendu, il existe par ailleurs des pressions des professionnels sur ces sujets, y compris des services hospitaliers, qui considèrent ces nouvelles technologies comme des instruments de progrès. Mais nous devons faire extrêmement attention. La loi française, avec le rôle qu'elle attribue à la Commission nationale de l'informatique et des libertés (CNIL), est une formule assez satisfaisante pour l'instant. Peut-être faudra-t-il la renforcer ? Le projet de loi risque en tout cas d'évoquer ces questions.
Sur l'âge, je vous ai dit ce qu'il en était ma position est conforme à ce qui a été décidé jusqu'à présent. La réflexion doit être menée, je ne sais pas ce que le législateur retiendra, je n'ai pas de position préétablie.
S'agissant du don d'ovocytes, la loi de 2004 et les textes successifs ne doivent pas maintenir le principe du don, cette espèce d'échange qui n'est que de la fausse générosité, ni la condition médicale d'infertilité. J'ai beaucoup participé à ces débats au début des années 1990. J'étais porte-parole de mon groupe pour la discussion du premier projet de loi, qui s'est arrêté en première lecture, en 1992. Si aujourd'hui, nous nous en tenions à la condition médicale, nous ferions le débat tel qu'il a été fait au début des années quatre-vingt-dix. Sur ce sujet nouveau, je pense que nous devons adopter des dispositions qui ne prévoient pas de condition médicale.
J'ai eu l'occasion de prendre une décision ponctuelle, il y a trois ans, sur la demande d'une personne trans-identitaire qui avait demandé la conservation de son sperme pour pouvoir mener des projets ultérieurement. Après avoir pris beaucoup d'avis, notamment de l'académie de médecine, j'avais répondu que rien ne paraissait s'opposer à ce que le CECOS accepte la demande de cette personne. Je pense qu'il faut considérer la conservation des ovocytes dans le même esprit.