Ce projet de budget fait la vérité, c'est vrai, sur les chiffres : vérité sur les dépenses, avec la fin des sous-budgétisations récurrentes depuis des années, et que dénonçait la Cour des comptes ; vérité aussi sur le montant réel du déficit structurel, avec une révision radicale des hypothèses de calcul. En tant que rapporteur général, je ne peux que m'en féliciter, car il ne peut y avoir de débat parlementaire sincère et éclairé sans fiabilité des chiffres présentés. Le Laudate Dominum du président du Haut Conseil des finances publiques est à ce titre révélateur.
Certes, le déficit budgétaire de l'État est en hausse, et j'ai bien entendu ce qu'a dit le président de la commission, mais cela s'explique par le fait que les baisses d'impôt concernent surtout les finances de l'État, tandis que les hausses, en particulier celles relatives à la CSG et au tabac, bénéficient à la sécurité sociale. Cela ne traduit donc pas une mauvaise gestion de l'État, bien au contraire. L'essentiel est que l'indicateur du déficit public, toutes administrations confondues, soit en baisse, nous permettant de sortir de la procédure de déficit excessif dès 2017. Les ministres l'ont déjà rappelé, mais il est parfois utile d'enfoncer quelques clous.
Ma première question porte sur la loi de programmation, et plus particulièrement sur la trajectoire des finances locales. Il est prévu des économies tendancielles de 13 milliards d'euros et une baisse du besoin de financement d'un même montant, alors que ces administrations sont aujourd'hui légèrement excédentaires : à la fin de la programmation en 2022, les administrations locales seraient en excédent de 0,8 % du PIB. Concrètement, qu'est-ce que cela signifie ? Faut-il comprendre que les collectivités locales disposeront de ressources ou de fonds de roulement qu'elles n'auraient pas le droit d'utiliser pour respecter la programmation ? Comment cela va-t-il se combiner avec le principe d'autonomie de ces collectivités ?
J'ai aussi une interrogation sur le rendement de la hausse de la fiscalité sur le tabac. Elle est évaluée à 0,5 milliard d'euros dans le rapport annexé, ce qui me paraît bien faible pour une hausse d'un euro, à moins que beaucoup de gens ne s'arrêtent de fumer – ce qui, d'ailleurs, me conviendrait parfaitement dans le cadre des politiques de santé publique. Comment cette évaluation a-t-elle été élaborée ?
J'observe que les comptes de concours financiers sont déficitaires en raison des prêts à l'Agence française de développement (AFD). Peut-on avoir des précisions sur la nature des opérations envisagées ?
J'en viens maintenant aux questions fiscales.
La mise en place du PFU dans le domaine de l'assurance vie conduit à alourdir, pour l'avenir, la fiscalité sur les plus gros contrats détenus depuis plus de huit ans, mais aussi à l'alléger sur ces mêmes contrats lorsqu'ils sont rachetés avant quatre ans. La lisibilité indéniable qui est liée à la mise en place du PFU peut-elle s'instaurer en laissant de côté un objectif de détention longue des actions ? Dans le même ordre d'idées, les abattements pour durée de détention sont supprimés pour l'avenir. Ne craignez-vous pas que cela conduise à une plus grande instabilité des placements de nos concitoyens ?
Quant à l'impôt sur la fortune immobilière (IFI), certaines sources évoquent comme produit total, après réforme, un montant de 850 millions d'euros. Confirmez-vous ce chiffrage ? Compte tenu du coût, ne serait-il pas opportun, comme certains le suggèrent, d'augmenter certaines taxes qui existent déjà sur des signes extérieurs de richesse ? La mise en place de l'IFI s'accompagnera de la suppression du dispositif dit « ISF-PME », ce qui pourrait avoir un impact important sur le financement des start-up. Ne vous semble-t-il pas opportun de mettre en place un dispositif de sortie « en douceur » qui permettrait, pour un temps de tuilage à déterminer, de continuer à inciter les contribuables les plus fortunés à investir dans le capital des PME ? Les comportements fiscaux sont parfois un peu lents en France et relèvent plus de la Vespa Piaggio que d'un Spyder... Les dispositifs de tuilage peuvent donc être utiles.
Vous avez annoncé une mesure concernant l'utilisation de la TVA réduite sur la presse en ligne par les opérateurs téléphoniques. Un journal satirique, aux pieds palmés et paraissant le mercredi, évoque un manque à gagner de 660 millions d'euros pour l'État, voire de 1,2 milliard d'euros si l'ensemble des opérateurs suivent. Quelles sont les mesures prévues ? De combien de millions d'euros est-il question ? Dispose-t-on au moins d'un ordre de grandeur ?
La question de la compensation des exonérations de taxe foncière en faveur du logement social fait l'objet de débats réguliers en loi de finances. Fait nouveau, ces compensations ne vont pas faire l'objet d'une minoration accrue cette année. À combien chiffrez-vous le choix ainsi opéré en faveur des collectivités locales ? Quel est, dans le projet de loi de finances pour 2018, le taux de minoration des compensations d'exonération de taxe foncière ?
Je termine avec les questions relatives au logement. Nous sommes conscients de l'effet inflationniste des aides personnalisées au logement (APL) sur le niveau des loyers. J'ai même vu des business plans d'entreprises de construction qui intègrent l'APL étudiante comme élément de solvabilité du projet de résidence, ce qui est tout de même un comble. Cela étant, on a parfois du mal à saisir de quelle manière la baisse des APL va se traduire concrètement en baisse de loyers effective et pérenne. Quelles sont les pistes pour y parvenir ?
De même, je m'interroge sur des mesures telles que le recentrage du prêt à taux zéro (PTZ) et du dispositif « Pinel » ou la possible extinction du « Censi-Bouvard ». Il faut sortir « en sifflet » de certains dispositifs si l'on ne veut pas désespérer certains bailleurs, notamment ruraux. Je pense à l'équilibre de certaines opérations, comme la restructuration des sites de défense, qui dépend de niches susceptibles de disparaître, mais aussi à l'économie touristique des régions de montagne, au sein desquelles les opérations de réhabilitation des résidences de tourisme sont indispensables. Les dispositifs concernés ont fait l'objet de réorientations dans le cadre d'une loi de décembre 2016, puis d'une annonce faite par l'actuel Gouvernement au mois d'août dernier, en comité interministériel du tourisme.
Je vous remercie d'apporter quelques précisions sur les adaptations possibles.