Je me permets d'insister, car c'est un sujet dépassant les querelles politiciennes. Avec le Président de la République et le Premier ministre, nous avons fait un choix qui est difficile. Quand vous arrivez aux responsabilités dans la situation qui a été très clairement décrite par la Cour des comptes, à savoir un déficit public évalué à 3,2 % du PIB en 2017, repasser à 2,9 % implique un effort important, qui a été demandé à tous les Français. Nous revendiquons le fait de tenir nos engagements européens, y compris en matière de déficit structurel.
J'ai bien noté dans l'avis du Haut Conseil des finances publiques qu'il y avait une interrogation sur ce dernier point et je veux y répondre : nous ferons 0,1 point d'ajustement structurel en 2018 car, comme j'ai eu l'occasion de l'expliquer aux membres de la Commission européenne, nous réalisons en parallèle des réformes structurelles sur le marché du travail et, demain, sur la formation et l'assurance chômage, qui viendront compléter les efforts de réduction de la dépense publique et nous permettre de tenir nos engagements en matière de déficit structurel.
S'agissant des prélèvements obligatoires, si l'on raisonne du 31 décembre 2017 au 31 décembre suivant, il y a bien 10 milliards d'euros de baisse d'impôt, mais si l'on considère la moyenne de l'année 2018, on arrive en effet à 7 milliards, parce que nous réalisons en deux temps l'exonération des charges sociales sur l'assurance chômage et l'assurance maladie. J'assume totalement ce choix : sinon, nous n'aurions pas respecté nos engagements européens. La sincérité consiste aussi à garder un équilibre entre la baisse de la dépense, qui est nécessaire, et les allégements d'impôts qui le sont tout autant et que nous réalisons simultanément.
S'agissant des carburants, je veux être totalement transparent : nous avons décidé la convergence entre la fiscalité du diesel et celle de l'essence, pour des raisons qui tiennent à la protection de l'environnement et à toutes les découvertes sur le caractère nocif du diesel. Cette convergence représente une augmentation de 2,6 centimes d'euros par litre de diesel sur l'année 2018. À cela s'ajoute l'augmentation du prix du carbone, que nous assumons aussi, car on ne peut pas dire que l'on veut la transition écologique et garder le même prix pour la tonne de carbone. Cela va se traduire par une augmentation du prix du litre de diesel de 5 centimes en 2018. L'augmentation totale devrait donc tourner autour de 7 centimes d'euros l'année prochaine.
Nous avons parfaitement conscience de la charge que cela représente pour le consommateur et nous avons pris, je l'ai dit, toutes les mesures d'accompagnement nécessaires : le chèque transport, l'exonération des professionnels concernés et la prime à la transition pour les véhicules anciens, afin de permettre le rachat d'un véhicule neuf dans de meilleures conditions. Mais on ne peut pas vouloir une évolution des comportements sans avoir une fiscalité qui les oriente. La meilleure preuve que les Français l'ont compris, c'est que 70 % des achats de véhicules neufs concernaient le diesel il y a cinq ans, contre désormais 50 %. J'annoncerai d'ici à la fin de l'année un plan d'accompagnement pour l'industrie du diesel et les sous-traitants liés à cette filière, afin que les milliers d'emplois concernés puissent être accompagnés et ne subissent pas cette augmentation de la fiscalité.
Je précise la trajectoire en ce qui concerne la baisse de l'impôt sur les sociétés : en 2018, nous ramènerons à 28 % le taux d'imposition sur les 500 000 premiers euros de bénéfices réalisés. Nous avons fait ce choix, qui était d'ailleurs inscrit dans les précédents projets de loi de finances, je le reconnais bien volontiers, de manière à ne pas faire de perdants chez les petites et moyennes entreprises.
Quant au CICE, nous faisons passer son taux de 7 % à 6 %, puis nous basculerons en 2019 vers un allégement de charges pérenne. Je sais que beaucoup d'entreprises nous disent qu'elles vont perdre de l'argent avec cette bascule, mais vous me permettrez de faire plusieurs observations. D'abord, nous réinjectons des liquidités considérables, notamment avec la suppression de l'ISF sur les valeurs mobilières et avec le PFU. Nous assumons donc le fait que nous ne relèverons pas le taux du CICE. On ne peut pas nous dire d'un côté que nous donnons trop aux entreprises, et de l'autre pas assez. Soyons cohérents. Ensuite, un crédit d'impôt peut toujours être remis en cause d'une année à l'autre si vous, parlementaires, le décidez. Un allégement de charges a, en revanche, un immense mérite : il est pérenne et beaucoup plus difficile à remettre en cause. Je crois en une fiscalité stable, car l'efficacité est là. Je préfère donc graver dans le marbre un allégement de charges plutôt que de m'en tenir à un crédit d'impôt.
Enfin je note, mais c'est tout le charme de la vie politique française, que ce sont les mêmes qui ont dénoncé à cor et à cri la complexité du CICE, demandant la transformation de ce qu'ils présentaient alors comme une usine à gaz en allégement de charges pérenne et qui aujourd'hui, une fois que nous le faisons, nous disent qu'ils veulent revenir au CICE.