Intervention de Agnès Buzyn

Réunion du mercredi 10 octobre 2018 à 21h30
Commission des affaires sociales

Agnès Buzyn, ministre des solidarités et de la santé :

Monsieur Perrut, sur la prestation de l'aide à domicile, je répondrai comme tout à l'heure : en fait, il s'agit essentiellement d'un effort sur les prix de la liste des produits et prestations remboursables (LPPR), c'est-à-dire des dispositifs médicaux utilisés dans le cadre des soins à domicile. Ces dispositifs médicaux ont une dynamique d'évolution des prix extrêmement importante et il nous a semblé légitime de réguler le secteur. Nous voulons le faire non pas par un reversement systématique comme pour les médicaments au-delà d'un certain seuil de dépenses, mais plutôt au moyen d'une régulation par la négociation. Nous espérons bien pouvoir faire ces 150 millions d'euros d'économies mais il ne s'agit pas d'économies sur les malades.

Monsieur Touraine, vous évoquez la dérogation pour les médicaments non substituables et le remboursement des génériques par pathologie. Nous n'abordons pas le sujet de cette manière, préférant établir une dérogation liée à des critères tels que des allergies caractérisées. Des négociations sont en cours entre l'ANSM et les professionnels, visant à mieux réguler cet usage important de médicaments non substituables sur les ordonnances.

Vous demandez si la forfaitisation en matière d'insuffisance rénale chronique permettra un rééquilibrage vers plus de transplantations et moins de dialyses. À ce stade, je ne sais pas exactement ce qui sera décidé par la mission qui travaille sur la forfaitisation mais l'idée est que les forfaits permettent une meilleure prise en charge en termes de qualité et de pertinence. Si besoin est, le rééquilibrage fera partie des critères du forfait qui sera mis en place.

S'agissant du vaccin anti-HPV, vous avez raison. Le cancer du col de l'utérus est si évitable qu'il est le seul cancer qui pourrait être totalement éradiqué. Or on dénombre plus de 3 500 cas par an et plus de 1 500 décès. La France est une très mauvaise élève en termes de vaccination. C'est pourquoi j'ai saisi l'an dernier la Haute Autorité de santé (HAS) pour voir s'il était envisageable d'élargir la vaccination aux garçons, comme cela se fait en Australie ou dans les pays anglo-saxons, ce qui a permis une nette diminution de la prévalence du virus dans la population. J'attends la réponse. Je tirerai d'autant plus les conclusions qui s'imposent que des cancers du canal anal ou des cancers ORL liés au HPV touchent les garçons. L'élargissement de la vaccination aux garçons serait donc logique.

Madame Khattabi, vous dites qu'il y a probablement un excès de spécialistes. En tout cas, il est clair que nous manquons de médecins généralistes : quasiment tous les territoires français sont sous-dotés en généralistes. Un rattrapage est déjà en cours puisque le nombre de postes d'internes de médecine générale augmente beaucoup depuis plusieurs années. Tous ces postes ne sont pas pourvus mais nous visons bien un rééquilibrage entre spécialistes et généralistes.

Monsieur Hammouche, vous me demandez si nous allons élargir le champ des pratiques avancées qui existent surtout pour les pathologies chroniques, la coordination et les ALD au sens large. Je souhaite étendre ces pratiques à la psychiatrie en 2019, pour qu'il y ait des infirmiers de pratique avancée dans les hôpitaux psychiatriques. Leur absence s'y fait cruellement sentir, notamment en raison du manque de médecins et du fait que la plupart des infirmiers ne sont pas spécialisés.

Madame Rist, vous m'interrogez sur le suivi des enfants. Tout d'abord, je voulais vous remercier pour votre aide concernant le parcours des enfants âgés de zéro à six ans. Vous travaillez avec l'Inspection générale des affaires sociales (IGAS) pour nous aider à améliorer l'offre de soins pour ces enfants. Nous voulons renforcer le suivi de leur santé en prévoyant plusieurs examens espacés et en nous assurant que la totalité des enfants auront passé l'examen obligatoire des six ans avant l'entrée au cours préparatoire (CP). Cet examen obligatoire n'est pas toujours réalisé. Il faudra certainement faire participer d'autres médecins que les médecins scolaires, voire pratiquer des délégations d'une partie de l'évaluation à d'autres professionnels. Nous comptons sur votre rapport pour nous aider à avancer.

Monsieur Nilor, nous avons trois procédures d'intégration de médecins étrangers venant de pays hors de l'Union européenne. Ce système est assez ouvert mais il exige que les candidats démontrent une certaine compétence. Quand ils n'obtiennent pas de statut en France, cela signifie qu'ils ont raté un examen de passage sur les compétences, ou qu'ils n'ont pas, au cours de leur exercice professionnel, montré qu'ils étaient capables de rejoindre le système. En tous les cas, nous veillons très attentivement à ne pas perdre de chances en termes d'intégration de médecins qui pourraient participer à l'offre de soins. L'intégration ne peut se faire au prix d'une perte de qualité de la médecine donnée à nos concitoyens. Nous n'avons pas l'intention d'en arriver à une situation où la qualité des soins dans les zones sous-dotées serait inférieure à celles des autres zones. Sous réserve de cet équilibre, nous sommes favorables à des dispositions qui intègrent des médecins étrangers.

Vous m'interrogez aussi sur le remboursement de l'activité physique dans le cadre des ALD. C'est totalement la philosophie de la réforme de la tarification. Nous n'allons pas créer une consultation ou un acte « sport » financé par la sécurité sociale, ce qui entraînerait des dérives considérables. En revanche, que l'activité physique soit intégrée à la prise en charge des patients en ALD dans le cadre d'un forfait, cela me semble relever d'une bonne pratique parce que c'est de la prévention utile.

Je laisserai Gérald Darmanin répondre à votre question sur les retraités agricoles outre-mer.

En ce qui concerne l'article 51, madame Vidal, vous m'avez demandé des précisions sur l'exercice mixte ville-hôpital. À ce stade, je ne peux pas vous apporter de précisions sur des mesures qui sont en cours d'élaboration. Dans le plan « Ma santé 2022 », nous avons fixé les grands principes de la réforme et, à présent, nous élaborons des mesures qui seront mises en oeuvre en janvier 2019. Disons que ce sera une liberté d'exercice mixte. Nous ne voulons pas trop encadrer afin que cela ne soit pas rédhibitoire pour les professionnels.

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