Intervention de Bruno le Maire

Réunion du mercredi 27 septembre 2017 à 13h00
Commission des finances, de l'économie générale et du contrôle budgétaire

Bruno le Maire, ministre de l'économie et des finances :

Madame de Montchalin, vous m'interrogez sur les obstacles que nous rencontrons. Nous venons de les entendre... C'est le conservatisme idéologique, l'incapacité à imaginer quelque chose de neuf pour notre pays, ce sont toujours ces mêmes mots, ces mêmes idées, et, dans le fond, toujours les mêmes propositions : dépenser l'argent que l'on n'a pas pour finir par appauvrir le pays. Voilà ce qui empêche la France de réussir depuis des années ! C'est tellement facile d'avoir la main sur le coeur et rien dans le portefeuille. Cela s'appelle le socialisme. Ce n'est pas ce que nous voulons pour notre pays. Nous proposons autre chose.

Pour répondre à M. Coquerel : effectivement, assumons nos divergences. Je vous laisse bien volontiers soutenir Éric Woerth. Je préfère que nous soyons en opposition démocratique. Nous pensons que l'on n'a jamais essayé de favoriser l'investissement, l'innovation, la création d'entreprise et de richesse dans notre pays. Il vaut mieux créer des richesses avant de redistribuer. Vous avez cité Helmut Schmidt. J'affirme que son théorème a fonctionné. L'Allemagne a créé des emplois. Les choix faits par ce pays il y a quelques années – même si ce n'est pas notre modèle – lui ont permis de devenir la première puissance économique en Europe, alors que la France a été reléguée.

Nous ne poursuivrons pas dans la voie de l'appauvrissement de notre pays et de sa relégation à cause de vieilles lunes qui ne marchent pas. Nous ne poursuivrons pas dans la voie de l'alourdissement des déficits et nous ne laisserons pas à nos enfants une dette qui, demain, quand les taux d'intérêt auront remonté, sera insupportable. L'argent que vous réclamez pour les plus modestes, les écoles, les universités, la santé, les hôpitaux, les infirmières partira en fumée lorsque l'augmentation des taux d'intérêt rendra impossible le remboursement de la dette.

Je vous le dis avec beaucoup de conviction, monsieur Coquerel, car vous n'avez pas le monopole du coeur dans cette commission ! Vous n'avez pas le monopole de l'humain ! Il n'y a pas d'un côté d'affreux technocrates qui, sans âme et sans coeur, essaient de gérer correctement le budget de la France, et, de l'autre, des Insoumis qui seraient les seuls à avoir une sensibilité et une attention aux plus faibles. Je conteste formellement votre analyse.

STX, Alstom : là encore, la ligne de partage est bien là, entre ceux qui pensent que notre industrie pourra s'en sortir seule face à la Chine ou aux États-Unis, et ceux qui croient qu'il vaut mieux regrouper les forces européennes pour constituer, comme nous avons su le faire avec Airbus, des géants industriels dotés des meilleures capacités des grandes nations européennes, en préservant l'emploi et les sites industriels.

Je suis heureux de voir que le maire de Belfort, M. Damien Meslot, a salué ce matin l'accord entre Alstom et Siemens. Il est davantage concerné que vous par Alstom, l'emploi et le site industriel ! C'est peut-être la preuve que cet accord est un bon accord pour l'industrie française, l'industrie européenne et l'emploi.

Madame Louwagie, vous avez raison, le Haut Conseil des finances publiques a salué la sincérité du budget, et pas uniquement la sincérité des prévisions du Gouvernement. Il a indiqué que la croissance potentielle était plus forte que l'hypothèse retenue. Il note également que l'écart de production, élément décisif de la construction du budget, est plus réaliste, à 1,5 point de PIB au lieu de 3,1. Les recettes lui semblent estimées de manière moins optimiste, avec une élasticité de 1, contre 1,3 en 2017. Il estime aussi que la budgétisation de certains postes habituellement litigieux – je pense en particulier au sujet, naturellement très sensible, des contrats aidés – est sincère et correcte.

J'insiste sur ces points : on peut contester les choix politiques d'un budget, avec toute la vivacité nécessaire. C'est ce qui fait la richesse du débat. Mais, si on le fait sur la base de prévisions honnêtes, cela facilite grandement le débat.

Monsieur Laqhila, j'ai bon espoir que nous sortions l'an prochain de la procédure pour déficit excessif et que nous mettions fin à une décennie durant laquelle la France a été incapable de remplir ses engagements européens. Ce moment sera une libération pour notre pays, tant vis-à-vis de ses partenaires européens et des investisseurs que vis-à-vis des générations futures. Nous n'avons pas à mettre sur le dos de ces dernières nos erreurs passées ou présentes.

Pour répondre à votre question concernant l'IFI, je rappelle que rien ne change : le niveau des taux, la base, l'abattement pour la résidence principale seront maintenus à leur niveau actuel.

Monsieur de Courson, j'ai déjà répondu concernant le déficit structurel. Nous estimons que les réformes structurelles engagées aboutiront à un déficit structurel effectivement légèrement inférieur à ce que la Commission européenne aurait pu nous demander à la base. J'ai engagé des discussions avec cette dernière, afin d'expliquer nos hypothèses et notre choix prudent, de 0,1 plutôt que de 0,2. Nous verrons quelles seront les conclusions de la Commission, mais il me semble que nous avons réussi à les convaincre. Au minimum, nous devions atteindre l'écart entre 0,6 et 0,5, soit 0,1, ce qui correspond exactement à ce que nous faisons. Nous verrons ensuite en 2019. Aurions-nous pu faire plus ? Peut-être. J'estime que notre choix est raisonnable au regard des réformes de structure engagées depuis plusieurs mois.

Le PFU sur les contrats d'assurance vie s'appliquera pour tous les versements postérieurs à aujourd'hui, 27 septembre 2017, date du Conseil des ministres. En cas de rachat effectué à compter de 2018, le PFU s'appliquera aux produits, à hauteur de la fraction d'encours supérieure à 150 000 euros. Je rappelle qu'il s'agit de la limite fixée par Emmanuel Macron lorsqu'il était candidat à la Présidence de la République. L'engagement est donc rigoureusement respecté.

Madame Rabault, vous m'interrogez sur l'impact de nos décisions. Je ne fais pas du Modèle économétrique de simulation et d'analyse générale de l'économie, dit « MESANGE », l'alpha et l'oméga de l'évaluation des politiques publiques, mais je suis prêt à ce que nous mettions en place les moyens d'une analyse et d'une évaluation objectives des choix fiscaux de rupture que nous avons effectués – PFU, baisse de l'impôt sur les sociétés, suppression de la part mobilière de l'ISF –, et de leurs résultats en termes de croissance et d'emploi. Les Français ont besoin de transparence. Ils ont besoin de savoir quelle est l'efficacité de ces politiques, d'autant plus que nous faisons un choix politique majeur.

Je vous confirme le maintien du taux d'impôt sur les sociétés de 15 % pour les PME, sur la fraction de leurs bénéfices n'excédant pas 38 120 euros nets. Ce maintien est fondamental pour les PME et les TPE. En revanche, le régime ne sera pas étendu.

Je pense avoir répondu suffisamment clairement à M. Coquerel.

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