Intervention de Gérald Darmanin

Réunion du mercredi 27 septembre 2017 à 13h00
Commission des finances, de l'économie générale et du contrôle budgétaire

Gérald Darmanin, ministre de l'action et des comptes publics :

Madame Louwagie, vous nous avez interpellés en indiquant que seul le taux de croissance était sincère. Je vous renvoie à la première page de l'avis du Haut Conseil des finances publiques : il note qu'« un effort visant à une budgétisation plus réaliste a été effectué sur le budget de l'État ». Cela va donc plus loin. Je le prends comme un encouragement à la sincérité, mais également un encouragement aux rapporteurs, afin qu'ils vérifient un certain nombre de points...

Monsieur de Courson, vous évoquez les apurements communautaires : tous, en tout cas tous ceux que nous connaissons et qui représentent potentiellement 300 millions d'euros de dérives par rapport à l'an passé, ont été budgétisés, même si des risques ou des événements exceptionnels peuvent toujours consommer de nouveaux crédits. Tout ce qui était dans les cartons du ministère de l'agriculture est intégré au budget présenté aujourd'hui, y compris les contentieux. Nous aurons l'occasion d'y revenir lors du débat sur le budget de l'agriculture, qui a connu une grande dérive au cours de ces dernières années, de l'ordre – de mémoire – de 7 milliards d'euros. Ce point a été soulevé par la Cour des comptes dans son rapport sur la situation et les perspectives des finances publiques, qui faisait le bilan du dernier quinquennat.

En revanche, je suis moins d'accord avec Mme Louwagie. On peut réfléchir sur le déficit de l'État. Nous avons exposé pourquoi ce déficit était malheureusement en progression : nous « sincérisons » ce budget – on ne peut nous accuser et nous féliciter dans une même phrase pour notre vertu ! – tout en proposant des baisses d'impôt. Je comprends que, pour certains d'entre vous, ces baisses ne sont encore pas suffisantes.

Je vous rappelle que seul le déficit toutes administrations publiques confondues compte. Nous en reparlerons à l'occasion du PLFSS. Il y avait peut-être, par le passé, des relations particulières entre la Sécurité sociale et l'État. Désormais, il faut que chacun paie ce qu'il doit payer. Ainsi, nous serons sincères et pourrons discuter et contrôler les budgets. Il est surtout important que la trajectoire du déficit soit rigoureusement tenue.

Beaucoup nous ont reprochés d'avoir pris des mesures de régulation cet été. Or, désormais, tout le monde trouve formidable que l'on soit potentiellement à 2,9 % de déficit en janvier ou février 2018. Il a fallu passer un été tumultueux pour passer un automne plus sympathique !

Si je comprends bien, si le professeur de Courson était amené à noter notre copie, il indiquerait « bien, mais peut mieux faire ». Je prends cela comme un encouragement. J'invite l'homme d'expérience qu'est M. de Courson à ne pas confondre le taux d'évolution des dépenses publiques et la part des dépenses publiques dans le PIB. Nous l'avons dit dès la construction de ce budget, nous souhaitons comparer la part des dépenses publiques dans le PIB. Pour la première fois depuis plus de quinze ans, elle baisse de 0,7 point, soit 16 milliards d'euros, mais tout dépendra de la richesse produite l'année prochaine. Cette comparaison me paraît plus sérieuse, plus efficace, et sans doute plus indiscutable que les tendanciels sur lesquels nous passerions beaucoup de temps à discuter. Il ne manque pas 10 milliards d'euros. Il manque éventuellement 4 milliards d'euros par rapport aux 20 milliards d'euros que vous imaginez. Avec un taux croissance de 1,7 %, voire un peu plus l'année prochaine, ce sera évidemment une dépense publique rapportée au PIB moins importante. Nous baissons la dépense publique et nous le faisons pas par rapport à une tendance dont l'évolution peut être discutée par tous.

J'entends les mots du président Woerth et ceux de Mme Louwagie et de M. de Courson : nous n'en ferions pas assez ? Attention à ne pas mourir en bonne santé non plus ! Il s'agit de la plus importante économie de dépenses publiques réalisée depuis une quinzaine d'années. Nous stabilisons la dette – ce n'était pas arrivé depuis 2006. Nous réalisons des réformes structurelles dans les secteurs du travail et du logement – qui ne seraient finalement qu'anecdotiques ? Je constate une différence entre ce que l'on entend ici et dans l'hémicycle. Je comprends que, désormais, une partie de l'opposition souhaite que nous rétablissions la baisse des dotations. J'attends avec intérêt l'amendement parlementaire ! Il est dommage que vous n'ayez pas énoncé cette idée avant les élections sénatoriales, cela aurait été plus clair pour les grands électeurs... Je ne voudrais pas causer de discorde. Je trouve simplement dommage que les débats en commission des finances se déroulent après les élections sénatoriales...

Pour notre part, nous avons toujours porté le même discours politique, qui consiste à croire dans les territoires. Je sais que vous y croyez également tous puisque vous êtes issus de ces territoires. Maintenant, si chacun est déresponsabilisé et augmente la dépense publique, alors, viendra le moment où, devant la commission des finances – je regarde le rapporteur spécial –, nous poserons la question des dotations aux collectivités. Mais prenons le pari de l'intelligence et considérons que chacun peut maîtriser la dépense publique. Tous les élus locaux espèrent la diminuer. Nous voulons encourager l'investissement local. C'est pourquoi nous proposons des mécanismes de « bonus » et de « malus », comme je les appelle. Les bonus en investissement seront versés à ceux qui réussiront à contractualiser.

Madame Rabault, je tiens à vous rassurer. J'espère que nous ne rejouerons pas Pierre et le Loup, à force d'annoncer un certain nombre de mauvaises nouvelles. Je suis prêt à débattre de notre « Livret du pouvoir d'achat » et suis heureux que notre discussion politique se focalise sur ce document que nous vous avons fourni. Cela signifie que la bataille est déjà en partie gagnée.

Il n'y a pas de taxe d'aménagement du territoire qui serait un impôt déguisé ou qui n'aurait pas été présentée comme telle. Nous allons simplement baisser la taxe sur les recettes des trains à grande vitesse (TGV) par décret. Nous allons financer les trains d'équilibre du territoire (TET) sur les fonds de l'Agence de financement des infrastructures de transport en France (AFITF), via une taxe sur les sociétés d'autoroutes. Les usagers ne sont donc pas concernés ! Je ne vois pas en quoi M. Michu, qui touche le SMIC, est concerné par la taxe TGV, mais nous aurons l'occasion d'en reparler.

Nous aurons également l'occasion d'en débattre, mais je vous indique que l'État compensera intégralement l'augmentation de la CSG pour la fonction publique territoriale, comme c'est le cas pour la fonction publique hospitalière. C'en est fini des transferts de charges. Nous voulons entretenir un rapport de confiance avec les collectivités locales. Le montant de la compensation est de 3 milliards d'euros, toutes fonctions publiques confondues.

Monsieur Coquerel, la taxe d'habitation est injuste. Une personne touchant le même revenu paie davantage si elle habite un logement social dans ma commune, Tourcoing, que ce qu'elle paierait à Neuilly-sur-Seine, pour prendre deux exemples extrêmes. Vous ne pouvez pas trouver cela juste, ce serait assez incohérent avec votre discours politique... Je crois qu'il est temps de redonner du pouvoir d'achat à nos concitoyens – la suppression sera réalisée par dégrèvement, les collectivités locales sont ainsi rassurées – et de réfléchir ensemble – si le président de la commission des finances souhaite se saisir de ce sujet tout à fait passionnant – au renouveau de la fiscalité locale. Posons-nous la question suivante : la taxe d'habitation et la taxe foncière permettent-elles aujourd'hui aux collectivités de disposer de bonnes ressources ? Le Président de la République a fait un certain nombre de propositions sur ce sujet.

Monsieur Roussel, je vous remercie. Même si nous ne sommes pas d'accord et même si, dans votre circonscription, que je connais bien, il n'y a pas de collectivité concernée par le contrat, vous avez fait des propositions. Ce ne sont pas les nôtres, elles sont parfois irréalistes, mais je constate que, parmi les membres de l'opposition, M. Roussel est le seul à avoir indiqué où il comptait trouver de l'argent. J'attends donc le prochain budget et la discussion parlementaire pour connaître les nombreuses propositions d'économies qu'il ne manquera pas de nous faire.

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