Monsieur le ministre d'État, les membres du groupe Les Constructifs sont un peu gênés par ce projet de loi, mais nous espérons que vous allez lever un certain nombre de nos doutes, partagés du reste par bon nombre d'interlocuteurs que nous avons rencontrés.
Nous ne sommes pas opposés aux symboles, bien au contraire : il est important que la France donne le ton, qu'elle tire en avant l'Europe à travers sa politique et que l'Europe, à son tour, tire en avant le monde ; mais nous en avons soupé des symboles ces dernières années, notamment lors de la loi de transition énergétique, dont les objectifs apparaissent plus prophétiques que réels et tenables. Nous pensons qu'il est important de mettre en avant l'obligation de sortir d'une consommation énergétique qui produit toujours plus de gaz à effet de serre et nous ne sommes pas contre la fixation d'objectifs comme se propose votre projet de loi ; reste que nous nous posons tout de même certaines questions.
La première, et vous allez sans doute nous éclairer sur ce sujet, a trait à une des premières décisions du Gouvernement, qui autorisait l'extraction et la recherche d'hydrocarbures en Guyane. C'était un sujet de préoccupation pour les grandes organisations environnementales, notamment la fondation que vous avez présidée. Certains esprits mal placés pourraient penser que ce choix de ne plus autoriser la production d'hydrocarbures dans le territoire hexagonal, à très long terme, n'était qu'un gage donné en contrepartie de cette autorisation dans un domaine très sensible, en sanctionnant au passage des petites entreprises françaises qui font leur travail tout à fait proprement… Mais vous allez sûrement lever nos doutes sur ce sujet.
Deuxième observation, on attend depuis dix ans une grande réforme du code minier afin de régler toutes les questions, au-delà de l'extraction des seules matières fossiles. Pourriez-vous nous dire pourquoi une telle loi ne nous est pas présentée pour le moment ? Vous avez retenu un certain nombre d'éléments dans le présent texte, mais quand cette réforme absolument indispensable sera-t-elle adoptée ? Que ce soit par la concertation ou par le regard porté par l'administration, un contrôle général est indispensable sur l'ensemble de ces activités.
On a entendu un certain nombre de couacs et d'incompréhensions lors de la préparation de ce projet de loi, notamment dans la concertation avec les industriels et les collectivités locales. Le Gouvernement a d'ailleurs dû revoir sa copie, le Conseil d'État n'ayant pas jugé l'étude d'impact à la hauteur. Il ne faut pas confondre urgence et précipitation. Les incompréhensions ont été progressivement réglées, mais vous pourriez peut-être nous donner quelques indications sur les conditions de mise en place des travaux.
Reste la question de fond : la date de 2040. À supposer que l'on atteigne nos objectifs, très ambitieux, de réduction des émissions de gaz à effet de serre en 2050, il y aura toujours 20 % d'émissions. Dans un pays ne produisant que 1 % de sa consommation d'hydrocarbures, la critique est facile : on va continuer à importer, ce qui va nous coûter cher, avec un bilan environnemental pas terrible, et l'on va casser la dynamique de certaines entreprises. Elles sont certes petites, et crient donc moins que les grandes ; reste que le sujet prête à controverse. Je ne vous cache pas que nous aurions préféré, et nous avons déposé des amendements en ce sens, que l'on rende notre position plus cohérente avec une interdiction à l'horizon de 2050, ce qui correspond aux grands objectifs nationaux et européens.