Il serait extrêmement réducteur de focaliser le débat sur la contribution française au budget européen sur le solde net. En effet, le budget communautaire finance également des agences dont l'action bénéficie à l'intégralité des États membres, comme FRONTEX, qui coordonne les activités douanières et la protection des frontières extérieures de l'ensemble de l'Union européenne. Je me suis rendu la semaine passée en Grèce dans le cadre du travail préparatoire à un rapport sur l'asile européen que je présenterai prochainement devant la commission des affaires européennes avec ma co-rapporteure, Marietta Karamanli. J'ai pu constater une nouvelle fois le rôle central de FRONTEX, dont les effectifs devraient passer à 10 000 agents d'ici à 2020, ou encore de l'EASO, le bureau européen d'appui en matière d'asile, et d'EUROPOL, l'office européen de police, qui lutte contre la cybercriminalité, la criminalité transfrontalière et le terrorisme, dont les moyens doivent être augmentés et les prérogatives élargies. Les flux migratoires aux frontières de l'Union européenne ne s'estomperont pas comme par magie. Il n'est nul besoin d'inventer de nouveaux acteurs européens pour traiter cette problématique, mais il est temps de donner aux organes actuels des moyens, tant financiers et réglementaires, à la hauteur de leur mission.
Il est temps de remettre l'Europe au coeur du débat public dans notre pays. Nous sommes à la croisée des chemins : le moment est venu d'agir, si nous ne voulons pas prendre le risque d'assister à la dislocation d'un projet auquel nous croyons profondément et qui a su maintenir l'unité et la paix sur notre continent depuis près de soixante-dix ans. Nous sommes collectivement responsables d'avoir laissé la méfiance vis-à-vis des institutions européennes s'installer dans la société, jusqu'au sein des parlements nationaux, alimentée par une lecture manichéenne des faits instrumentalisés à des fins de politique nationale.
Nous devons donc prendre collectivement nos responsabilités en veillant à faire correspondre des actes politiques aux intentions que nous affichons. Les représentants des groupes siégeant aux deux extrémités de cet hémicycle dénoncent opportunément la casse sociale dictée par Bruxelles ou le supposé laxisme des règles européennes face au terrorisme et à la criminalité transfrontalière. Mais pourquoi, alors, ne pas avoir voté pour la création du fichier Passenger Name Record – données des dossiers passagers – , pourtant indispensable pour lutter efficacement contre les réseaux terroristes, lorsque cette proposition était en discussion au Parlement européen ? Pourquoi ne pas avoir voté pour la révision de la directive sur les travailleurs détachés, qui est pourtant la plus grande avancée de ces dernières années dans le domaine social au niveau européen, puisqu'elle permettra d'enrayer de préjudiciables distorsions de concurrence pour nos entreprises et limitera le dumping social.