Intervention de Jean-Luc Mélenchon

Séance en hémicycle du lundi 22 octobre 2018 à 16h00
Projet de loi de finances pour 2019 — Article 37 et débat sur le prélèvement européen

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaJean-Luc Mélenchon :

Monsieur le président, madame la ministre, chers collègues, je veux d'abord saluer la qualité du rapport – bien que je n'en apprécie pas les conclusions – et celle, une fois de plus, des débats organisés par la présidente de la commission des affaires étrangères.

La position du groupe La France insoumise – qui s'exprime dans ce débat en tant que composante du mouvement européen Maintenant le peuple ! , regroupant une série de partis et d'organisations dans tous les pays – vous est connue. Il y a loin des mots à la chose, et il n'est pas sérieux de parler d'Europe comme si l'Europe d'aujourd'hui était la même qu'au moment de sa fondation. Celle des Six n'était pas celle des Seize, comme celle des Seize n'était pas celle des Vingt-Huit. Sans l'Union soviétique et l'équilibre de la terreur, l'Europe n'a pas du tout la même relation ni entre ses membres, ni avec le reste du monde. Notre génération politique – je ne parle pas de nos âges – a affaire à une tout autre réalité.

Quoi qu'il en soit, cette histoire nous a amenés au point où nous voici. Le Brexit est le début d'une débandade, qui s'observe de bien des façons. L'impasse saute aux yeux. Le plus grand risque est maintenant l'explosion pure et simple. Pour s'en prémunir, on multiplie les protestations certes émouvantes, mais qui ne sont que des voeux pieux, sans aucun objet réel.

Il faudrait soit tout accepter et persévérer dans la voie actuelle, soit s'en aller. Il n'y aurait rien entre les deux. Mais ce rien, c'est la place de la France, le discours qu'elle peut tenir, l'attitude constructive qu'elle peut adopter. La France doit jouer un rôle constructeur ; elle ne doit pas accompagner la débandade. Voilà l'idée que nous nous faisons de la place de notre pays à ce moment de l'histoire.

Tout de même, nous avons bâti l'Europe pour la paix ; et voilà que tout le monde aspire à créer l'Europe de la défense, c'est-à-dire l'Europe de la guerre.

Nous avons construit l'Europe pour le progrès social car nous voulions montrer, face à l'Union soviétique, que le progrès social et la démocratie étaient possibles. Et voilà que nous venons d'adopter un socle européen des droits sociaux moins protecteur que la Charte sociale européenne qui l'a précédé.

L'Europe, disait-on, avait au moins ceci de bon qu'elle nous permettait de progresser dans le domaine de l'écologie ; et voici qu'elle autorise le glyphosate pour cinq ans supplémentaires avant une nouvelle discussion.

Vous vous méprenez si vous pensez que nous sommes des frexiters ou des « sortistes ». Ce n'est pas notre propos. Nous voulons empêcher que nous suivions la pente jusqu'à la dislocation et le chaos ; nous voulons empêcher que la France soit défaite pour faire une Europe absolument folle.

Chers collègues, devant ceux qui, parmi vous, sont les plus passionnés par l'Europe, comment puis-je ne pas souligner la contradiction qu'il y a à se réclamer d'une Europe souveraine sans proposer un pas de plus en faveur de la souveraineté populaire en Europe ? Je le dis à la majorité, qui ne cesse de parler de souveraineté européenne : un Français, lorsqu'il parle de souveraineté, pense à celle du peuple. Il faudrait donc construire un peuple européen en lui donnant de la souveraineté. Le proposez-vous ? Non !

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