J'insisterai sur trois points : les relations entre la sécurité sociale et l'État, le soutien aux entreprises et aux ménages et l'équilibre des régimes de retraite.
Je débuterai toutefois, comme l'ont fait tous les orateurs qui m'ont précédé, en saluant le fait majeur de ce PLFSS : le retour à l'équilibre des comptes sociaux et la fin des déficits. En 2019, c'est l'ensemble du régime général et du Fonds solidarité vieillesse qui sera en excédent de 700 millions d'euros.
Cette situation emporte une double conséquence sur la dette : d'une part, le remboursement de la dette sociale stockée à la CADES est maintenant à portée de main, à l'échéance de 2024 ; d'autre part, l'apurement de la dette détenue par l'ACOSS peut être enclenché. Les deux tiers de cette dette, soit 15 milliards d'euros, seront ainsi transférés à la CADES dès 2019 et remboursés grâce à une augmentation progressive d'une fraction de CSG. Les excédents des comptes sociaux entre 2020 et 2022 permettront de couvrir le solde et d'en finir avec cette anomalie qui dure depuis 2001.
Il n'est donc pas étonnant qu'émerge le débat de l'utilisation qui sera faite, à cette échéance, des ressources actuellement affectées à cette dette. Plusieurs pistes s'ouvrent à nous. La première idée qui vient à l'esprit est celle du financement de la dépendance. On pourrait aussi supprimer les prélèvements sociaux, notamment la célèbre contribution au remboursement de la dette sociale – CRDS. Il faut toutefois garder à l'esprit qu'en cas de nouvelles dépenses ou de perte de ressources, nous dégraderions le déficit public, quand bien même la dette sociale aurait été remboursée.
Une autre option consisterait à utiliser cette recette, ou du moins une partie de celle-ci, pour accélérer le remboursement de la dette globale, singulièrement celle de l'État. En évoquant cette option, nous entrons dans le débat sur les relations entre l'État et la sécurité sociale, sachant qu'en 2019, certains allégements sociaux particuliers prévus par ce PLFSS, comme l'allégement social sur les heures supplémentaires ou la mesure relative au seuil d'augmentation de la CSG pour les retraités, ne seront pas compensés par l'État.
Dans ce contexte de retour à l'équilibre des comptes sociaux et d'apurement de la dette sociale, les règles de compensation des pertes de recettes de la sécurité sociale par l'État pourraient évoluer. Ce n'est pas un débat médiocre. L'État ayant réalisé des efforts financiers importants et engagé de nouvelle dépenses pour réduire le chômage – il s'est parfois endetté pour cela – , il n'est pas choquant qu'il puisse bénéficier d'une part des recettes sociales nouvelles liées à l'amélioration de l'emploi et au surplus de cotisations. Du moins le débat est-il ouvert.
Comme le précédent PLFSS, celui de 2019 reste tourné vers la compétitivité de nos entreprises et la valorisation du travail. Ainsi, la transformation du CICE en baisse de cotisations sociales donnera plus de lisibilité et de possibilités à nos entreprises. C'est un effort important consenti par notre pays, au moment même où le plan d'action pour la croissance et la transformation des entreprises – loi PACTE – fixe désormais à l'entreprise une responsabilité sociale et environnementale. Pour cet effort consenti en direction des entreprises, les Français – et c'est bien normal – nous demanderont des comptes, en particulier en termes d'emploi.
En 2019, le cumul de la baisse de cotisations sociales et du CICE apportera environ 20 milliards d'euros supplémentaires aux entreprises : de quoi patienter jusqu'à l'automne pour bénéficier de l'allègement de cotisations chômage sur les salaires autour du SMIC – un allégement de 3,5 milliards d'euros en année pleine qui, ajouté à la baisse du taux de l'impôt sur les sociétés – IS – , neutralisera l'effet à la hausse de l'évolution de l'assiette de ce même IS.
Outre les allégements destinés aux entreprises, d'autres sont destinés aux ménages et à leur pouvoir d'achat, en lien notamment avec le travail, alors que ce mois d'octobre voit se concrétiser la totalité de l'allègement de cotisations sociales salariales, pour un gain de 0,9 %, soit 3,5 milliards supplémentaires en 2019, et la première tranche de suppression de la taxe d'habitation, pour 3 milliards d'euros – et pour 6,5 milliards en 2019.
Le PLFSS 2019 prévoit également l'exonération de cotisations salariales sur les heures supplémentaires et complémentaires, ce qui constitue une mesure de pouvoir d'achat de 2 milliards d'euros en année pleine, pour un gain moyen de 200 euros environ par salarié.
Il faut encore citer la nouvelle augmentation de 20 euros par mois de la prime d'activité, après celle de 2018, pour les salaires jusqu'à 1,3 SMIC, y compris dans la fonction publique.
Du côté des allègements de cotisations, il faut encore saluer le travail approfondi réalisé ces derniers jours par le Parlement et le Gouvernement pour trouver un compromis qui préserve le secteur sensible des entreprises qui ont recours aux travailleurs occasionnels demandeurs d'emploi, les fameux TODE. Je veux aussi saluer la mesure de pouvoir d'achat de 350 millions d'euros à destination de 350 000 retraités dont les revenus flirtent avec le seuil d'augmentation de la CSG.
Pour ce qui est des dépenses maladie, un éclairage s'impose au vu des interprétations divergentes de l'évolution de l'ONDAM. Si les dépenses de santé devaient coller strictement à l'évolution naturelle liée au vieillissement, aux innovations thérapeutiques et au poids croissant des maladies chroniques, non seulement nous n'aurions pas résorbé la dette mais elle serait même insupportable aujourd'hui, car la dépense se situerait sur une trajectoire d'augmentation de 4 à 4,5 % par an, ce qui est insoutenable. Il faut donc d'abord remercier celles et ceux qui ont eu le courage d'entrer dans le cycle de la maîtrise des dépenses.
Des économies sont ainsi réalisées année après année, mais la préférence nationale en faveur de la santé reste forte, car l'ONDAM progresse beaucoup plus rapidement que la richesse nationale ou que les dépenses de l'État et des collectivités locales. En 2019, il progressera de 2,5 %.
Nous pouvons donc dire que nous réalisons à la fois des économies importantes, à hauteur de 3,8 milliards d'euros et une augmentation des dépenses de 4,9 milliards d'euros, soit 400 millions d'euros supplémentaires dans la transformation du système de santé et la modernisation de l'hôpital, par rapport à la trajectoire initialement prévue. L'enjeu est bien celui de l'adaptation de notre système de santé pour mieux organiser l'articulation entre médecine de ville, secteur médico-social et hôpital, et veiller à la pertinence des actes, avec une attention toute particulière à la qualité de vie au travail et à la qualité des soins.
La génération de nos parents et grands-parents mérite une attention toute particulière, car elle est plus exposée à la maladie, du fait du vieillissement. Pour eux, l'enjeu est celui de l'accessibilité financière : ce qui est susceptible d'altérer leur pouvoir d'achat n'est pas tant l'érosion de leur pension de retraite que le coût des soins et de la prise en charge de la dépendance. L'enjeu prioritaire est donc bien de maîtriser leurs dépenses.
Il faut donc saluer les mesures de pouvoir d'achat prévues par ce PLFSS, avec la mise en oeuvre du reste à charge zéro, ou 100 % santé en optique, audiologie et prothèses dentaires. Il n'est pas rare en effet qu'en vieillissant, on soit confronté à deux, voire trois de ces problèmes.
Je n'insisterai pas sur le renforcement des dispositifs d'aide à la complémentaire santé, qui a été largement évoqué, ni sur les mesures prises en faveur des EHPAD, en attendant d'apporter de meilleures réponses au grand défi de la dépendance, chantier dont vous avez, madame la ministre, lancé les travaux.
Pour la branche vieillesse, le maintien de l'équilibre est rendu possible par la mesure de revalorisation des pensions, limitée à 0,3 %. Je tiens à répondre à ceux qui tentent d'inquiéter les retraités, …