Intervention de Alain Ramadier

Séance en hémicycle du mardi 23 octobre 2018 à 21h30
Projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2019 — Discussion générale

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaAlain Ramadier :

Madame la présidente, madame la ministre, monsieur le secrétaire d'État, madame la présidente de la commission, monsieur le rapporteur général, mes chers collègues, j'interviendrai pour ma part sur les aspects relatifs au secteur médico-social de ce PLFSS, qui, en la matière, disons-le clairement, s'avère être un texte de transition. En effet, on peut parler d'une transition entre l'ambition affichée par le Gouvernement dans le domaine social et la concertation nationale sur le grand âge et l'autonomie, qui doit déboucher l'année prochaine sur un grand projet de loi sur la dépendance. Autant le dire d'emblée, celui-ci est très attendu de tous les Français et de tous les professionnels du secteur médico-social, tant il est urgent que notre pays aborde le virage de l'autonomie des personnes vulnérables, âgées, handicapées ou atteintes de maladies chroniques. En attendant, que retenir de ce PLFSS ?

Saluons tout d'abord les avancées de l'article 8, notamment la transformation du crédit d'impôt sur la taxe sur les salaires en baisse pérenne de cotisations sociales. C'est une mesure importante pour les services d'aide et d'accompagnement à domicile.

Saluons aussi la bonne volonté affichée lors des discussions en commission et le vote d'amendements déposés par l'opposition, par exemple ceux visant à prendre en compte le vécu du patient dans l'élaboration de critères de qualité dans les établissements de santé.

Saluons enfin la lutte contre le non-recours aux soins pour raisons financières, véritable fléau que nous devons affronter.

Vous me permettrez néanmoins, madame la ministre, de relever quelques inquiétudes et incohérences.

S'agissant de la lutte contre le non-recours aux soins et donc de la mise en place du reste à charge zéro, nous nous inquiétons de la hausse des remboursements par les mutuelles et les complémentaires, qui risque d'entraîner une croissance des cotisations pour les assurés. Selon une étude récente fondée sur la consommation de soins de 100 000 clients durant deux ans, un couple de retraités qui paie actuellement 170 euros par mois pour sa complémentaire santé individuelle verrait sa facture annuelle bondir de 192 euros par an. Une fois de plus, ce sont donc nos aînés qui risquent de pâtir de votre politique. Pour limiter ce risque, vous avez annoncé le lancement d'un comité de suivi. Comment ce comité de suivi empêchera-t-il les mutuelles de retomber sur leurs pieds ? Comment empêchera-t-il l'augmentation des prix de l'offre libre qui sera pratiquée pour compenser la mise en place de l'offre encadrée ?

Si nous sommes favorables à l'idée de permettre aux plus démunis d'avoir accès aux soins, nous ne souhaitons pas assister impuissants à la mise en place d'un système favorisant une augmentation générale des tarifs et l'installation insidieuse d'une offre de santé au rabais pour la majorité de nos concitoyens – un système, autrement dit, où la qualité serait réservée à ceux qui peuvent se l'offrir. Respecter le modèle français, c'est garantir à tous la même qualité de soins.

S'agissant du reste à charge pour les personnes handicapées, je relève des incohérences. Dans les faits, plus le handicap est lourd, plus, par exemple, le patient a besoin d'un fauteuil sophistiqué, moins il est remboursé par l'assurance maladie. Selon une étude de l'AFM-Téléthon réalisée en 2014, sur 477 projets d'achat de fauteuil électrique, 57 % seulement du coût moyen, soit 23 000 euros, étaient financés par la sécurité sociale et la PCH, la prestation de compensation du handicap. Salée, la note s'avère de surcroît fort disparate selon le département de résidence. Le PLFSS pour 2019 ne tient absolument pas compte de ces disparités territoriales ni des attentes des personnes atteintes de problèmes moteurs, qui ont besoin d'aides techniques pour réaliser les gestes les plus simples : manger, marcher, parler. Pourquoi le Gouvernement souhaite-t-il supprimer le reste à charge des personnes atteintes de déficience auditive et ne fait-il rien en parallèle pour tous les autres handicapés moteurs ou polyhandicapés ? Plutôt que d'aider les personnes en situation de handicap dans leur ensemble, ce texte s'occupe uniquement de certaines catégories de handicap. Que le Gouvernement souhaite rembourser les soins d'ergothérapie et de psychomotricité est une bonne chose, mais qu'il ne le fasse que pour les enfants de zéro à six ans atteints d'autisme n'est pas à la hauteur des enjeux.

Je voudrais enfin parler de l'avenir des prestataires de santé à domicile, amenés à prendre de plus en plus d'importance à court et moyen terme. Ce secteur est asphyxié par les économies demandées, alors qu'il contribue, de fait, à limiter les hospitalisations et donc les dépenses aux frais de la collectivité. Je veux ici me faire le porte-parole de ces professionnels pour vous demander d'agir de façon cohérente, madame la ministre.

À l'aube de la préparation et de l'examen du projet de loi relatif à la dépendance, prévu pour le second semestre de l'année prochaine, c'est d'un cap clair et cohérent que nos concitoyens ont besoin.

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