Intervention de Jacques Mézard

Réunion du mercredi 27 septembre 2017 à 17h00
Commission du développement durable et de l'aménagement du territoire

Jacques Mézard, ministre de la cohésion des territoires :

Je vais essayer de répondre dans l'ordre en n'oubliant personne.

Madame Kerbarh, vous m'avez interrogé sur l'organisation de la Conférence nationale des territoires (CNT) et le rôle des parlementaires. Bien évidemment, comme le Président de la République l'a indiqué lors de la séance d'installation, l'Assemblée nationale et le Sénat seront représentés à la CNT, soit directement dans le corpus institutionnel, soit dans les groupes de travail. C'est tout à fait légitime, et il était hors de question de se passer de l'apport du travail parlementaire.

Vous m'avez également interrogé à propos du Grand Paris, comme plusieurs de vos collègues. Quelle est notre vision du Grand Paris ? C'est un débat que j'ai déjà abordé. Et, comme je l'ai dit tout à l'heure, nous voulons écouter tout le monde, en dehors de tout a priori. C'est ce que nous avons commencé à faire. Une conférence sur le Grand Paris se tiendra de manière institutionnelle avant que le Gouvernement ne prenne certaines décisions – car à un certain moment, il devra bien prendre des décisions.

J'ai reçu encore récemment les représentants des différents échelons, que ce soit l'échelon communal, l'échelon des établissements publics territoriaux (EPT), celui de la métropole, de la région, du département ou de la ville-capitale elle-même, mais aussi ceux des structures qui concourent au fonctionnement de ce que l'on appelle le Grand Paris, que ce soit dans le domaine de l'aménagement ou des transports. Chacune et chacun de ceux que j'ai entendus m'ont dit que la situation actuelle était trop compliquée. Cela ne peut pas perdurer. Il faut absolument simplifier les choses pour que la « ville-monde » – parce que c'est bien cela, le Grand Paris – ait une structure qui lui permette d'être concurrentielle à une telle échelle. C'est une opinion globalement partagée.

Mais comment arriver à construire ce système institutionnel ? C'est beaucoup plus compliqué. Je ne veux pas revenir sur ce qui a été voté depuis un certain nombre d'années, mais je ne suis pas convaincu que cela ait contribué à simplifier la situation. Quand je vois le fonctionnement actuel de la métropole, la faiblesse de son budget et la redistribution qu'elle est amenée à faire aux EPT, je trouve le système, pour employer un terme neutre, assez « original » - ce n'est pas une critique, c'est une constatation. Chaque strate se considère comme étant elle-même parfaitement utile, et considère en revanche que l'utilité de la strate voisine, ou des autres strates, est beaucoup plus discutable.

Il me semble nécessaire, surtout si l'on veut réaliser de manière efficace et rapide de grands projets d'aménagement, de mener le débat sans a priori – et, au niveau du Gouvernement, il n'y en a pas. Car il faudra que cette conférence aboutisse à un certain nombre de propositions pour faciliter le fonctionnement du Grand Paris. C'est essentiel, non seulement pour le Grand Paris, mais pour toute la France.

Ce que je peux vous dire aujourd'hui, c'est qu'il faut avancer, que la situation actuelle n'est pas satisfaisante, ce qui est un avis partagé. J'aurai éventuellement l'occasion d'y revenir s'il y a d'autres questions sur le sujet.

Vous m'avez aussi parlé des villes moyennes. Celles-ci doivent-elles s'accrocher aux métropoles ou contractualiser entre elles ? Je crois surtout qu'il faut les conforter.

Un certain nombre de dispositifs ont été mis en place. Je pense à l'opération « centres-bourgs », qui avait été lancée sous le gouvernement précédent. C'est un bon dispositif. Je pense aux contrats de réciprocité ; à ma connaissance, il n'y en a que deux qui aient été conclus entre métropole et villes ou territoires éloignés des métropoles. Je connais un territoire qui se trouve à neuf heures de route, aller-retour, de la métropole régionale, ou à onze heures de train. L'expérience a prouvé qu'il n'était pas très facile, dans ces conditions, de mettre en place un contrat de réciprocité. Le Massif central en sait quelque chose, puisque l'on a mis Mende avec Toulouse, Aurillac avec Lyon et Guéret avec Bordeaux ! On peut considérer que c'est de l'aménagement du territoire, cela n'en reste pas moins « original »…

Nous devons donc trouver des modalités permettant à ces territoires périphériques de se sentir bien, et mieux intégrés. Nous y travaillons, et nous allons travailler ensemble. Aujourd'hui, il est nécessaire de les rassurer et de les conforter.

Sur l'efficacité énergétique, j'ai répondu dans mon propos liminaire.

Sur les zones de revitalisation rurale (ZRR), madame la députée, je suis un peu gêné pour répondre.

Il fallait que le système évolue – c'était une obligation législative. En 2015, il a été décidé, dans le cadre d'un article de la loi de finances rectificative, de modifier le zonage, avec effet au 1er juillet 2017. Cela me vaut d'ailleurs de recevoir de nombreux courriers émanant de celles et ceux qui ne sont plus en ZRR, pour me dire tout le mal qu'ils pensent de cette disposition. En revanche, je ne reçois pas de courriers ce celles et ceux qui se réjouissent d'y être entrés…

En tant que sénateur, j'avais déposé en mars 2017 une proposition de loi pour rétablir les critères précédemment en vigueur. Donc, si je vous disais que je trouve pertinente la technique de ce nouveau zonage, je ne serais pas en concordance avec ce que j'ai soutenu au Sénat. D'aucuns d'ailleurs omettent de se souvenir que c'est la loi de finances rectificative votée en 2015 qui est à l'origine de ce nouveau zonage. Simplement, par cohérence, pour tenir compte de la fusion des intercommunalités qui allait intervenir, il avait été décidé de repousser l'échéance à juillet 2017.

Que faire ? Quelque 3 500 communes sont sorties de ZRR et 4 000 environ y sont entrées. S'il est difficile de dire à celles qui sont entrées d'en ressortir, je constate néanmoins que, parmi celles qui sont sorties du zonage pour des raisons de prise en compte technique des villes-centres, figurent des communes très rurales et de montagne – même si celles qui sont en montagne vont bénéficier pendant trois ans de l'application de certaines dispositions favorables de la loi.

J'ai demandé au Commissariat général à l'égalité des territoires (CGET) de travailler sur le sujet, et de me faire des propositions pour améliorer, dans la mesure du possible, le dispositif à la marge.

Voilà ce que je peux vous répondre, madame la députée. Je suis conscient des difficultés qui se posent. Certaines communes qui ont des caractéristiques extrêmement rurales, par exemple, ont du mal à admettre de ne plus être en ZRR parce qu'elles se trouvent à trente kilomètres de la ville-centre.

J'observe aussi que le dispositif qui a été voté en 2015 dans le cadre de la loi de finances rectificative est la conséquence d'un rapport parlementaire, déposé par un député de la majorité et par un député de l'opposition de l'époque. Ce fut donc une oeuvre consensuelle.

J'espère que nous pourrons améliorer un peu les choses. Je ne prends pas d'autre engagement aujourd'hui.

Monsieur Descoeur, vous m'avez interrogé sur la prolongation éventuelle du dispositif « Pinel » et du PTZ. Je rappelle que, sous le précédent quinquennat, une prolongation a déjà été votée jusqu'au 31 décembre 2017. La question s'est donc posée de savoir si l'on s'en tenait là, ou s'il fallait de nouveau le prolonger, au moins partiellement. Un certain nombre de débats ont eu lieu, avec des positions extrêmement contradictoires, y compris dans le monde du logement. Certains étaient partisans de supprimer totalement le dispositif, d'autres de le maintenir strictement en l'état.

Nous avons donc décidé de prolonger partiellement le dispositif « Pinel » dans les zones tendues, pour une durée de quatre années, c'est-à-dire jusqu'à la fin du quinquennat.

Par ailleurs, nous avons décidé de maintenir le PTZ dans les zones tendues, pour le neuf, et dans toutes les zones, y compris les zones B2 et C, pour l'ancien, considérant qu'il fallait, dans ces zones, faire un effort maximal pour la revitalisation des centres-bourgs et des villes moyennes. Je tiens à le rappeler parce d'aucuns avaient oublié que normalement, le dispositif aurait dû s'arrêter de façon stricte le 31 décembre 2017.

J'en viens à votre question sur la réduction des normes, et j'y reviendrai plusieurs fois parce que le sujet a été abordé de différentes manières.

D'abord, il ne s'agit pas de mettre à sac le code de la construction, ni l'ensemble des normes. Nous ne sommes pas entrés dans une politique de chasse aux normes. Nous sommes simplement conscients que l'accumulation normative est devenue un frein à la construction.

Il était donc temps de faire une pause : c'est la volonté du Gouvernement. Je précise que dans les cinq dernières années, soixante décrets normatifs ont été pris. Je ne dis pas qu'il n'en fallait pas, je constate qu'il y en a eu soixante. Et je constate aussi que la taille du code de l'urbanisme de la construction est supérieure à celle du code du travail. La bonne santé d'un pays tient-elle au volume de sa codification ? Je ne le crois pas. C'est pourquoi nous allons réaliser une pause quant à la réglementation de l'État.

Cette accumulation normative est le résultat, je tiens à le souligner, d'efforts très partagés. Les gouvernements successifs ne sont pas les seuls à avoir fabriqué de la norme. Combien de lobbies ont poussé le Parlement à en fabriquer ? Vous êtes assez nombreux ici, et je n'ai pas besoin de pointer du doigt tel ou tel lobby ayant réussi la performance d'accroître la norme pour servir des intérêts qui ne paraissaient pas toujours servir l'intérêt du plus grand nombre…

Nous voulons stopper cette inflation normative, et privilégier les objectifs de résultats. Dans le domaine acoustique, par exemple, le but est de limiter les décibels, tout en laissant à ceux qui construisent le choix des moyens.

Il ne s'agit pas non plus, je le dis en présence de Mme la présidente, de faire la chasse aux normes environnementales, d'aller à l'encontre de la biodiversité dans ce pays, et de mettre en cause la sécurité de nos concitoyens.

Madame Panot, vous avez évoqué l'incendie de la tour Grenfell à Londres. Immédiatement, le ministère de la cohésion des territoires s'est adressé au Centre scientifique et technique du bâtiment (CSTB) pour savoir s'il y avait en France un problème de normes. Dans un souci de totale transparence, j'ai exigé que le CSTB publie son rapport sur son site. De fait, il n'y a pas de problème sur les bâtiments de plus de 50 mètres de hauteur, mais il peut y en avoir entre 28 et 50 mètres. J'ai donc demandé que l'on me fasse des propositions. Et si l'on crée de nouvelles normes, on en supprimera d'autres.

Il y a aussi une accumulation procédurale, que dénoncent tous ceux qui construisent, que ce soit chez les bailleurs sociaux ou chez les bailleurs privés. Là aussi, il y a trop de normes. Nous allons donc travailler la question. J'y reviendrai en répondant plus précisément à d'autres intervenants.

Monsieur Descoeur, vous m'avez parlé des métropoles, et de la relation entre métropoles et zones périphériques. Je pense avoir déjà répondu en partie. La situation est celle que nous connaissons, avec vingt-deux métropoles. Pour ma part, je n'ai pas voté la loi de fusion des régions, et je n'étais pas favorable à la multiplication des métropoles. Mais c'est fait, et il n'est pas question de revenir dessus. Prenons le système tel qu'il est, essayons de faciliter son fonctionnement et de prendre en compte les besoins de ceux qui sont hors zone métropolitaine. Cela ne veut pas dire, car ce ne serait pas objectif, que tout est parfait dans les métropoles. Il y a aussi dans les métropoles des quartiers en difficulté, des quartiers prioritaires, auxquels nous devons apporter toute notre attention.

Vous avez aussi parlé du numérique et de la 4G. J'y reviendrai en répondant à d'autres questions. Le Gouvernement veut qu'à la fin de 2020 la 4G soit partout. Nous voulons obtenir, et nous obtiendrons des opérateurs des engagements contraignants, c'est-à-dire l'application de l'article L. 33-13 du code des postes et des communications électroniques. Pour tout vous dire, lors de la dernière réunion, au moins deux des opérateurs ont dit de manière très claire qu'ils acceptaient de prendre des engagements contraignants. Je pense que c'est une évolution positive. En tout état de cause, nous irons jusqu'au bout, parce qu'il y va de l'intérêt général.

S'agissant de votre dernière question sur la compétence « eau et assainissement » des intercommunalités, je ne peux répondre qu'en mon nom personnel et je n'engagerai pas le Gouvernement. J'ai voté au Sénat pour que cette compétence soit optionnelle. Et si ce n'était pas l'arbitrage fait par le Gouvernement, je me ferai discret. (Sourires.) Je ne sais pas si ma réponse vous convient, mais, de toute façon, je sais que vous me l'auriez rappelé. Nos assemblées ont de la mémoire, et c'est très bien ainsi. Quant à moi, je n'ai pas l'habitude de renier mes votes.

Monsieur Millienne, vous m'avez plus particulièrement interpellé sur la question des normes. J'ai déjà répondu que l'on ne risquait pas de remettre en cause ce qui a trait à la biodiversité.

S'agissant plus précisément de l'accessibilité, nous nous sommes concertés avec des associations comme l'Association des paralysés de France (APF). Dans le cadre du futur projet de loi sur le logement, nous nous apprêtons à faire des propositions qui seront en total accord avec elles. Il n'eût d'ailleurs été pas raisonnable qu'il en fût autrement.

Je précise que nous nous dirigeons aujourd'hui, pour la construction neuve, vers 100 % de logements évolutifs, ce qui facilite la construction, et vers 10 % de logements directement accessibles. Je pense que nous allons dans le bon sens, de façon concertée, et que ce sera profitable à tous. Cela démontre qu'il n'est pas question de reculer, et que l'on peut évoluer sur la question normative dans la concertation.

Vous avez eu raison de parler de l'habitat de demain. Avec le numérique, avec les nouvelles mobilités, avec l'intelligence artificielle, tout va aller beaucoup plus vite que beaucoup de nos concitoyens ne le pensent, et la responsabilité de l'État, du Gouvernement et des collectivités n'est même pas d'anticiper, mais d'être au rendez-vous.

Vous avez évoqué le co-working, le télétravail, j'y ajouterai toutes les nouvelles mobilités, dont le développement est crucial pour notre territoire. On ne traitera peut-être pas ce soir de la question de la voiture autonome, mais tous les projets d'intelligence artificielle qui évoluent à vitesse accélérée préfigurent la ville de demain. Sans compter la domotique et le numérique, qui permettent de faire des économies d'énergie. C'est à partir de là que nous allons devoir penser et réaliser la ville. Je ne sais pas si cela vous rassurera, mais cela fait partie des priorités de mon ministère.

Monsieur Pancher, vous avez eu raison de dire qu'il fallait que l'État lâche du lest, qu'il fallait développer l'expérimentation et la contractualisation.

En matière d'expérimentation, vous connaissez la difficulté constitutionnelle dont j'ai parlé tout à l'heure – ce qui ne veut pas dire qu'il ne faut pas en faire. Aujourd'hui, l'expérimentation est possible, mais à son issue, elle doit être abandonnée ou généralisée. Cela pose un problème de fond qu'il convient de surmonter, en particulier par rapport à un certain nombre de collectivités qui, je le sais, souhaiteraient assumer un certain nombre de compétences.

Vous avez parlé du logement, de l'éducation et de la santé. Nous sommes tout à fait prêts à développer au maximum la contractualisation. Et quand je disais que les contrats de ruralité seraient poursuivis et que les CPER ne seraient pas remis en cause, je pense que ce peut être une réponse à la question que vous m'avez posée. Je pense avoir également répondu à votre question sur les zonages et l'accompagnement financier.

Le poids des régions dans les politiques de rénovation thermique est évidemment essentiel et, même s'il existe des différences entre les régions, les choses avancent assez rapidement. Il y a deux semaines, le Président de la République a exposé son plan « logement d'abord » à Toulouse, et nous avons la volonté de nouer de nouveaux partenariats avec les collectivités territoriales afin d'améliorer la situation.

M. Saulignac a évoqué la réduction du budget. Face aux problèmes qui se posent dans le pays – cela vaut pour la France comme pour les autres États –, il est toujours plus facile de recourir à l'endettement que de décider de réduire certains budgets, comme l'a décidé le Gouvernement. Il s'agit d'un choix politique assumé, et justifié par les raisons qui ont été exposées à de multiples reprises par le Président de la République, le Premier ministre et les ministres.

Le numérique est une priorité pour notre gouvernement, qui s'est fixé pour objectif de parvenir à un aménagement numérique équilibré. Nous réfléchissons actuellement à la question des servitudes d'utilité publique, que vous avez évoquée. Pour ce qui est de la notion d'État facilitateur, je puis d'ores et déjà vous assurer que notre ministère a fait passer le message à toutes ses administrations d'avoir à jouer ce rôle facilitateur. Il serait injuste de considérer que ce n'est pas le cas actuellement, mais on peut toujours faire mieux.

S'agissant de la mise à disposition des infrastructures, tout ce qui pourra permettre d'avancer plus vite – ce qui ne signifie évidemment pas faire moins bien – sera mis en place, tel est en tout cas le message que j'ai d'ores et déjà fait passer à nos services. Le déploiement de la fibre optique sur tout le territoire, qui implique la mise en oeuvre de travaux considérables et de financements qui le sont tout autant, représente un besoin crucial pour notre pays et l'ensemble de nos concitoyens – nous tenons à ce que personne ne se trouve mis à l'écart. Un tel défi s'est déjà présenté par le passé lorsqu'il s'est agi de déployer le réseau électrique, ce qui ne s'est pas fait en un jour : pour la fibre optique, il faudra trouver le moyen d'aller plus vite et nous y arriverons, car nous en avons la ferme volonté.

Madame Panot, vous avez employé au cours de votre intervention des termes que je n'aurais pas utilisés moi-même, mais c'est votre droit, et je respecte profondément toute expression démocratique. Sur le fond, nous n'avons jamais eu l'intention de prendre des dispositions contraires à la sécurité de nos concitoyens, et nous sommes parfaitement conscients du fait que, dans le cas où surviendrait un incendie ou tout autre événement de ce genre, chacun devrait prendre ses responsabilités. Pour ma part, j'ai pris et je continuerai à prendre des mesures qui me paraissent protectrices, ce qui ne signifie pas que notre volonté d'aller plus loin sur la question normative et sur celle de la simplification des procédures se trouve remise en cause : il n'est pas normal, par exemple, que des commissions soient consultées successivement alors qu'elles pourraient l'être simultanément. Un aménageur du Grand Paris me confiait récemment qu'entre le moment où l'on ouvre un dossier d'aménagement et la livraison des équipements, il se passe en moyenne douze ans ! C'est malheureusement la réalité, et ce n'est une bonne chose ni pour nos concitoyens, ni pour la santé financière de l'État et des collectivités locales.

De même, il y a aujourd'hui plus de 30 000 logements dont la réalisation est bloquée à cause de recours. Sans aller jusqu'à dire que tous les recours sont injustifiés – le droit au recours est un droit constitutionnel, que je ne remets pas en cause –, ceux qui ne sont formés que dans le but de soutirer de l'argent à celui, particulier ou professionnel, qui veut construire, me paraissent profondément scandaleux. Je considère que tout ce qui pourra être fait pour mettre fin à de telles pratiques ira dans le bon sens, et j'y travaille.

Vous m'avez également dit, madame Panot, tout le mal que vous pensez de la loi portant nouvelle organisation territoriale de la République (NOTRe). Étant donné le vote que j'avais émis sur cette loi, nous sommes au moins d'accord, même partiellement, sur un point ! Vous parlez de mettre fin à la concurrence entre les territoires, pour ma part je souhaite surtout que l'on puisse permettre à tous les territoires de se développer de la meilleure manière possible. Sur ce point, nous avons récemment pris des dispositions allant dans le bon sens. J'ai visité, au sein du réseau d'éducation prioritaire renforcé (REP+), des classes maternelles dédoublées, et ce dispositif me paraît constituer un bon moyen de rétablir l'équilibre dans le domaine de l'éducation – à ce jour, 2 500 classes semblables ont été ouvertes, et il y en aura beaucoup plus à la rentrée prochaine.

Monsieur Wulfranc, je vous remercie d'avoir exprimé votre convergence de vues sur plusieurs des points que j'ai développés dans mon exposé liminaire, notamment sur la prolifération métropolitaine, sur le fait qu'il n'est pas opportun d'imposer la fusion de départements, ou encore sur les moyens affectés aux départements. Votre intervention m'a confirmé ce que je savais déjà, à savoir que vous êtes un défenseur des départements.

Le Grand Paris constitue une question à part, compte tenu de la complexité du sujet, du nombre d'intervenants et de la nécessité d'aborder ce dossier d'une manière particulière par rapport au reste du territoire.

Pour ce qui est de la trajectoire financière des départements, je ne suis pas le ministre chargé de cette question – sauf en ce qui concerne les subventions – et je peux simplement dire que les efforts demandés aux collectivités en matière de fonctionnement sont concentrés sur ce que l'on appelle les grands comptes, ce qui signifie que, pour plus de 35 000 collectivités, il n'y aura pas de baisse des dotations – ce qui constitue un message positif pour tous ceux qui se posaient la question. En ce qui concerne la contractualisation et la négociation entre l'État et les grandes collectivités, le débat est en cours, chacun défendant sa strate et son rayon d'action, et tous les départements, toutes les métropoles n'étant pas dans la même situation. Une concertation est en cours, mais il a d'ores et déjà été annoncé que nous avons sur cette question une vision tendancielle, portant sur toute la durée du quinquennat, ce qui est également un message positif.

Sur le plan pratique, vous m'avez interrogé sur la nécessité d'avoir un nouveau président de l'ANRU. Je salue l'excellent travail accompli par le précédent président, François Pupponi, et je vous indique qu'un nouveau président sera nommé prochainement. Si nous ne connaissons pas encore son nom, je vous précise qu'il s'agira forcément d'une personne connaissant bien les quartiers prioritaires et la politique de la ville. Par ailleurs, même si vous ne m'avez pas posé la question, je vous confirme également que le milliard d'euros promis fin 2016 à l'ANRU lui sera bien alloué par l'État, et que les crédits de la politique de la ville, qui intéressent particulièrement les collectivités et les associations, seront sanctuarisés en 2017 sur le quinquennat – « rabot » inclus.

Enfin, vous m'avez demandé de veiller à ne pas mettre la capacité financière des bailleurs sociaux en péril. Le Président de la République a écrit hier un courrier au président de l'Union sociale pour l'habitat (USH), dont je vous donne lecture : « Nous souhaitons apporter aux bailleurs sociaux, dont nous connaissons la diversité des situations, des moyens financiers supplémentaires en leur demandant de les affecter à des baisses de loyer pour les ménages les plus modestes, avec une baisse concomitante d'APL. Je souhaite que les discussions se poursuivent avec les ministres en charge pour trouver les meilleurs moyens de baisser les loyers au bénéfice des locataires. La disposition envisagée pourra être adaptée si un consensus se dégage avec les bailleurs sociaux. Le dialogue est donc ouvert, et je vous invite à faire toutes les propositions qui permettraient de simplifier et moderniser la gestion du logement social, dans l'objectif de rendre un meilleur service aux locataires actuels et futurs. Cette réforme structurelle ne doit pas faire de perdants : ni les bailleurs sociaux, ni les allocataires, ni notre capacité collective à construire plus et moins cher ne doivent être affectés ». Cela signifie que le dialogue n'est pas rompu ; pour ma part, je l'ai toujours poursuivi et je souhaite bien évidemment que nous trouvions les solutions les plus adaptées pour faire avancer ce dossier.

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