Intervention de Thibault Bazin

Séance en hémicycle du mercredi 24 octobre 2018 à 21h30
Projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2019 — Article 8 (appelé par priorité)

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaThibault Bazin :

Madame et messieurs les ministres, vous êtes quatre, ce soir : c'est le signe qu'il y a le feu !

L'alinéa 34 de l'article 8 prévoit de supprimer l'exonération de charges patronales pour les employeurs agricoles qui emploient des travailleurs occasionnels demandeurs d'emploi. Or plus de 900 000 contrats sont chaque année éligibles à cette exonération. Sa suppression occasionnerait une perte totale de 144 millions d'euros pour les employeurs de saisonniers, soit 189 euros par mois et par contrat. Cela équivaut à une hausse de 15 % du coût de la main-d'oeuvre et de 8 % du coût de production en arboriculture, secteur dans lequel les marges ne sont que de 2 à 3 %.

Cet allègement de charges patronales, spécifique aux salariés saisonniers agricoles, avait portant été mis en place pour faire face au dumping social de nos concurrents européens, notamment l'Espagne, l'Italie et l'Allemagne, dans les filières de la viticulture, de l'arboriculture, de l'horticulture et du maraîchage. Je rappelle que, par rapport à la France, le coût du travail saisonnier est inférieur de 27 % en Allemagne, de 37 % en Italie et de 35 % en Espagne.

Ce dispositif prévoyait un taux d'exonération de charges patronales de 33 % pour les salaires compris entre 1 et 1,25 SMIC, auquel venait s'ajouter le CICE, au taux de 6 %, ce qui supprimait ainsi la quasi-totalité des cotisations patronales.

Devant l'ampleur des réactions, le Gouvernement rétropédale : vous avez enfin mesuré les conséquences catastrophiques qu'aurait la suppression du dispositif. Mais ce rétropédalage est insuffisant, dans son ampleur comme dans sa durée. En effet, votre mesure d'atténuation ne concerne que les années 2019 et 2020. Il est évident que les deux dispositifs supprimés par l'article 8 ne seront pas intégralement compensés par le nouvel allègement de charges général prévu par le Gouvernement. En effet, le taux d'exonération est moins élevé et la dégressivité moins avantageuse. Cette reculade, présentée comme une avancée, ne doit pas masquer une réalité : 39 millions d'euros manqueront encore par rapport au dispositif d'exonération précédent.

Vous n'atténuez que sur deux ans les effets de cette suppression en arguant que la situation des agriculteurs va s'améliorer prochainement grâce aux réformes entreprises. Or nous savons que ces réformes, notamment celles contenues dans la loi EGALIM qui a fait suite aux états généraux de l'alimentation, n'auront pas l'effet escompté.

Il faut une compensation intégrale pour les employeurs de saisonniers agricoles…

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