Les inégalités d'accès à la santé, criantes, s'aggravent et s'aggraveront encore dans les années à venir si nous ne faisons rien. Les communes rurales sont les plus touchées, de même que les périphéries des grandes villes. En conséquence de la désertification médicale, le nombre de passages aux urgences a doublé en vingt ans. Entre 2012 et 2016, l'accès aux médecins spécialistes s'est réduit pour 38 % des Français en ce qui concerne les ophtalmologistes, 40 % s'agissant des pédiatres et même 59 % pour les gynécologues.
Face à la désertification médicale, aux délais de rendez-vous scandaleusement longs, à la pénurie de spécialistes, la majorité promet des mesures incitatives. Pourtant, comme le démontre le rapport d'enquête de nos collègues Alexandre Freschi et Philippe Vigier sur l'égal accès aux soins, aucune des multiples mesures incitatives de ces dernières décennies – majorations de revenus, exonérations d'impôts – n'a fonctionné. Un exemple est particulièrement parlant : la majoration de 20 % des honoraires des médecins généralistes libéraux exerçant en groupe dans des zones sous-dotées a coûté, entre 2007 et 2010, 63 millions d'euros pour un apport net de seulement cinquante médecins.
À l'inverse, les mesures de régulation des installations sont très efficaces : c'est ce que révèle le même rapport, qui a notamment évalué les effets de la régulation des installations pour les pharmaciens, les sages-femmes, les infirmiers et les masseurs-kinésithérapeutes. Le conventionnement pour les sages-femmes a, par exemple, permis de ramener, entre 2010 et 2016, la part des installations en zones surdotées de 28 % à 10 % seulement. Qu'attendons-nous donc pour instaurer une mesure de conventionnement sélectif concernant les médecins ?
Par cet amendement, nous demandons simplement que les médecins libéraux ne puissent plus s'installer dans les zones où la densité de médecins est déjà élevée. C'est le cas pour de très nombreuses professions, y compris pour certaines qui ne sont pas vitales, comme les géomètres-experts. Mes chers collègues, beaucoup d'entre vous êtes médecins : saurez-vous ne pas plier face au corporatisme ?