Intervention de David Lorion

Réunion du mardi 23 octobre 2018 à 17h15
Commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l'administration générale de la république

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaDavid Lorion :

Madame la ministre, nous ne nous sommes pas réveillés pour rien ce matin : après avoir bataillé pendant un an, vous rétablissez l'APL-accession pour le logement social. La nouvelle est de taille !

Le budget des outre-mer a augmenté de 22 %. Mais nous savons bien que cette augmentation est financée par des suppressions d'avantages fiscaux liés à la TVA NPR, pour 100 millions d'euros, et à l'abattement d'impôt sur le revenu, pour 70 millions d'euros. Et vous avez ajouté récemment une nouvelle taxation du rhum, qui rapportera quelque 30 millions d'euros, soit un total de 200 millions d'euros en moins sur le budget de l'outre-mer. La vérité, c'est qu'il n'y a pas beaucoup de solidarité dans ce budget qui augmente certes, mais que vous faites augmenter en puisant dans les ressources mêmes des outre-mer.

La répartition des grandes masses ne connaît pas non plus d'évolution particulière ; 56 % de la dépense de cette mission concerne les allégements de charges sociales afin d'améliorer la compétitivité des entreprises. Des ajustements restent à venir : chacun est conscient de l'importance des prochaines négociations pour que la transformation du CICE en allégement de charges sociales ne pénalise pas les entreprises ultramarines – nous parlons de 1,7 milliard d'euros.

Le reste du budget se divise en parts égales, ou presque, entre le logement, le service militaire adapté (SMA) et les contrats État-collectivités. Certes, le prolongement de l'aide fiscale en faveur des investissements outre-mer jusqu'en 2025 est de nature à rassurer les entreprises. Le président de la Fédération des entreprises des outre-mer (FEDOM) disait qu'il s'agissait d'une mesure passablement « optique ». Encore faut-il que l'affichage ne soit pas vidé de son sens par des difficultés d'accès, notamment parce que ces mesures fiscales ne sont pas prises en compte dans le prélèvement de l'impôt à la source !

Le Fonds exceptionnel d'investissement (FEI), géré par l'État, progresse fortement ; c'est exceptionnel ! Cela veut dire qu'il s'agit d'une cagnotte extrêmement importante, gérée directement par le ministère. Je ne suis pas certain que beaucoup de moyens alloués à ce Fonds se traduisent à la fin de cette année par de réels investissements, étant donné la faiblesse dans laquelle se trouvent les collectivités territoriales.

L'originalité de ce budget est à chercher dans la révision des aides économiques. Vous avez beaucoup travaillé sur ce sujet et elles ont été modifiées de manière substantielle. La TVA NPR, qui a été supprimée, était un mécanisme qui s'apparentait à une subvention assez simple aux entreprises. Vous nous dites qu'elle a été évaluée et qu'elle ne servait pratiquement à rien ; je n'en suis pas tout à fait sûr.

Comment sera répartie cette dotation, qui bénéficiait déjà aux territoires d'outre-mer, mais que le Gouvernement veut faire apparaître comme une mesure nouvelle ? La plus grande partie, 70 millions d'euros, va abonder le FEI, géré, comme je le disais, par l'État, et visant à financer des infrastructures nouvelles. Des questions restent en suspens. Les promesses engagent-elles réellement le Gouvernement ou seulement ceux qui les croient ? Quels investissements seront privilégiés ? Comment pourrons-nous participer à ces investissements ?

Vingt-trois autres millions d'euros sont fléchés vers les contrats de convergence et de transformation, venant compenser la baisse du budget de la mission « Relations avec les collectivités collectivités » et permettant à l'État de respecter les engagements pris lors des signatures de contrats financiers. Quelque 50 autres millions d'euros financeront les garanties aux entreprises : fonds de garantie, fonds de capital-investissement, appels à projets… Quant au solde, il sera réparti entre les aides aux collectivités fragiles, aux constructions scolaires et aux reconstructions post-cycloniques. Il n'est pas certain que cette dispersion garantisse que tout ce qui aura été récupéré par la suppression des aides fiscales revienne bien aux outre-mer. Il conviendra d'organiser un débat sur cette question à l'issue de l'année budgétaire.

Le second changement majeur, sur le plan économique, réside dans la suppression du CICE, transformé en allégements de charges sociales, afin d'encourager la compétitivité des entreprises et la création d'emplois. Si l'enveloppe globale est préservée, pourquoi le Gouvernement n'a-t-il pas saisi l'occasion d'accompagner un meilleur encadrement dans les entreprises en favorisant l'embauche de personnes plus qualifiées à un niveau de salaire égal à 1,2 fois, 1,4 fois, voire 2 fois ou 2,5 fois le SMIC ? Je crois savoir que des débats sont en cours et qu'ils vont donner des résultats satisfaisants. Au-delà de la compétitivité des entreprises, c'est aussi le renforcement de leur encadrement qui est à souhaiter car les jeunes Réunionnais veulent travailler dans des entreprises ultramarines. Les discussions sont ouvertes et j'espère qu'elles trouveront une issue favorable.

La mesure de regroupement des dispositifs zonés en un seul, la « zone franche d'activités nouvelle génération » (ZFANG), apparaît bonne, mais certains points importants restent encore à débattre.

Je réitère mes félicitations pour la bonne nouvelle que vous nous avez annoncée, madame la ministre, mais les 225 millions d'euros alloués au logement social à La Réunion ne permettront pas de répondre à la demande. 22 000 foyers attendent encore un logement.

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