Madame la ministre, je suis très ennuyé, car si nous partageons quelques idées, nous nous opposons sur d'autres. Je suis très heureux que vous ayez pensé à construire une nouvelle émancipation économique. Cette volonté est claire, notamment par la mise en place d'une vision globale, avec des filières. En revanche, contrairement à Mme Maina Sage, je ne pense pas que vous soyez passée d'une logique de guichet à une logique de projets. En rapatriant les fonds de la TVA NPR, qui avait pour elle une dynamique de liberté d'utilisation, une dynamique de progrès sur le plan local, vous recentralisez le produit de cette taxe, de l'ordre de 100 millions. La méthode employée va à l'encontre de l'air du temps, puisque c'est de Paris que vous allez décider de l'attribution des subventions, à partir du FEI. Par ailleurs, très honnêtement, je ne suis pas du tout d'accord avec votre analyse sur la question de l'abattement. Nous savons pertinemment que cette décision concernera bien plus de 4 % de personnes : selon nous, 20 % de personnes seront touchées.
Je regrette la fermeté de cette décision à l'image de votre majorité, notamment quand, à cinq heures du matin, elle revient sur un amendement voté sur l'article 199 undecies C du code général des impôts qui aurait permis de continuer la défiscalisation, à la fois dans le secteur public et privé. La majorité sait pourtant bien que le secteur privé ne peut avoir accès aux crédits d'impôt de la même manière que le secteur public – notamment pour le préfinancement des opérations et la réhabilitation. Vous avez même poussé l'audace jusqu'à comparer cet article 199 undecies C à l'APL-accession. Cela n'a rien à voir ! Souvenez-vous du combat que nous avons mené pour le rétablissement de l'APL-accession : il nous avait été radicalement refusé et parce que nous avons protesté, parce que Mme Huguette Bello a fait plusieurs interventions brillantes dans l'hémicycle, vous revenez un an plus tard sur votre décision. Mais pour combien de temps l'avez-vous rétablie ? Pour quelques semaines ? Un an ? Éternellement ? Nous souhaitons qu'elle soit pérennisée car elle permet l'accession des plus pauvres à la propriété. Cette suppression a été extrêmement douloureuse.
S'agissant de la comptabilité, alors que votre budget augmente de quelque 6 millions d'euros, vous rapatriez plus de 370 millions d'euros : 100 millions plus 70 millions, plus 200 millions au titre de la défiscalisation du logement social dont vous dites qu'ils ne sont pas utilisés mais qui sont dans le budget. Il y a tout de même une grosse différence entre 6 millions d'euros et 370 millions d'euros ! Où se trouve l'argent ?
Je partage votre ambition de changer de modèle, mais vous avez employé, dans l'hémicycle, le terme « disruptif », dans lequel il y a rupture. Or quand il y a une rupture, il y a aussi naissance. Il serait donc intéressant de savoir ce que vous voulez faire naître. Par ailleurs, je ne vois pas la sanctuarisation. Dans quelque temps, vous serez, vous ou quelqu'un d'autre, en face d'une réalité budgétaire : les 170 millions d'euros deviendront 2 millions d'euros.
Ce que j'ai trouvé très douloureux, c'est d'opposer les outre-mer entre eux, même s'il y a une différenciation à mettre en oeuvre dans la politique de développement économique.
Madame la ministre, si je me réjouis que vous soyez sur la ligne d'un éventuel nouveau modèle économique qui nous permette de sortir des importations massives et de construire un progrès mieux partagé, je suis attristé par la brutalité des décisions prises, notamment celle consistant à profiter de la nuit pour abîmer un amendement de notre groupe, qui avait créé beaucoup d'espoir dans les outre-mer.
Je vous demande d'être très vigilante s'agissant des exonérations, afin d'éviter que les entreprises rencontrent des difficultés.
Enfin, vous aviez prévu une aide pour l'audiovisuel, visant en particulier les petites télévisions. Nous en avions, par amendement, voté le principe. Or, vos services nous disent qu'elle n'est pas mise en place ; pourriez-vous faire respecter la loi ?