Intervention de Dominique Potier

Réunion du mardi 23 octobre 2018 à 17h15
Commission des affaires économiques

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaDominique Potier :

Dans ce cas, il nous faudra un peu plus de cinq minutes, Madame la présidente ! Heureusement, c'est toujours un bonheur d'écouter parler M. Thierry Benoit !

Je veux tout d'abord saluer le nouveau ministre de l'agriculture à qui je souhaite la meilleure réussite du monde. Je veux lui dire qu'il est à la tête d'une grande administration que j'ai eu l'occasion de fréquenter lors de mon précédent mandat, qui est extrêmement dévouée et qui a une éthique très forte. Notre pays a l'une des paysanneries les mieux organisées et les plus performantes du monde et une société qui est en train de comprendre les enjeux alimentaires et agricoles. Si les États généraux de l'alimentation ont servi à quelque chose, c'est bien à révéler cette passion française pour la gastronomie, pour l'agronomie et les questions agricoles. Monsieur le ministre, vous ne pouvez pas ne pas réussir. Sachez que les socialistes feront tout pour être force de propositions, pour faire preuve de discernement et de responsabilité, comme ils l'ont fait depuis le début de cette législature avec votre prédécesseur que je salue amicalement.

Je salue également le travail qu'a accompli notre rapporteur pendant l'examen du projet de loi EGALIM et depuis le début de ce mandat ; au-delà de nos désaccords, nous avons une estime réciproque et je tiens à le féliciter pour son investissement personnel.

Le Grand Est traverse actuellement une sécheresse dramatique, comme c'est le cas dans d'autres régions. Aussi est-il urgent que vous donniez suite, ce qui n'a pas été le cas jusqu'à présent, aux responsables régionaux – demain matin, je serai en réunion avec M. Jean Rottner –, à tous les responsables paysans des chambres agriculture, des syndicats qui sollicitent un rendez-vous pour envisager un plan afin d'éviter d'ajouter du malheur au malheur. La situation est extrêmement grave dans nos régions, les fourrages d'hiver sont déjà consommés.

Cette sécheresse nous alerte sur les conséquences du changement climatique en ce qui concerne les questions agricoles à l'échelle de nos territoires, de l'Europe et du monde. La Food and Agriculture organization (FAO) nous a alertés sur les conséquences dramatiques qu'aurait le changement climatique sur la qualité nutritionnelle, les surfaces cultivables et les rendements. C'est une alerte rouge que nous devons prendre très au sérieux, il faut réfléchir à la manière dont l'agriculture peut être une partie de la solution et dont elle pourra, dans la mesure du possible, gérer les adaptations nécessaires.

Un débat important a eu lieu sur la poursuite des allégements de charges pour les emplois saisonniers, mais j'avoue ne pas avoir tout compris. J'aimerais que vous preniez quelques minutes aujourd'hui pour nous dire si tout est vraiment réglé, car pour être au rendez-vous de la compétitivité, les employeurs de main-d'oeuvre saisonnière ont besoin de continuer à bénéficier du soutien qu'ils avaient eu jusqu'à présent.

Monsieur le ministre, vous allez beaucoup légiférer par ordonnances, ce que nous avions déjà condamné auprès de votre prédécesseur. J'appelle votre attention sur un sujet, celui de réforme de la coopération agricole. Je rappelle que le système coopératif agricole, par lequel passe 40 % du commerce agricole, est une fierté française, le leader de l'économie sociale. C'est un domaine qui me tient à coeur, qui tient à coeur à M. Jean-Baptiste Moreau et à tous mes collègues. Ne réformez pas la coopération agricole dans votre coin, seulement avec des spécialistes : le Parlement doit être associé aux solutions qui ont été apportées pour moderniser et peut-être parfois rendre plus éthique la coopération agricole. Nous sommes à votre disposition et nous sommes prêts à former un groupe de travail pour aller dans ce sens.

Vous avez omis de citer la loi du 9 décembre 2016 relative à la transparence, à la lutte contre la corruption et à la modernisation de la vie économique (loi Sapin 2) qui avait été adoptée à l'unanimité et qui avait jeté les bases de ce que nous peaufinons aujourd'hui. S'agissant de l'absence d'indicateurs publics, le rapporteur nous dit qu'il faut attendre et voir s'il faut aller plus loin. Je pense que tous les signaux nous disent qu'il faut aller plus loin : le plus tôt sera le mieux, n'attendons pas deux ans car les paysans n'en peuvent plus.

À défaut de réformer la PAC en profondeur, de remettre en cause des traités internationaux et de mettre au point des indicateurs publics fiables, on fait avec les moyens du bord : la loi du 4 août 2008 de modernisation de l'économie (LME) n'a pas été remise en cause, les grands indicateurs n'ont pas été modifiés. Nous avons proposé des leviers de changements internes à la profession : les plans alimentaires territoriaux (PAT), la haute valeur environnementale (HVE), l'agriculture de groupe, les appellations d'origine protégée (AOP), un plan protéines. Sur tous ces sujets, nous avons été trop peu entendus. Les amendements que nous présenterons tout à l'heure visent à rouvrir des pistes d'engagement dans ces différents chapitres.

Soucieux de préserver mes bonnes relations avec notre présidente, j'en viens à ma conclusion… Nous souhaitons vous interpeller sur deux lignes rouges : d'abord, sur le fonds d'indemnisation des victimes de produits phytosanitaires, sujet qui vous tient à coeur et que vous avez traité au Sénat de manière glorieuse, et à l'unanimité. C'est le moment de faire un premier pas, de ne pas reporter le débat ; sur la question du foncier ensuite, mais j'y reviendrai tout à l'heure.

Aucun commentaire n'a encore été formulé sur cette intervention.

Cette législature étant désormais achevée, les commentaires sont désactivés.
Vous pouvez commenter les travaux des nouveaux députés sur le NosDéputés.fr de la législature en cours.