Monsieur le président, madame la ministre, messieurs les rapporteurs, chers collègues, les débats importants se sont tenus au cours de l'examen de la première partie du PLF et de celui du PLFSS ; nous ne reviendrons donc pas ici sur nos désaccords de fond quant au choix que vous assumez et quant à la position que nous-mêmes assumons.
Cinq minutes sont bien entendu insuffisantes pour analyser de façon exhaustive la mission « Outre-mer », aussi me contenterai-je de revenir sur le sens de ce que vous nous proposez.
Le député Philippe Dunoyer, dans son excellent rapport, déclare que « les grandes masses des crédits des outre-mer demeurent globalement inchangées au regard du précédent exercice » et que « [c]'est par le fait de changements de périmètre et de réaffectations de crédits qu'apparaît une hausse comptable ».
J'entends faire ici un effort de clarification, car, à la lecture des documents budgétaires, il est difficile pour nos concitoyens, dont nous sommes les représentants, de comprendre.
Vous vous félicitez de ce que l'enveloppe budgétaire soit en augmentation, mais vous oubliez de préciser que, en rapatriant vers votre mission des dépenses faites par d'autres ministères, vous permettez à ceux-ci de faire des économies au détriment de nos concitoyens ultramarins. Ainsi, vous réintégrez et regroupez dans l'action 04, « Financement de l'économie », des mesures déjà existantes et jusqu'à présent assumées et payées par les ministère des finances et de l'intérieur.
Par ce choix – c'est toute la nouveauté – , vous basculez d'un financement au titre de la solidarité nationale vers un financement exclusivement ultramarin, car payé par la réforme de l'impôt sur le revenu et par la disparition de la TVA NPR. Ainsi, vous faites inopportunément reculer la solidarité nationale puisque, sur le dos des départements d'outre-mer, vous permettez à d'autres ministères d'économiser de l'argent qui leur était dédié. Par conséquent, vous maintenez artificiellement l'enveloppe constante tout en diminuant l'implication budgétaire de certains ministères en faveur des outre-mer. En clair, il n'y a pas d'augmentation de 20 % des crédits de cette mission. Et il me semble que nous suivons là une pente dangereuse, celle du cloisonnement des outre-mer par et pour les outre-mer.
Se pose également la question de la pérennisation de plusieurs mesures – à l'image des 33 millions d'euros de l'action 04, affectés à différents fonds dont l'abondement n'est pas annuel ; seront-ils maintenus l'année prochaine ?
La hausse significative des crédits du FEI n'est pas pour nous le bon choix. En effet, j'ai pu le constater, pour de nombreuses collectivités, ce fonds difficilement mobilisable est capté par ceux qui font preuve de la technicité nécessaire. Il revêt donc un caractère anti-redistributif, accentuant une fois de plus les inégalités à l'intérieur des territoires. Voilà donc encore une occasion manquée de changer de modèle.
Les plans de convergence votés à l'unanimité et prévus par la LEROM – et l'égalité réelle est une promesse, mais surtout une volonté de la représentation nationale – vous permettaient de définir une vision avec et pour les territoires. Or le FEI ne permet que des actions au coup par coup. Ces plans de convergence sont dotés de 23 millions d'euros seulement alors que le FEI, outil centralisé et peu redistributif, augmente de 175 %. Vous nous avez annoncé un financement des contrats de convergence à hauteur de 2,1 milliards d'euros. Vous me permettrez de vous demander où est cette somme : je ne l'ai trouvée nulle part…
Il n'y aura pas de développement économique et de lutte contre le chômage qui vaillent sans remède aux problèmes de logement dans nos territoires. D'abord parce que nous savons que cette activité est créatrice d'emplois ; mais, surtout, parce que, sans logements, les conditions de réussite scolaire pour les enfants les plus défavorisés ne sont pas réunies et, ainsi, leur espoir d'insertion professionnelle et sociale largement obéré. Le logement est la condition de l'épanouissement individuel, familial et de la cohésion sociale. C'est un sujet vital.
Pourtant, votre politique est en net recul sur ce dossier. Vous faites même un choix exclusif et dangereux : vous décidez d'augmenter légèrement les aides aux bailleurs pour la réhabilitation des logements ; c'est un choix que nous désapprouvons. Après une coupe brutale et incompréhensible pour nos concitoyens des allocations logement accession, vous amplifiez, toujours en matière de logement, le recul de l'État. Nous prenons acte de votre intention déclarée de rétablir le dispositif pour les dossiers en souffrance, un an après. Vous nous avez annoncé un nouveau dispositif financé à hauteur de 19 millions d'euros pour l'année prochaine. Nous souhaitons identifier ces crédits de façon précise.
Les crédits pour le logement locatif social et locatif très social baissent. Ce n'est pas mieux pour la lutte contre l'habitat insalubre, pourtant une priorité, dont les crédits diminuent de 10 %. La LBU était, dans la loi de finances pour 2017, d'un montant de 247 millions d'euros alors qu'en 2018 elle a diminué de 21 millions d'euros. L'année dernière, vous nous avez annoncé le versement de la recette de la vente des SIDOM, de l'ordre de 20 millions d'euros. Plus d'un an après, vous nous dites qu'il faudra attendre l'année prochaine. L'aide à la construction aura diminué de 60 millions d'euros dans nos territoires en deux ans, ce qui représente une véritable catastrophe pour les familles qui attendent un toit comme pour les entreprises qui attendent de remplir leur carnet de commande.
Pire encore : cette année, les crédits de paiement ne suivent pas une trajectoire dynamique puisque, d'une année sur l'autre, ils diminuent de 5 millions d'euros. Moins de crédits de paiement, ce sont moins de moyens pour payer les entreprises. C'est à nouveau un signal très peu rassurant pour nos territoires.
Madame la ministre, le groupe socialiste ne votera pas ce budget qui n'est pas en augmentation réelle. Il témoigne en effet, une nouvelle fois, d'une vision stéréotypée…