Intervention de Brigitte Kuster

Séance en hémicycle du mercredi 31 octobre 2018 à 15h00
Projet de loi de finances pour 2019 — Culture

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaBrigitte Kuster, rapporteure pour avis de la commission des affaires culturelles et de l'éducation :

Concernant le patrimoine, le Président de la République veut transformer le château de Villers-Cotterêts en « laboratoire » de la langue française et de la francophonie. Le coût de ce projet très vague est estimé à 110 millions, et les questions que nous vous avons posées en commission n'ont toujours pas trouvé de réponse.

Concernant la future Cité du théâtre, qui s'installera, d'ici à 2022, dans le 17e arrondissement de Paris, les crédits alloués, soit 8,5 millions, ne sont-ils pas trop faibles pour mener à bien le projet dans le calendrier annoncé ?

J'en viens aux crédits du programme « Création », à hauteur de 782 millions, et je souhaite m'arrêter sur le projet de Centre national de la musique, très attendu par les professionnels, dont les crédits annoncés sont introuvables dans le projet de loi de finances. Au total, 20 millions seraient nécessaires à son bon fonctionnement, et certains suggèrent de flécher une partie de la taxe sur les opérateurs de communications électroniques vers cet organisme. Qu'en pensez-vous ?

L'avenir des crédits d'impôt culturels constitue un autre sujet d'inquiétude. Beaucoup s'inquiètent, à juste titre, de les voir sinon disparaître, du moins être rabotés. Si je m'en tiens au crédit d'impôt pour le spectacle vivant musical, on constate que pour 1 euro de dépense fiscale, 2,4 euros entrent dans les caisses de l'État. Dès lors, pourquoi casser ce qui fonctionne ? Et pourquoi, au contraire, ne pas en faire bénéficier également les théâtres ?

S'agissant de la sécurité, la circulaire Collomb contraint les organisateurs de festivals à financer les coûts induits par la présence des forces de l'ordre lors des événements. Je doute que les 2 millions alloués au fonds de sécurisation des sites et événements culturels suffisent à couvrir les surcoûts de sécurité.

Enfin, s'agissant du programme « Transmission des savoirs et démocratisation de la culture », à hauteur de 1 262 millions, les crédits de l'enseignement supérieur baissent de façon significative, y compris les bourses. Motif invoqué : la baisse de la démographie étudiante. C'est difficile à croire, si l'on considère l'explosion des inscriptions dans l'enseignement supérieur ! Cette baisse des crédits résulte à mon avis plus sûrement de la montée en puissance du Pass culture.

Une somme de 34 millions d'euros est allouée à l'expérimentation du Pass par 10 000 jeunes, soit un coût de revient de 3 400 euros par personne ! Combien coûtera donc le dispositif final, une fois déployé auprès de 800 000 jeunes ? Il ne faudrait pas que le Pass culture soit une fausse bonne idée qui se transforme en gouffre financier.

Je termine en évoquant le sujet que j'ai choisi d'étudier dans mon rapport : les stratégies de développement des ressources propres des musées nationaux. Le thème est vaste, et le temps dont je dispose trop court. Aussi insisterai-je surtout sur la nécessité de préserver la loi relative au mécénat, aux associations et aux fondations, dite loi Aillagon. Si certains abus ont pu se produire, ils ne justifient pas la remise en cause d'un dispositif qui fonctionne. Le budget de l'État ne peut plus entretenir seul notre patrimoine historique. Il faut donc nous garder d'adresser aux entreprises mécènes des signaux trop négatifs.

Je ne crois pas, par exemple, que l'instauration d'un plafond de versements ouvrant droit à réduction fiscale soit la bonne solution. D'autres pistes d'amélioration peuvent être étudiées : on peut limiter les contreparties, ou interdire qu'une fondation porte le nom d'une entreprise bénéficiant de l'avantage fiscal, mais aussi faciliter, comme je le propose, l'accès des TPE et des PME au mécénat. J'aimerais, monsieur le ministre, vous entendre à ce sujet.

Pour le reste, je vous invite à lire mon rapport pour avis, où je montre que la plupart des musées nationaux déploient beaucoup d'énergie pour trouver des ressources propres, que ce soit par la billetterie, bien sûr, par le mécénat, que j'ai évoqué il y a un instant, par la location des lieux, mais aussi par des canaux plus novateurs comme le financement participatif ou la valorisation des marques. Un mécanisme d'échange des bonnes pratiques serait d'ailleurs à envisager. Mais dans tous les cas, il est évident que l'accroissement des ressources propres des musées ne doit pas justifier un désengagement de l'État : il doit au contraire leur permettre d'amplifier leur mission de service public.

Je conclurai en indiquant, monsieur le ministre, que la commission des affaires culturelles et de l'éducation est favorable à l'adoption des crédits de la mission « Culture ».

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