Non ! Vous savez aussi bien que moi que les algorithmes des plateformes numériques peuvent nous réduire à néant très vite. Si Facebook décide de donner la priorité aux échanges intrapersonnels et non plus aux médias, nous pouvons disparaître des écrans radar très vite. C'est la raison pour laquelle ce chiffre, s'il mesure notre puissance, ne dépend en fait pas uniquement de nous. Et puis nous devons adapter nos objectifs à nos moyens.
S'agissant du handicap, j'ai en effet oublié d'indiquer que nous avons signé cet important accord à l'unanimité. Il s'agissait d'un enjeu très fort, tout le monde s'est mobilisé dans la maison, et nous avons recruté une personne dédiée. Vous avez cité, monsieur Berta, les cinq axes prioritaires, et personnellement je mettrai les stages en premier, car beaucoup de jeunes, voire de très jeunes, en situation de handicap, viennent faire des stages chez nous. Le recrutement et l'intégration sont importants, mais nous ne trouvons pas nécessairement dans nos métiers de jeunes handicapés formés, y compris comme journalistes. Les personnes qui vivent une situation de handicap, souvent, se taisent, n'osent pas parler. Il y a tout un travail pédagogique à réaliser, par la médecine du travail, les élus du personnel et les directions. Une formation de l'encadrement est aussi nécessaire, car nous pouvons tous, face à un autre moi-même handicapé, faire des bourdes. Il est important de dédramatiser le handicap. Pour cela, nous avons organisé des jeux pour libérer la parole et oser faire des gaffes.
Concernant les jeunes, nous avons, avec la Deutsche Welle, l'idée d'une offre sur les réseaux sociaux multilingues, très participative à destination des jeunes Européens. Une offre qui ne serait pas uniquement destinée à Érasmus – nous venons d'ailleurs de signer un accord avec ce programme – mais à des jeunes qui se sentent isolés, exclus et qui parfois peuvent prendre l'Europe comme bouc émissaire. Nous avons monté un dossier que nous aimerions inscrire dans le Traité de l'Élysée – qui va être revu. Pour le financement de cette offre, nous sommes allées démarcher la Commission européenne. Si elle est très intéressée, elle ne bougera que si nous lui présentons une maquette pilote. Le problème est que, alors que la Deutsche Welle avait financé le pilote du site Infomigrants, elle n'est pas en mesure, cette fois-ci, de dégager des fonds. Elle est en effet mobilisée sur un projet de chaîne turque, auquel elle nous demande d'ailleurs de participer. Nous n'avons pas de rédaction turque, nous lui avons donc donné la liberté de choisir certains de nos programmes qu'elle sous-titrera en turc.
S'agissant de l'Afrique, personnellement, je rêverais de lancer RFI Challenge App Afrique dans le domaine de la santé, de l'éducation et du climat, chaque année. Des incubateurs francophones en Afrique pourraient développer des applis sur ces thèmes et renforcer nos sites, notamment en direction des jeunes. Je pense aussi au sport, qui marche très fort pour les jeunes ; RFI fait un tabac en sport en Afrique.
Concernant notre budget, il est en baisse. Nous sommes contraints budgétairement : tout le monde doit donc être conscient qu'en faisant des choix, il y aura des conséquences en termes de présence et de contenus. Et comme votre commission ne parle pas tous les jours de la bande sahélienne ou de l'est de la RDC, il est important de pouvoir dire que nos choix auront des impacts, notamment si nous nous retirons de certains pays. Je ne me plains surtout pas, je dis juste que nous devrons faire des choix qui auront des conséquences. L'APD serait une bouffée d'oxygène intéressante et cohérente qui nous permettrait d'éviter de mauvaises décisions, notamment quant à notre présence.
Madame Faucillon, il est important de parler des précaires, et il est normal qu'ils aient des inquiétudes, notamment ceux qui sont loin. Mais beaucoup d'infox circulent sur ce sujet. Nous avons réalisé le plus gros effort depuis dix ans pour les précaires, en augmentant très significativement leur barème. Vous connaissez la loi de Tocqueville : au moment où l'on prend une mesure, tout ce qui n'a pas été fait apparaît d'une manière encore plus claire. D'où cette inquiétude. À aucun moment les précaires ne sont visés par les économies. Je n'aime pas le mot « précaires », je préfère dire les non-permanents, car il ne reflète pas leur statut, ils sont traités très équitablement et défendus par les syndicats. Nous avons signé un accord qui révèle que dans les trois prochaines années, 15 % de la masse salariale seront fléchés pour des mesures en leur faveur, en matière d'ajustement des piges, de primes d'ancienneté et de couverture sociale.
Selon la loi, les Français travaillant à l'étranger ont un statut différent de ceux qui cotisent à la sécurité sociale ; nous sommes en train de travailler sur cette question. Nous avons dégagé des sommes pour prendre en charge des cotisations qui sont plus chères pour les Français de l'étranger et nous sommes en discussion avec la Caisse des Français de l'étranger. Nous sommes également en contact avec les élus des Français de l'étranger qui peuvent nous aider à obtenir des statuts moins onéreux pour des journalistes parfois très jeunes, et qui n'ont pas énormément de moyens.
Il n'a jamais autant été fait pour les pigistes et malgré la difficulté de 2019, nous ne toucherons pas à cet engagement qui a été signé unanimement.