Faut-il des aides publiques au commerce extérieur ? Même si je suis un libéral, je pense que c'est nécessaire. Il y a des domaines – comme le développement à l'international mais aussi l'innovation et la recherche – où il faut un accompagnement public, notamment pour les PME et TPE. Les grands groupes n'en ont pas besoin : ils sont internationaux par nature. Quand une entreprise décide d'exporter sur un marché, elle doit engager des recherches d'investissement et des efforts financiers considérables pendant deux ou trois ans. Au passage, j'indique que je me suis beaucoup mêlé de la création du volontariat international en entreprise, un dispositif qui fonctionne très bien.
Nous ne sommes pas très bons en matière de dispositif public d'appui à l'export. Vous avez raison, monsieur Grau, de poser la question des comparaisons européennes précises. Dans le cadre de mes fonctions de rapporteur spécial, je souhaite y travailler au cours de l'année à venir et j'en ai informé les professionnels, qui devraient nous fournir des informations. Quand les entreprises françaises vont exposer dans des salons, elles doivent payer, et il leur en coûtera de plus en plus cher si Business France est obligé d'augmenter ses ressources propres pour compenser la baisse des subventions. Or nos entrepreneurs sont à côté de collègues italiens ou allemands qui, eux, ne payent quasiment rien, outrepassant la règle des 50 % de l'Union européenne, par le biais d'aides provenant des collectivités locales, des filières et autres. Nous devons regarder la réalité.
Pour une entreprise, c'est difficile d'exporter : cela demande du temps et ce n'est pas dans la culture française. On a toujours été sur un marché riche et, quand on avait un problème, on faisait plutôt des livraisons. J'exagère à peine. Tout cela pour dire qu'il faut un dispositif public à la fois bien organisé et pourvu de crédits budgétaires. Quand je vois que le principal outil de soutien aux PME, l'assurance prospection, ne pourra plus être utilisé à partir de la fin mars 2019, faute d'argent, je tire la sonnette d'alarme. D'autres que moi disent qu'il manque 55 millions d'euros, y compris au sein du groupe La République en Marche. Cette impasse budgétaire doit être corrigée.
Il faut construire un vrai projet. Le Premier ministre et le Gouvernement ont impulsé une nouvelle stratégie, la Team France Export. J'en suis heureux et j'espère que le projet ira à son terme parce que je pense qu'il va dans le bon sens. Cependant, il faut avoir les crédits budgétaires correspondants. Comme la subvention publique ne couvre même pas sa masse salariale, Business France est obligé de facturer tout le reste aux entreprises, ce qui nous met en situation de mauvaise concurrence. Nous devons donc être vigilants et avoir des comparaisons internationales – un benchmark – qui nous permette de taper juste et de faire au moins les mêmes efforts d'accompagnement public que nos principaux concurrents.
En réponse à Marc Le Fur, je dirais que nous devons avoir une vision conquérante. Les entreprises françaises se développeront comme l'ont fait leurs concurrentes allemandes : en allant à l'international. Il y a un écart de 300 milliards d'euros entre les balances commerciales française et allemande, en ce qui concerne les échanges de biens. Pour améliorer nos performances, il faut mettre en oeuvre la réforme dont je viens de parler et faire évoluer la culture. La réforme comporte d'ailleurs des mesures sur l'apprentissage de l'anglais, par exemple.
Il faut afficher l'exportation et l'internationalisation de nos entreprises comme une priorité nationale. À cet égard, je déplore pour la deuxième année consécutive qu'il n'y ait pas de ministre en titre, quelles que soient les qualités de Jean-Baptiste Lemoyne et des autres. Quand vous allez sur un marché extérieur, accompagner une délégation de chefs d'entreprise et visiter un salon, vous représentez l'image de la France. Si vous n'êtes pas le ministre du commerce extérieur mais le secrétaire d'État, vous pesez moins que les ministres des pays concurrents. C'est aussi simple que cela. Il y a encore beaucoup à faire en termes d'affirmation politique, au-delà des mesures techniques.
S'agissant des accords internationaux, je suis beaucoup plus optimiste que certains collègues, y compris de ma famille politique. La France doit être ouverte, conquérante. Elle ne doit pas rester sur la défensive. Après un an d'existence, le CETA se révèle extrêmement profitable à nos entreprises, notamment dans le domaine agroalimentaire : les fromages sont à 92 % de leurs quotas alors que la viande bovine canadienne est à 2 % des siens. Il faudra être prudent sur la viande avec le Mercosur, mais je crois que l'on ne peut pas rester sur la défensive.