La part des CDD à l'OFII est un point essentiel : ils représentent 37 % des agents. Le taux de démission était de 8 % en 2015 et il est passé à 20 % en 2017. Il y a donc un sujet extrêmement important concernant les ressources humaines, et en tant que rapporteurs de ces crédits, nous sommes obligés de nous pencher sur ces questions, car il en va de l'efficacité budgétaire. Pour le dire simplement, l'OFII est un peu le formateur officiel de tout le dispositif d'asile dans le pays. Si les agents partent au bout de neuf mois dans d'autres structures, cela ne permet pas d'assurer une bonne pérennité dans la formation et le management, même si des efforts extrêmement importants sont faits – nous avons pu mesurer avec Jean-Noël Barrot l'engagement très fort des équipes sur le terrain. Le projet de loi de réforme de la fonction publique en préparation devrait permettre d'apporter des modifications sur ce sujet, nous y serons très attentifs.
S'agissant de l'aide au développement, vous avez raison de souligner l'action menée pour accroître la part du produit intérieur brut consacré à cette aide. Cela permet évidemment d'avoir des effets à la source. Je soulignerai néanmoins ici un effet paradoxal à propos duquel j'ai débattu avec des chercheurs : l'aide au développement agit parfois avec retard sur la maîtrise des mobilités. En effet, ce ne sont pas les personnes les plus pauvres qui se déplacent, du fait des tarifs pratiqués par les passeurs – plusieurs milliers d'euros, souvent. Cela doit s'inscrire dans une politique de long terme. Il faut mesurer l'aspect quantitatif de l'aide – et la France prend des engagements très forts à cet égard – mais aussi qualitatif, selon la nature des programmes menés. Un ensemble d'actions, avec notamment la mise en place des hotspots et la mission confiée à l'OFPRA, permettront de mieux réguler les flux mais aussi de prévenir les personnes sur place des chances qu'elles ont d'obtenir l'asile dans notre pays ou en Europe, et des conditions du voyage. C'est ainsi que nous pourrons tordre le cou à certains mythes distillés par les filières de passeurs.
Monsieur le président, vous vous interrogez sur un risque de sous-budgétisation. Ce budget est en cours de forte sincérisation. Par le passé, on ne bouclait jamais l'année. Le budget a été augmenté de 26 % en 2017, et de 23 % cette année. Un deuxième effet doit être pris en compte : l'accélération du traitement des demandes d'asile permet de mieux maîtriser les enveloppes budgétaires consacrées au versement de l'aide pour les demandeurs d'asile (ADA), et les pécules complémentaires pour l'hébergement.
Il faut aussi prendre en compte l'effet de la maîtrise des flux migratoires. Aujourd'hui, les arrivées en Europe sont en forte diminution. Le sujet, ce sont les flux secondaires, notamment l'impact, avec un effet retard, de la politique de Mme Merkel. Un grand nombre de demandeurs d'asile est arrivé en Allemagne, mais beaucoup de personnes y ont été déboutées et viennent en France faire une deuxième, ou parfois une troisième demande d'asile. Ce sont aussi ces flux qu'il faut réguler. Nous menons une action conjointement avec les autres pays européens et particulièrement avec l'Allemagne pour avoir des accords consulaires permettant de mieux traiter ces flux.
Oui, le risque de sous-budgétisation existe, mais soyons pragmatiques : l'ADA sera versée. Si l'on venait à dimensionner le programme 303 de manière très forte, au détriment du programme Intégration, les actions d'intégration ne seraient pas lancées alors que l'ADA sera versée y compris si la prévision budgétaire n'est pas totalement juste. Ce ne sera jamais fait au détriment des personnes demandeurs d'asile.