Le projet de loi de finances pour 2018 avait abondé de 616 millions d'euros les crédits de paiement du programme 181, bond financier qui s'expliquait par le rattachement budgétaire de l'ADEME. En tant que rapporteur pour avis, j'avais souligné que si ce rattachement était positif, la vigilance s'imposait. Je suis au regret de constater aujourd'hui que mes craintes étaient fondées : Mme Brulebois souligne dans son rapport que le programme 181 ne doit pas devenir la variable d'ajustement indirect d'une baisse des crédits du programme support.
Les crédits du programme font l'objet, dès la loi de finances initiale, d'une baisse, baisse que vous qualifiez de modérée mais qui pourrait être importante si, en fin d'exercice budgétaire, Bercy imposait des gels voire des surgels. Vous exprimez l'idée que l'ADEME devrait obtenir du Gouvernement la garantie qu'elle ne sera pas concernée par la régulation budgétaire, compte tenu de l'importance de ses missions d'accompagnement de la transition énergétique. Sachez que sur ce point, nous partageons votre position.
Je regrette en revanche que vous abordiez la question de la sécurité et de la sûreté nucléaires de manière aussi rapide. Je souhaiterais d'ailleurs, à cette occasion, revenir sur la commission d'enquête qui nous a mobilisés au début de cette année 2018 : nous regrettons en effet que son rapport n'ait pas évité l'écueil de l'opposition entre pronucléaires et antinucléaires, dans un contexte politique où un large consensus serait nécessaire pour décarboner l'économie. Peut-on sortir en même temps du charbon, du pétrole et du nucléaire ? Au moment où les usages électriques se développent dans le transport ou l'économie numérique, la question reste entière et les objectifs de la loi de transition énergétique toujours aussi irréalistes.
S'agissant du programme 181, j'avais insisté l'an dernier sur la nécessité de contrôler de manière continue les agents travaillant pour les acteurs du nucléaire et leurs sous-traitants, et pas seulement au moment de leur embauche. J'avais également souligné qu'il convenait de remédier à la baisse régulière des moyens de recherche de l'Institut de radioprotection et de sûreté nucléaire (IRSN), dont l'expertise doit demeurer mondialement reconnue. Je tiens donc, une nouvelle fois, à affirmer la nécessité de conforter ces crédits de recherche, qui semblent quelque peu oubliés.
Je tiens enfin à revenir sur la notion de risques émergents, ces risques que vous décrivez comme des risques à part entière mais encore mal identifiés et qui sont donc peu ou mal pris en compte par la législation. Je pense en particulier au risque que représentent les espèces invasives, qu'il s'agisse de la pyrale du buis, du frelon asiatique, de la bactérie Xylella fastidiosa ou du moucheron Drosophila suzukii, à cause duquel nous ne pourrons peut-être bientôt plus manger de fruits frais, pour ne citer que quelques espèces dévastatrices, toutes importées d'Asie. J'avais déjà évoqué ce sujet l'an dernier, mais force est de constater que, depuis, rien n'a changé et que l'action de l'État reste insuffisante. Ma collègue Mme Véronique Louwagie vient d'interpeller le Premier ministre sur le frelon asiatique et je viens d'en faire de même pour la pyrale du buis, dont je recommande le classement en deuxième catégorie du code rural : qu'en pensez-vous ?
Nous resterons donc vigilants sur ces crédits, et j'appelle nos collègues de la majorité à faire de même, pour que la question de ces risques émergents soit enfin traitée, et pour que la fin de l'exercice budgétaire ne se traduise pas par des régularisations trop violentes, qui signifieraient le renoncement à nos ambitions.