En tant que rapporteur pour avis sur les affaires maritimes, j'ai souhaité inscrire mes travaux dans la continuité de ceux que j'avais réalisés lors de la préparation du projet de loi de finances (PLF) pour 2018 en privilégiant les sujets suivants : la déconstruction des navires de plaisance, les exonérations de cotisations sociales patronales au profit de la marine de commerce et la dépollution du transport maritime. Ce dernier thème n'apparaît pas en tant que tel dans mon rapport car c'est notre collègue rapporteur de la commission des finances sur le même budget, M. Saïd Ahamada, qui l'a traité. Sur ce sujet, je me contenterai donc de me féliciter de la création d'une incitation fiscale pour développer les propulsions décarbonées comme le gaz naturel liquéfié, l'hydrogène et la voile, et de remercier le Gouvernement et les services concernés d'y avoir oeuvré.
Avant toute chose, je souhaite vous dire que le niveau global du budget des affaires maritimes me satisfait très largement, puisqu'il est stable en 2019. Le programme 205 intitulé « Affaires maritimes » finance des actions relatives à la politique de sécurité et de sûreté maritimes civiles, la régulation sociale de l'emploi maritime, le soutien à la qualité et au développement du pavillon français, et la participation à la protection de l'environnement marin et littoral.
Les crédits consacrés à l'action 1 relative à la sécurité et à la sûreté maritimes diminuent de 8 % par rapport à 2018 mais leur niveau demeure sensiblement supérieur au montant des crédits accordés chaque année entre 2010 et 2017, puisqu'ils atteignent 29 millions d'euros en 2019 contre moins de 26 millions en 2017. Permettez-moi deux remarques sur cette action. La première a trait à l'importance qu'il y a à conserver des moyens humains à la hauteur des enjeux de sécurité maritime car les effectifs relatifs au programme 205 ont baissé de 10 % depuis 2010 et, cette année encore, le plafond d'emploi subit une réduction de 35 équivalents temps plein travaillé. Ma deuxième remarque concerne le financement de la Société nationale de sauvetage en mer (SNSM) : je me réjouis certes de l'accroissement de l'engagement financier de l'État, qui atteint 6 millions d'euros en 2019, car il faut renouveler en grande partie la flotte des canots tous temps, mais je ne peux que regretter que les affectations de taxes au profit de la SNSM n'aient pas porté leurs fruits. À l'évidence, il faut repenser le financement de la SNSM. C'est un chantier compliqué mais important qu'il nous faut entreprendre en nous appuyant notamment sur les pistes de réflexions tracées par le rapport de Mme Chantal Guittet.
Les crédits dédiés à l'action 3 relative à la flotte de commerce, qui représentent près de la moitié du budget des affaires maritimes, soit 81,2 millions d'euros, restent stables en 2019. Je me félicite en particulier de la pérennisation des exonérations de cotisations sociales patronales pour la marine de commerce mises en place par la loi du 20 juin 2016 pour l'économie bleue, dont le coût est évalué à 14 millions d'euros et qui avaient bien failli être supprimées l'an passé. Je précise également que le projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2019 prévoit une extension de ces exonérations aux navires battant pavillon européen pour des raisons de conformité au droit communautaire. Le maintien de ce dispositif est important pour la compétitivité du transport maritime français et l'emploi dans un contexte de concurrence internationale très forte.
Les crédits de l'action 2 relative aux gens de mer et à l'enseignement maritime sont quasiment stables : 27,3 millions d'euros en 2019 contre 27,8 millions en 2018. La plus grande partie de cette enveloppe est consacrée à l'École nationale supérieure maritime (ENSM). Les lycées professionnels maritimes perçoivent également une subvention. Je reviendrai dans un instant sur la question de l'enseignement.
Quelques mots, enfin, sur l'action 4 relative à l'action interministérielle de la mer : je me réjouis d'autant plus de l'augmentation de près de 3 millions d'euros de son budget qui, en 2019, atteint 12,99 millions d'euros, que cette action a fait l'objet pendant plusieurs années d'annulations et de gels importants, ce qui est regrettable compte tenu des actions essentielles qu'elle finance pour préserver l'environnement marin et la sécurité maritime.
J'en viens aux crédits du programme 203 alloués aux infrastructures portuaires. La plus grande partie d'entre eux finance l'entretien des accès et des ouvrages d'accès des grands ports maritimes – le dragage. En 2019, ils augmentent de 29 millions d'euros par rapport à 2018. Je m'en réjouis car ils n'avaient cessé de baisser jusqu'en 2017, alors que le dragage est l'une des conditions de la survie économique des grands ports français. D'autre part, il faut mettre le paquet, si j'ose dire, sur la transformation environnementale du port du Havre, premier port européen en termes d'accès maritime.
Cette année, j'ai choisi de concentrer mon rapport sur deux sujets : la formation maritime et la mise en place d'une filière de responsabilité élargie du producteur (REP) pour la déconstruction des navires de plaisance.
L'enseignement maritime attire moins les projecteurs que d'autres domaines ; pourtant, ses enjeux sont cruciaux pour rendre à la France sa puissance maritime. Il souffre de plusieurs maux. Tout d'abord, la carte des formations et le réseau des établissements mériteraient d'être revus pour en rationaliser l'organisation et en améliorer l'attractivité. En effet, les métiers de la mer souffrent d'un manque de visibilité qui leur est très préjudiciable pour attirer de nouvelles vocations. Il existe aussi un déficit en matière d'apprentissage : seuls cinq lycées professionnels sur douze le proposent. C'est une démarche qu'il faut pourtant encourager, dans la droite ligne de la loi pour la liberté de choisir son avenir professionnel. Sans doute faut-il aussi améliorer l'organisation de l'apprentissage, notamment pour inciter davantage les professionnels à accueillir des jeunes en formation sur leurs bateaux tout en permettant à ces jeunes de se former aux conditions réelles du métier. Le secteur du mareyage connaît également des difficultés de renouvellement des générations.
Enfin, je suis avec intérêt la réorganisation de l'ENSM, née en 2010 suite au regroupement de quatre écoles nationales de la marine marchande. La Cour des comptes a jugé très sévèrement cette réforme dans un rapport paru cette année. L'avenir de l'école est pourtant primordial pour garantir la compétitivité de notre pavillon et l'emploi français. Il convient donc de remédier au manque d'attractivité de l'ENSM, à son manque d'enseignants permanents et aux dysfonctionnements engendrés par son éclatement sur quatre sites.
Je me suis intéressé à un autre sujet relatif à la formation, bien qu'il n'entre pas dans le champ de mon rapport : la formation continue. Je m'interroge en particulier sur la durée et le coût des formations et des certificats de compétences. Permettent-ils d'attirer des personnes en reconversion et d'améliorer les compétences de celles qui exercent déjà dans ce métier ? On sait combien les métiers de la mer sont difficiles, et l'on n'a ni la même motivation ni les mêmes capacités physiques à vingt ans qu'à cinquante ans. Nous devons parvenir à faire évoluer ces métiers de la mer – je le dis quatre jours avant le départ de la Route du Rhum à laquelle prendront part de grands navigateurs qui peinent parfois à réussir leur reconversion professionnelle, tant la validation des acquis de l'expérience prend un temps fou.
Je conclurai par un mot sur la filière de responsabilité élargie du producteur pour la déconstruction des navires de plaisance, sur laquelle nous sommes plusieurs ici à travailler. Après plusieurs reports successifs, cette filière doit enfin être mise en place en 2019. Elle sera financée par la création d'une écocontribution à l'achat des navires de plaisance et par l'affectation d'une partie du produit du droit annuel de francisation et de navigation (DAFN). Cette REP doit permettre de se débarrasser plus facilement des navires en fin de vie et d'éviter ainsi qu'ils polluent nos paysages littoraux. C'est dans le même esprit qu'a été adopté l'amendement que j'ai défendu pour mieux sanctionner les occupants sans titre du domaine public maritime portuaire.
La répartition du produit du DAFN entre ses différents affectataires est un enjeu connexe : il diminue d'année en année en raison de l'application de différents abattements en fonction de l'âge des navires. Avec le groupe Modem et apparentés, j'ai défendu un amendement au PLF 2019 pour figer ce barème et stopper l'hémorragie en attendant la réforme globale de la taxe qui devrait advenir d'ici un ou deux ans. Cet amendement a également été défendu par des collègues appartenant à plusieurs groupes et je me félicite de son adoption lors de l'examen de la première partie du projet de loi de finances en séance publique.
La REP « plaisance » ne prendra pas en charge les engins de plage ou autres paddles et planches à voile. Ils devraient l'être par la REP « loisirs », en cours d'élaboration conformément à la feuille de route pour l'économie circulaire. Nous serons particulièrement intéressés par l'avancement de ces travaux car ces engins constituent une autre source de pollution qu'il nous faut traiter.
Enfin, je tiens à remercier mon assistant et surtout l'administratrice de notre commission qui m'a aidé à rédiger ce rapport dans des conditions délicates, puisque j'ai été absent quelque temps. Son travail de grande qualité et son souci du détail m'ont été précieux.