Intervention de Agnès Buzyn

Réunion du mercredi 31 octobre 2018 à 16h25
Commission des affaires sociales

Agnès Buzyn, ministre des solidarités et de la santé :

Madame la présidente, monsieur le rapporteur pour avis, mesdames et messieurs les députés, j'ai l'honneur de vous présenter le budget de la deuxième mission dont j'ai la charge avec Sophie Cluzel et Marlène Schiappa : « Solidarité, insertion et égalité des chances ». Je veux souligner d'emblée la cohérence politique de ce budget avec le projet de loi de financement de la sécurité sociale. Ils portent les mêmes choix et les mêmes priorités. C'est la priorité donnée aux plus fragiles afin de répondre de façon spécifique à leurs attentes prioritaires et agir sur les facteurs du déterminisme social ; c'est la priorité donnée aux salariés modestes, pour que le travail paie davantage.

Cette priorité sociale du Gouvernement se lit d'abord dans l'évolution des crédits de la mission, qui augmentent de près de 7 %. C'est considérable, il s'agit là de l'une des évolutions les plus importantes de ce projet de loi de finances.

C'est 1,3 milliard d'euros supplémentaires qui sera consacré en 2019 aux politiques de solidarité.

Ce budget est d'abord celui d'une solidarité renforcée au bénéfice de nos concitoyens les plus fragiles.

Je veux évoquer en premier lieu la stratégie de prévention et de lutte contre la pauvreté, présentée le 13 septembre dernier par le Président de la République. Il s'agit, vous le savez, d'une politique ambitieuse et globale qui vise à éviter que les enfants pauvres d'aujourd'hui ne deviennent les adultes pauvres de demain. J'ai bâti, avec l'ensemble des ministres concernés, une stratégie qui se déploiera dans tous les territoires et qui a pour objectif de renforcer l'accès aux services de la petite enfance, de conforter les droits fondamentaux des enfants, et, pour les jeunes et les adultes, de renforcer l'insertion par l'emploi. Des crédits supplémentaires ont été obtenus pour venir en aide aux plus modestes, éloignés de l'emploi, grâce au renforcement de l'insertion par l'activité économique.

Le programme 304 est le support budgétaire principal de la stratégie. Il porte les crédits dédiés à la contractualisation avec les territoires, à hauteur de 171 millions d'euros en 2019. Ce sont 135 millions d'euros qui seront consacrés à la contractualisation avec les départements, au service des quatre objectifs suivants : l'accompagnement des sortants de l'aide sociale à l'enfance ; le renforcement de l'accompagnement des bénéficiaires du revenu de solidarité active (RSA) ; la formation des travailleurs sociaux ; l'accueil social de proximité.

L'effort de solidarité s'exprime également, en deuxième lieu, à travers l'évolution des crédits du programme 157 « Handicap et dépendance », qui sont portés à 11,9 milliards d'euros, soit 5,1 % d'augmentation entre 2018 et 2019. Cette augmentation très importante traduit la priorité que constitue, pendant le quinquennat, la construction d'une société plus inclusive. Elle permet de concrétiser l'engagement du Président de la République en faveur de la revalorisation de l'allocation aux adultes handicapés (AAH), afin de donner à tous leur juste place dans le projet national et de lutter contre la pauvreté subie des personnes auxquelles leur handicap interdit l'accès au travail ou le limite fortement.

La revalorisation de l'AAH permettra de porter le niveau de l'aide à taux plein à 860 euros dès le mois prochain ; cela représentera une progression de 41 euros par mois. L'allocation verra ensuite son montant porté à 900 euros par mois à la fin de l'année 2019. Il s'agit, globalement, d'un investissement de plus de 2,5 milliards d'euros sur la durée du quinquennat pour améliorer la situation des personnes en situation de handicap.

Parce que le travail conduit à l'émancipation sociale, le soutien à l'insertion professionnelle des travailleurs handicapés est également renforcé, notamment en milieu ordinaire. Un effort est prévu en faveur de l'emploi accompagné – le dispositif combine l'accompagnement médico-social et l'accompagnement professionnel pour les travailleurs handicapés. Les crédits dédiés à ces emplois augmenteront de 40 % par rapport à l'année dernière. Par ailleurs, le budget pour 2019 prévoit la mise en oeuvre de l'engagement national « Cap vers l'entreprise inclusive 2018-2022 », qui va créer 40 000 emplois supplémentaires. Ainsi, les entreprises adaptées bénéficieront d'un soutien accru de 45 millions d'euros, permettant le recrutement de plus de 8 000 personnes, avec notamment de nouvelles formes d'entrée dans l'emploi.

L'effort de solidarité bénéficie également à nos compatriotes d'outre-mer, dans deux territoires confrontés à des difficultés sociales importantes – je veux parler de la Guyane et de Mayotte. Conformément à l'engagement pris par le Président de la République en octobre 2017, l'État reprend en effet à sa charge le financement du RSA dans les deux collectivités à compter du 1er janvier 2019, pour un montant de 170 millions d'euros. Il s'agit de soulager les collectivités du poids du financement et de l'attribution du RSA, sans pour autant remettre en cause leurs compétences en matière d'insertion des bénéficiaires.

Enfin, l'État assume pleinement ses responsabilités concernant les mineurs non accompagnés. À compter de 2019, l'appui aux conseils départementaux pour la mise à l'abri et l'évaluation des personnes se présentant comme mineures sera renforcé, à la fois par le déploiement d'un logiciel d'appui à l'évaluation de la minorité et par une compensation plus juste des dépenses engagées, sur la base d'un forfait pour chaque jeune évalué.

L'État n'en reste pas là s'agissant des mineurs non accompagnés : répondant aux demandes des départements, il soutient ces derniers en prenant également en charge une partie de leurs dépenses supplémentaires au titre de l'aide sociale à l'enfance, lorsque les personnes sont effectivement évaluées comme mineures et doivent être prises en charge dans le cadre du droit commun. Pour la deuxième année consécutive, un dispositif exceptionnel sera mis en oeuvre en 2019.

Plus largement, l'effort engagé dans le cadre de la mise en oeuvre de la stratégie de lutte contre la pauvreté et de la gestion des mineurs non accompagnés traduit la volonté du Gouvernement d'oeuvrer à l'avènement d'une nouvelle contractualisation entre l'État et les conseils départementaux dans la déclinaison des politiques sociales. Je conduirai cette politique aux côtés de Jacqueline Gourault, ministre de la cohésion des territoires et des relations avec les collectivités territoriales.

La mission « Solidarité, insertion et égalité des chances » témoigne également d'un effort sans précédent au bénéfice des salariés les plus modestes. La prime d'activité est une prestation sociale importante, qui incite à l'activité et soutient le pouvoir d'achat des personnes ayant des revenus d'activité modestes. Elle représente plus de 90 euros par mois pour un célibataire au SMIC. Le Président de la République a pris l'engagement, pendant sa campagne, de la revaloriser de 80 euros pour un salarié au SMIC d'ici à la fin du quinquennat. Cette revalorisation s'ajoutera au gain de pouvoir d'achat de 20 euros par mois découlant de la suppression des cotisations sociales maladie et chômage et permettra d'atteindre un gain total de 100 euros pour un salarié au SMIC d'ici à 2022.

Nous avions programmé une augmentation progressive de la prime d'activité entre 2018 et 2021. Nous avons décidé de faire plus fort, d'aller plus vite en 2019 et 2020 : nous souhaitons amplifier plus rapidement les incitations à la reprise d'activité. Ainsi, la prime d'activité pour un salarié au SMIC augmentera de 30 euros supplémentaires dès avril 2019 : ce sera un gain de pouvoir d'achat significatif dans quelques mois pour plusieurs centaines de milliers de ménages. Elle augmentera de 20 euros supplémentaires en avril 2020, puis encore de 20 euros en 2021. Cela représentera ainsi 80 euros supplémentaires au total d'ici à 2021 : 10 euros en 2018 – la revalorisation est intervenue en octobre –, 30 euros en 2019, 20 euros en 2020 et 20 euros en 2021. Les engagements du Président de la République seront donc pleinement respectés.

Pour conclure, permettez-moi d'évoquer les moyens du ministère. Les crédits pour 2019 du programme 124 s'inscrivent dans la continuité de ceux de 2018, prolongeant ainsi un effort marqué d'économie et de rationalisation des moyens. La masse salariale diminuera de 12,4 millions d'euros et le schéma d'emplois de 250 équivalents temps plein travaillés (ETPT). La subvention pour charge de service public versée aux ARS va diminuer de l'ordre de 1 %. Le ministère prend ainsi sa part d'un effort plus global de maîtrise de la dépense et de l'emploi publics. Cette évolution appelle sans aucun doute la révision de ses missions ; ce travail est en cours, sous la supervision de la secrétaire générale du ministère.

Tels sont, madame la présidente, mesdames et messieurs les députés, les principaux axes d'un budget porteur d'une ambition sociale forte pour nos concitoyens.

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