Monsieur le président, mesdames et messieurs les rapporteurs, mesdames et messieurs les députés, en première partie du projet de loi de finances, nous avons eu un débat riche et constructif, quoique parfois polémique, sur les mesures fiscales liées à l'action de mon ministère. Je tiens à saluer le travail et l'implication de la représentation nationale dans ces débats qui nous ont permis d'adopter des avancées importantes en assumant des choix parfois difficiles et en faisant émerger des propositions nouvelles. Cette deuxième partie va nous permettre d'aborder le financement des politiques du ministère de la transition écologique et solidaire, et l'emploi des 34 milliards d'euros de crédits – soit 1 milliard de plus que l'an dernier – dont elles bénéficient.
Je veux tout d'abord dire quelques mots de l'action que conduit le Gouvernement en matière de fiscalité écologique, un sujet sensible qui suscite depuis plusieurs semaines bien des débats en France. Vu les confusions – en tout cas les polémiques – dont il fait l'objet, il est important d'en distinguer les différents aspects. Le premier renvoie au verdissement de la fiscalité, c'est-à-dire à l'utilisation de la fiscalité comme un levier de changement des comportements des Français – ménages et entreprises, consommateurs et investisseurs – et comme un outil de cohérence. Nous souhaitons clairement taxer davantage la pollution et les émissions de gaz à effet de serre. Pendant longtemps, la France était pointée, dans ce domaine, comme un pays en retard au sein de l'Union européenne. En 2016, elle était ainsi classée dix-septième parmi les vingt-huit États membres pour la part de la fiscalité environnementale dans la fiscalité globale. Aujourd'hui, nous progressons, car nous avons décidé et poursuivi avec constance une politique fiscale cohérente avec notre projet de transformation écologique et notre action contre la pollution et pour le climat. Je rappelle que cette augmentation de la fiscalité écologique intervient dans un contexte de baisse substantielle des prélèvements obligatoires dans d'autres domaines, baisse qui atteint 4,2 milliards d'euros pour l'année 2019. C'est l'application concrète du principe selon lequel on taxe plus la pollution et le carbone, et moins le travail des Français.
Le deuxième aspect de la question – un thème sensible – est relatif à l'affectation des recettes de la fiscalité écologique. Nous sommes nombreux à être attachés au principe pollueur-payeur, mais la fiscalité écologique vient contribuer, comme toutes les autres recettes, au financement global des services publics et des investissements de l'État et des collectivités locales – à travers leurs dotations. Rappelons les chiffres : selon l'évaluation du ministère de l'action et des comptes publics, la taxe intérieure de consommation sur les produits énergétique, TICPE – un acronyme qui deviendra célèbre – , rapportera en 2019 à l'État 25,4 milliards d'euros, en comptant la part allouée au compte d'affectation spéciale « Transition énergétique » et à l'Agence de financement des infrastructures de transport de France, AFITF. Même en y ajoutant les redevances de l'eau – 2,1 milliards d'euros – et la taxe générale sur les activités polluantes, TGAP – 700 millions d'euros – , cela ne financerait que 28 milliards sur les 34 milliards d'euros du budget du ministère. Je connais néanmoins la forte attente sinon d'une affectation, du moins d'une augmentation des moyens destinés à accompagner, soutenir et accélérer la transformation écologique ; nous devrons continuer à travailler ensemble sur ce sujet.
La troisième question concerne la mobilisation des leviers fiscaux et budgétaires de l'État pour libérer les Français du pétrole, et plus généralement des énergies fossiles. Il s'agit de nous protéger de manière durable contre la hausse des prix du pétrole sur les marchés mondiaux et contre les effets dévastateurs du dérèglement climatique. Pour y faire face, nous devons favoriser les investissements des Français et de nos entreprises dans des équipements qui économisent l'énergie. Les dispositifs au service de cette politique existent et doivent être consolidés dans le temps ; c'est le sens de l'action que je déploie dans ce projet de loi de finances. Parmi ces dispositifs, qui font partie intégrante de ce budget et représentent plus de 3 milliards d'euros d'aides par an, rappelons le crédit d'impôt pour la transition énergétique, CITE, qui va notamment permettre le remplacement des chaudières à fioul ; le taux réduit de TVA à 5,5 % et l'éco-prêt à taux zéro, PTZ, pour les travaux d'économie d'énergie ; les aides de l'Agence nationale de l'habitat, ANAH ; ou encore la prime à la conversion des véhicules. Le Premier ministre l'a dit ici-même la semaine dernière : cette prime sera reconduite, dans l'objectif d'atteindre 1 million de véhicules d'ici la fin du quinquennat, au lieu des 500 000 initialement prévus. Nous confortons également le bonus écologique pour les véhicules électriques et l'élargissons aux véhicules hybrides rechargeables.
Je veux aussi donner quelques exemples de dépenses prévues dans ce budget. Les récents épisodes dramatiques tels que les inondations dans l'Aude sont venus rappeler l'impérieuse nécessité de poursuivre l'effort en faveur de la prévention des risques. Les crédits du fonds Barnier permettent de mobiliser à cet effet près de 137 millions d'euros en 2019. Le projet de supercalculateur de Météo France bénéficie pour sa part de 5 millions d'euros. La biodiversité fait également l'objet d'une série de dispositions. Le onzième programme des agences de l'eau représente 12,6 milliards d'euros pour les six prochaines années, avec une priorité au financement des mesures en faveur de la biodiversité. La redevance pour pollutions diffuses est également augmentée de 50 millions d'euros, ce qui incitera à réduire l'utilisation des produits phytosanitaires et financera la conversion à l'agriculture biologique. Dans le domaine de l'énergie, 5,4 milliards d'euros sont consacrés en 2019 au soutien aux énergies renouvelables électriques. Ce budget acte également la renégociation réussie des champs d'éolien offshore, qui permettra de réaliser une économie de 15 milliards d'euros sur les vingt années de contrat, et l'augmentation progressive du fonds chaleur qui va atteindre en 2019 300 millions d'euros, soit une augmentation de 50 % par rapport à 2017.
Élisabeth Borne aura l'occasion de détailler les mesures relatives aux transports ; je veux simplement souligner que 300 millions d'euros supplémentaires sont destinés à améliorer l'entretien du réseau routier dès 2019. Enfin, le ministère de la transition écologique et solidaire participe aux efforts de maîtrise des dépenses de fonctionnement. Si le budget d'investissement augmente, celui de fonctionnement est réduit grâce à une baisse des effectifs de 811 emplois. Certaines missions sont néanmoins préservées : celles qui touchent à l'énergie et au climat, ainsi qu'à la prévention des risques et aux autorités administratives indépendantes, notamment à l'Autorité de sûreté nucléaire, ASN.