Monsieur le président, monsieur le ministre d'État, mesdames et messieurs les rapporteurs, chers collègues, mardi dernier, nous nous sommes émus de recevoir le document de politique transversale littéralement cinq minutes avant le début de la séance consacrée aux crédits de la mission « Outre-mer » alors que, comme notre collègue Aubert l'a souligné, c'est ce document, communément appelé DPT, qui nous permet de vérifier la transcription des engagements gouvernementaux, programme par programme, territoire par territoire : un document de plus de 500 pages que nous avons dû découvrir en moins de cinq minutes !
Une semaine plus tard, nous voilà réunis pour débattre des crédits de la mission « Écologie », une des plus importantes de cet exercice budgétaire, et rebelote : le jaune n'a été mis en ligne qu'en début d'après-midi ! Comment pouvons-nous accomplir sereinement notre mission de contrôle de l'action du Gouvernement dans ces conditions ? Avouez que cette attitude n'est pas de nature à renouer le lien de confiance entre la représentation nationale et le Gouvernement. L'exécutif aurait quelque chose à cacher qu'il ne s'y prendrait pas autrement. C'est bien simple, c'est mon sixième projet de loi de finances sur ces bancs et c'est la première fois que nous travaillons dans ces conditions. Je sais votre engagement, monsieur le ministre, et je ne vous mets pas en cause personnellement, mais je vous saurais gré de passer le mot à votre collègue de Bercy : c'est du respect de l'Assemblée nationale et de nos missions dont il est ici question, comme de l'obligation de transparence dans l'exercice de l'action publique.
En ce qui concerne les crédits de la mission, on ne peut que se réjouir de l'augmentation du budget alloué à la transition écologique et solidaire, d'autant que l'ensemble des grandes politiques de votre ministère bénéficieront de cette augmentation.
Cette remarque faite, il faut quand même se rendre à l'évidence : le compte n'y est pas. Les plans que vous proposez pour améliorer la transition énergétique n'utilisent en réalité que très partiellement le surplus attendu du renforcement de la fiscalité sur les produits pétroliers, ce qui va avoir comme conséquence prévisible de jeter des milliers de Français désabusés dans la rue. Pourtant, il y avait un vrai travail de pédagogie à faire auprès de Français qui sont résolument prêts pour cette transition plus que nécessaire.
Il faut dire qu'avec 55 milliards d'euros pour le quinquennat, il y a de quoi faire ! Il est dommage qu'à peine un quart des recettes issues de la TICPE – 37,7 milliards anticipés pour 2019 – servent à financer la conversion écologique : 7,2 milliards d'euros doivent abonder le compte d'affectation spéciale « Transition énergétique », destiné notamment à aider les opérateurs publics de l'électricité à développer les énergies renouvelables, et 1,2 milliard iront à l'AFITF.
Nous recherchons toujours la cohérence entre l'augmentation de la fiscalité écologique et l'autorisation accordée à Total de forer au large des côtes de la Guyane française, territoire déjà gravement menacé par le gigantisme du projet d'exploitation de l'or du consortium « Montagne d'or ». Ce sont 1500 hectares de forêts primaires d'une valeur écologique inestimable et 2000 espèces végétales et animales qui sont menacés. 57 000 tonnes d'explosifs, 46 000 tonnes de cyanure et 195 millions de litres de fioul seront utilisés pour exploiter ce site.
Je voudrais rappeler que l'utilisation du cyanure comporte des risques majeurs, d'ailleurs mis en exergue par la Commission européenne en 2006 et par le Parlement européen en 2016 à l'appui de la demande de vigilance, voire d'interdiction de l'utilisation du cyanure sur les sites d'extraction minière à ciel ouvert adressée aux États membres.
Certains ont également dénoncé un mirage économique, sans parler de l'absence de considération pour l'avis des autorités amérindiennes de Guyane.
Vous conviendrez, monsieur le ministre, que ce n'est pas très reluisant, alors que vous prétendez prendre des mesures pour assurer la transition écologique, de donner ainsi le sentiment de laisser les choses aller à vau-l'eau sur un territoire français parce que les choix de vos prédécesseurs ont manqué de pertinence.
De nombreuses questions demeurent. C'est la raison pour laquelle le groupe GDR demande à voir pour croire. En l'état actuel, il est obligé de se prononcer contre le projet de budget que vous nous soumettez aujourd'hui.