Depuis le début de notre binôme à la présidence de l'Office, nous avons toujours trouvé sans difficulté des points d'accord et des façons de procéder qui nous conviennent parfaitement. Cette fois-ci ne fera pas exception.
Quelques précisions qu'il importe de bien avoir à l'esprit.
En premier lieu, la loi de bioéthique est une matière excessivement sensible, mais aussi excessivement technique. Le projet de rapport qui vous a été communiqué, long, délicat, mérite une vraie attention. Le projet de rapport vous a été diffusé hier, en tout début d'après-midi, dès que cela a été possible. Je sais que nos rapporteurs ont travaillé de façon acharnée pour rendre leur copie à temps. Hier matin encore, à 11 heures, ils se voyaient au Sénat pour de derniers échanges qui ont été, en fait, une longue réunion permettant de passer en revue les derniers arbitrages
En second lieu, j'insiste sur le fait que nous nous situons à deux croisements délicats.
Premier croisement, dans la notion même de loi bioéthique, puiqu'il s'agit presque d'un oxymore. D'un côté, la loi qui définit une norme commune de la société et, de l'autre, l'éthique qui renvoie aux convictions et aux choix personnels. La loi de bioéthique est déjà en soi une espèce d'être un peu singulier, qui traduit bien l'hésitation de la société, lorsqu'elle doit adopter des lois sur des sujets qui nous renvoient à nos convictions personnelles.
Second croisement délicat, dans le point de rencontre entre l'expert et le politique, la science nous apportant des faits autant que possible, des analyses qui doivent toujours éclairer le politique, mais en aucun cas s'imposer à lui. La parole scientifique est très importante pour éclairer des questions délicates, mais ne dispense en rien du travail de conviction, d'éthique, ce que chacun d'entre nous porte en lui sur ces sujets. Je suis entièrement d'accord avec le président Gérard Longuet. Après notre dicussion d'aujourd'hui, il conviendra de nous donner quelques jours de réflexion, afin que chacun, chacune puisse méditer, réfléchir et se dire, en son âme et conscience, voilà où nous en sommes.
Enfin, je rappellerai deux choses. D'une part, l'examen de ce type de rapport par l'Office ne conduit pas à l'adoption du rapport à proprement parler, mais seulement à l'autorisation de sa publication. La version officielle du rapport publié comprendra le compte-rendu de nos réunions et fera clairement apparaître les positions des uns et des autres. Il ne s'agit pas, sur ces sujets, d'imposer une version qui convienne à tout le monde. Chacun doit se faire entendre, s'il y a lieu. D'autre part, je vous rappelle que ce rapport constitue l'une des nombreuses étapes du processus de révision de la loi de bioéthique. L'ont précédé un rapport du Conseil d'État, un débat public, les deux avis du Comité consultatif national d'éthique (CCNE), le rapport de l'Agence de biomédecine. À l'Assemblée nationale, la Conférence des présidents a décidé, au printemps dernier, de constituer une mission d'information sur cette révision des lois de bioéthique. Notre collègue rapporteur, Jean-François Eliaou, est membre du bureau de cette mission d'information. Les auditions sont encore en cours jusqu'au début novembre. Je serai moi-même auditionné par la mission au titre de personnalité impliquée dans les sujets liés à la bioéthique et à l'intelligence artificielle, qui constituent aussi l'un des axes de ces travaux sur la bioéthique.
Au total, nous devons veiller, d'abord, à disposer de tous les éclairages possibles, ensuite, à ne franchir aucune étape à la légère, mais à chaque fois à tout bien peser.