Intervention de Général Philippe Lavigne

Réunion du mercredi 17 octobre 2018 à 18h30
Commission de la défense nationale et des forces armées

Général Philippe Lavigne, chef d'état-major de l'armée de l'air :

C'est une question d'équilibre. Nous avons besoin aussi d'avions de transport performants, de maintien en condition opérationnelle, de radars pour notre posture permanente de sûreté. Nous avons besoin aussi du développement F4 du Rafale et les livraisons du Rafale vont reprendre. Le Mirage 2000D est au sein d'une aviation de combat que nous modernisons : cela inclut la rénovation à mi-vie des Mirage, la livraison des Rafale au cours de la LPM et le développement de ce nouveau standard F4. Tous ces points sont importants pour construire un SCAF « au fil de l'air ». Nous devons donc améliorer notre aviation de combat de manière globale et cohérente. Nous ne pouvons pas tout miser sur le Mirage 2000D.

Monsieur Lejeune, votre question portait sur le stationnement. Le stationnement relève d'une décision ministérielle, qui n'a pas été encore prise. Nous travaillons sur ce point. Par ailleurs, des études sont en cours pour prendre en compte l'arrivée des nouvelles capacités, dont les Rafale, puisque 27 Rafale seront livrés au cours de cette LPM. Le MRTT, le PC-21 et la modernisation de la formation doivent aussi être pris en compte, ainsi que l'ALSR et la CUGE. Tout n'est pas décidé. Nous proposerons les options des plus cohérentes à la ministre, qui tranchera. Le stationnement des nouveaux systèmes de combat de la LPM n'est donc pas encore décidé.

Monsieur Marilossian, concernant le SCAF, le général Lanata et, avant lui, le général Mercier avaient évoqué cette logique de système. C'est par ce système de systèmes que nous pensons contrer la menace, pour saisir toutes les opportunités offertes, surtout pour les milieux dont l'accès nous est dénié. La coopération avec la Grande-Bretagne va perdurer au travers d'études sur des briques technologiques, qui serviront à notre SCAF. Dans l'armement, le grand programme de futur missile de croisière est une pièce essentielle du SCAF. Actuellement, nous coopérons avec l'Allemagne. L'un des points de départ fut la signature entre les chefs d'état-major des deux armées de l'air. Nous sommes en train de proposer l'architecture la plus adéquate pour répondre aux menaces ; s'ajoutera la question de l'architecture industrielle. De plus, l'Espagne a demandé à être observateur. Enfin, les Britanniques ont annoncé l'avion de combat Tempest. Ils sont toujours à nos côtés dans les études du Future Combat Air System Demonstration Program (FCAS-DP) et dans cette aventure des missiles de croisière. Travaillons d'abord sur l'architecture avec l'Allemagne.

Madame Pouzyreff, concernant l'EATC, la mutualisation des MRTT est à l'étude, puisque le MRTT est polyvalent, comme le Rafale. Il ravitaille en vol non seulement la composante nucléaire aéroportée, mais aussi tout le domaine conventionnel. Nous le constatons au Levant et dans la BSS, où nous avons besoin de ce ravitaillement en vol pour des avions qui ne font pas partie de la force aérienne stratégique. Le MRTT est aussi nécessaire pour la posture permanente de sûreté. Quand des avions russes rejoignent nos latitudes après avoir franchi des rayons d'action très importants, nos avions de la posture permanente de sûreté (PPS) décollent. Compte tenu du trajet et du temps de vol, un ravitailleur décolle également. Le MRTT n'est donc pas utilisé que pour les forces aériennes stratégiques. En plus du ravitaillement en vol, nous disposons d'une capacité de transport stratégique, puisqu'il peut transporter jusqu'en 30 tonnes à Niamey en cinq heures de vol. Cette capacité doit donc pouvoir être partagée, évidemment sous certaines conditions, puisque nous avons un contrat lié à la dissuasion et un contrat lié à la PPS. A priori, au moins trois MRTT sur quinze pourraient être inclus dans le programme EATC, or dissuasion, hors OPEX et hors PPS.

Monsieur Jacques, l'armée de l'air et les aviateurs sont naturellement innovants. L'innovation opérationnelle s'incarne dans le centre d'expertise aérienne militaire (CEAM) de Mont-de-Marsan. L'innovation technologique et opérationnelle s'incarne dans le SCAF, dans le commando parachutiste de l'air no 10 (CPA 10) avec les drones, ou dans le centre d'excellence drones de Salon-de-Provence. Nous innovons sur les drones et déposons des brevets. La belle base d'Évreux, qui sera la première smart base, représente l'innovation même au quotidien. Nous n'avons pas de ressources humaines dédiées à l'innovation à ce stade, mais j'ai à mes côtés un responsable de l'innovation. Dans le plan de vol, je souhaite que nous libérions l'énergie de nos aviateurs et qu'ils nous proposent des projets. Je souhaite que nous puissions accompagner des projets locaux. La ministre a fait de l'innovation l'un de ses axes d'effort. L'agence de l'innovation de défense a été créée. Je pourrai l'utiliser pour développer les projets au sein de nos bases aériennes. Cependant nous n'avons pas de ressources humaines dédiées.

Madame Mirallès, comme l'ont rappelé la ministre et le chef d'état-major des armées, le plan « Famille » est un plan vivant. 46 actions ont été imaginées et vingt d'entre elles intéressent plus particulièrement l'armée de l'air. Ce plan est vivant car les nouvelles mesures viennent des bases aériennes, de nos aviateurs et de nos aviatrices. Certaines mesures sont déjà actives. 85 % de la mobilité a été prononcée à cinq mois. Nous avons fait des offres élargies de prestations sociales pendant les absences liées aux missions. L'accès à la propriété a été augmenté. Plus de 56 % des bases aériennes ont le wifi gratuit. En 2019, nous progresserons sur la garde d'enfants. Une cellule d'information des familles est en cours d'expérimentation à Nancy. Un portail e-social sera mis en oeuvre. Sur la base aérienne et la base de défense de Bordeaux, de nombreux partenariats existent et se développent avec les collectivités territoriales – je pense au transport de personnel et aux crèches. Ce plan « Famille » fait partie de cette LPM « à hauteur d'homme », et permet d'attirer et de fidéliser. Un aviateur en mission laisse derrière lui une famille, et il souhaite qu'elle soit bien prise en charge.

Monsieur Larsonneur, votre question portait sur le programme CUGE et l'Euro-MALE. Le premier correspond à un besoin en renseignement stratégique. Avec trois CUGE, notre capacité sera de plus de 50 % par rapport au C-160 Gabriel. L'objectif de la LPM est la livraison de l'un de ces trois CUGE entre 2019 et 2025, et des deux derniers après 2025. Quant à notre capacité à avoir des charges particulières sur l'Euro-MALE, nous développons notre autonomie pour avoir plusieurs charges, notamment les charges utiles de renseignement d'origine électromagnétique (ROEM), qui seront nationales, selon un spectre d'intérêt de communication interceptée. Quant à la capacité à naviguer dans des espaces ségrégués ou non, je pense que l'armée de l'air a développé depuis des années avec la direction générale de l'aviation civile une grande relation de confiance, avec les drones Harfang et les drones Reaper. Par exemple, il y a deux semaines, un drone Reaper a décollé de Cognac pour participer à un exercice en Espagne. Il a franchi la frontière et a guidé des avions pour des tirs air-sol sur un champ de tir, puis est rentré. Nous avons grandement progressé dans ce domaine, et l'Euro-MALE profitera de cette expérience, sachant que notre escadron de drones sera basé à Cognac.

Madame Gipson, la ressource est de 33 % de plus dans la LPM, et de 9 % de plus pour 2019. Il faut que ça vole. Pourquoi ? Pour la préparation opérationnelle. S'ajoutent aussi des questions de sécurité de vol. Nous l'avons constaté sur le Mirage 2000D à Nancy. Nous avons subi un surengagement ces dernières années, et réduit les effectifs. Le maintien en condition opérationnelle était à hauteur de la LPM précédente. Nous avons une dette organique dans la préparation opérationnelle. Nous avons besoin de voler. Nous pourrons voler plus, et donc assurer notre mission de maîtrise de risque et de sécurité aérienne. Nous avons un plan d'action sur les flottes où la disponibilité est la plus faible, le C-130, l'A400M, le Mirage 2000D et le Puma.

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