Intervention de Ian Boucard

Réunion du mardi 6 novembre 2018 à 16h30
Commission des affaires culturelles et de l'éducation

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaIan Boucard :

« Vraiment très brutale » : c'est ainsi, madame la ministre, que vous avez qualifiée, dès votre arrivée, l'annonce de la suppression de 1 600 postes de conseillers techniques sportifs (CTS) d'ici à 2022. Certes, le Gouvernement a fait, en partie, machine arrière. Mais l'épisode résume bien la façon dont le sport et les associations sont traités depuis le début de ce mandat : comme une variable d'ajustement budgétaire.

Dans ce PLF, le budget de la mission « Sport, jeunesse et vie associative » augmente bien de 22,3 % en AE et de 4,1 % en CP. Mais cette hausse est un leurre. Elle résulte en réalité de deux facteurs : la montée en charge du programme 350 « Jeux olympiques et paralympiques 2024 » et la progression des crédits du service civique. De fait, dans la partie « Sport » de ce budget, les financements liés aux Jeux olympiques et paralympiques sont attribués au détriment du sport pour tous.

Je reviens, en premier lieu, sur les CTS. Vous avez, Madame la ministre, garanti qu'aucun d'entre eux ne perdrait son emploi. Mais la porte reste entrouverte pour une révision de leur statut et de leur mode de gestion. Ce sont des fonctionnaires de l'État et, s'ils sont affectés auprès de 79 fédérations, c'est l'État qui les rémunère à 100 %. Ils sont chargés de développer la pratique du sport, et l'objectif fixé est d'augmenter le nombre de licenciés, d'améliorer la formation des éducateurs qui interviennent dans les associations auprès de ces licenciés, qu'il s'agisse de futurs champions ou simplement de gens désireux de pratiquer une activité saine. Les CTS ont également pour mission de détecter et d'accompagner les potentiels sportifs de haut niveau. Près de 400 d'entre eux, dont Teddy Riner, Martin Fourcade, Kevin Mayer et Perrine Laffont, vous ont interpellée dans une lettre ouverte, rappelant que leurs victoires n'étaient pas le fruit du hasard, mais étaient totalement liées à l'engagement et à la passion des cadres techniques sportifs. Il faut conserver le modèle actuel des CTS ! Pouvez-vous nous le garantir ?

En second lieu, j'en viens aux moyens du sport pour tous : ils diminuent de 45 % ! Ceux des fédérations sont stabilisés, mais les associations sportives subissent de plein fouet les conséquences de ce choix du Gouvernement. Depuis le début du mandat, leurs ressources ont déjà été amputées par la suppression de la réserve parlementaire, qui ajoutait 6,7 millions d'euros au programme 219 en 2017. Le FDVA, censé la remplacer, dispose d'une enveloppe restreinte et le fléchage des crédits laisse sceptiques tous les présidents d'associations sportives. En outre, la réduction drastique du nombre d'emplois aidés depuis juin 2017 frappe particulièrement les associations sportives, qui en avaient absolument besoin. S'y ajoute la baisse des dotations aux collectivités territoriales, dès lors dans l'impossibilité de compenser les diminutions de crédits de l'État ou de financer de nouveaux projets. Au total, selon le rapporteur spécial de ce budget au Sénat, le soutien effectif au mouvement sportif a diminué de 8,5 % entre 2017 et 2019. Que comptez-vous faire pour arrêter cette saignée budgétaire qui affaiblit le sport pour tous et pour aider les associations à remplir leurs missions sur nos territoires ?

Je salue, en revanche, le relèvement de 15 millions d'euros du plafond de la taxe « Buffet » affectée au CNDS. Mais rien ne garantit aujourd'hui que ces 15 millions d'euros supplémentaires iront bien au sport pour tous, car c'est le conseil d'administration de la future Agence nationale du sport – dont on ne sait pas encore grand-chose, mais j'ai bien noté que cela va venir – qui en décidera le moment venu.

Les crédits du programme 163 « Jeunesse et vie associative » progressent par rapport à 2018, essentiellement au titre du service civique. C'est là un bon dispositif, formateur et qui véhicule des valeurs républicaines. Pour autant, la cible de 150 000 jeunes était déjà celle que fixait le PLF pour 2018, et 126 000 volontaires seulement ont effectué un service civique au cours de cette année. Il y a donc stabilisation du dispositif après une nette montée en régime. Quelles actions de promotion le Gouvernement entend-il mener pour le redynamiser ? La question se pose également de son articulation avec le service national universel (SNU), qui comprendrait une première phase de cohésion d'une quinzaine de jours et une deuxième période d'engagement volontaire qui se rapproche du service civique actuel. Le SNU n'est pas doté dans le budget pour 2019. En savez-vous plus aujourd'hui ?

Madame la ministre, ce budget ne prévoit pas d'amélioration pour les 307 500 associations sportives françaises qui structurent notre territoire ni pour leurs 3,5 millions de bénévoles qui se dévouent au quotidien, ni pour leurs 16 millions de licenciés. À l'heure où le Gouvernement s'apprête à dépenser entre 2 et 4 milliards d'euros par an pour le SNU au nom du vivre-ensemble, il est bien dommage que vous ayez oublié que le sport est sans doute le dernier lieu dans notre société où les gens de toutes origines sociales se côtoient. Le sport est un vecteur essentiel de transmission de valeurs éducatives aux plus jeunes, il fait la promotion de la méritocratie, du goût de l'effort, de la solidarité et du respect.

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