Une fois n'est pas coutume, je partage la très forte inquiétude de Marie-George Buffet, rapporteure pour avis, ainsi que de Perrine Goulet, rapporteure spéciale de la commission des finances, concernant les crédits du sport dans ce PLF 2019. Comme Marie-George Buffet l'a très bien expliqué dans son rapport, l'enjeu est de savoir si l'État jouera encore un rôle dans la définition d'une politique publique du sport, voire même si un ministère des sports de plein exercice sera maintenu. Ces inquiétudes, partagées sur tous nos bancs, font écho à une mobilisation massive, exceptionnelle, du monde sportif, qui malheureusement n'a pas été entendu ces dernières semaines.
Les crédits du sport sont déjà insuffisants : environ 500 millions d'euros, budget et feu le CNDS compris. Nous sommes très loin du milliard d'euros espéré par Marie-George Buffet pour 2024, objectif que je partage totalement. Les crédits du sport ne doivent pas être une variable d'ajustement pour la maîtrise des dépenses publiques. Or votre feuille de route, madame la ministre, ce n'est malheureusement pas au ministère qu'elle s'établit, pas plus qu'au Parlement : elle est dictée par une instance technocratique, le « Comité Action publique 2022 », et c'est insupportable.
Le PLF 2019 aurait dû être un budget de rattrapage dans la perspective des Jeux de 2024. Ce sera, encore une fois, un budget de renoncement qui fera de l'État un acteur résiduel dans le domaine du sport. Au terme de votre réforme, madame la ministre, le périmètre budgétaire de l'État sera réduit à 100 millions d'euros, pour exercer concrètement un certain nombre de ses missions régaliennes. En deux exercices budgétaires, les crédits du sport baisseront de 55 millions d'euros au lieu de 70 millions initialement, dans la mesure où 15 millions ont été « rendus » par amendement lors de l'examen de la première partie du PLF. Et en 2019, les montants des taxes affectées au financement du sport seront à un niveau historiquement bas, alors que ce sont des ressources extrêmement dynamiques, comme les mises sur les paris sportifs ou la taxe « Buffet ». En 2017, 77 % des taxes affectées allaient au financement du sport, soit 297 millions d'euros sur un produit de 385 millions ; en 2019, c'est 40 % seulement, soit 146 millions sur 364 millions – un montant probablement sous-évalué puisque les ressources sont plus dynamiques que prévu.
Vous nous demandez de nous prononcer à l'aveugle sur l'Agence du sport alors que, comme l'a dit Perrine Goulet, le périmètre et les financements de cette future agence restent très vagues. De plus, une incertitude majeure règne en ce qui concerne le sort des personnels de votre ministère. Selon la circulaire du Premier ministre en date du 24 juillet, les services déconcentrés de proximité dans les directions de la jeunesse, des sports et de la cohésion sociale sont menacés. Le devenir des 1 600 conseillers techniques et sportifs – sur les 2 700 personnels du ministère des sports – demeure dans un flou absolu. Vous avez évoqué au Sénat la possibilité qu'ils soient employés par les fédérations, par les collectivités territoriales, voire rémunérés directement par les athlètes les plus fortunés. Vous avez annoncé un projet de loi sur cette question en 2019, alors que nous attendions un projet de loi Sport et société. Acceptez-vous un moratoire sur le statut des CTS d'ici 2024 ? Et vous engagez-vous à publier le rapport de l'Inspection générale sur les CTS ?