Monsieur le président, madame la rapporteure pour avis, monsieur le ministre, monsieur le secrétaire d'État, chers collègues, la vision de l'enseignement scolaire que vous portez à travers ce budget ne nous étonne guère : elle s'articule autour d'une philosophie élitiste, compétitive et libérale, visant à fabriquer efficacement et dès le plus jeune âge, des gens employables le plus rapidement possible sur le marché du travail, c'est-à-dire de bons exécutants plutôt que des citoyens à part entière.
Dans le premier degré, vous réhabilitez une culture de l'évaluation, en décalage avec les rythmes d'apprentissage des enfants et dénoncée par les syndicats. Des évaluations standardisées et inutiles risquent surtout de mettre les établissements en concurrence et de préparer le terrain à un classement entre établissements scolaires.
Dans le secondaire, l'élitisme et une culture managériale de la réussite guident votre projet éducatif au détriment des valeurs d'épanouissement personnel et de citoyenneté. En effet, si le latin et le grec pourront, ce qui est une bonne chose, rapporter des points au baccalauréat, les autres options comme le sport, le théâtre, la musique, les langues supplémentaires ou le cinéma se trouveront de fait dévalorisées, quand bien même ces options permettent aux futurs bacheliers de découvrir de nouveaux champs du savoir.
Dans cette école de la performance, où l'on nous parle de « stages de réussite » pendant les vacances scolaires, de « campus d'excellence », de « parcours Avenir » et où même le théâtre devient un enseignement d'éloquence, l'employabilité de ces futurs salariés prime sur le reste.
Le budget de l'éducation n'est pas au rendez-vous. En tenant compte de l'inflation et de l'augmentation démographique, la mission « Enseignement scolaire » accuse pour 2019 une baisse de 0,02 %. Dans le secondaire, 2 200 postes de professeurs vont être supprimés dans les collèges et les lycées. Pourtant, au lieu de mener une politique d'austérité, il faut consolider le service public de l'éducation en augmentant le nombre de conseillers principaux d'éducation (CPE) ainsi que le nombre de médecins scolaires, d'infirmiers et de psychologues scolaires capables de déceler les causes des violences – difficultés familiales, maltraitances – et de mener une véritable politique de prévention et d'éducation. Car là est bien le sujet : l'éducation nationale doit être un service public, également accessible à tous et formateur de citoyens accomplis. Mais tandis que les inégalités fiscales se poursuivent avec la transformation du crédit d'impôt pour la compétitivité et l'emploi (CICE) en baisse de cotisations, tandis qu'on manque de volontarisme pour lutter contre l'évasion fiscale, les cantines scolaires ne sont toujours pas gratuites et les AESH, pourtant acteurs majeurs de l'inclusion scolaire, ont des contrats précaires et toujours pas de véritable statut.
Enfin, pour répondre aux enjeux d'avenir comme l'écologie, nous pensons que l'enjeu de l'école de la République est de former des citoyens, et nous réaffirmons que les missions d'intérêt général doivent véritablement être au coeur de nos priorités.