Intervention de Joël Giraud

Réunion du mercredi 7 novembre 2018 à 9h30
Commission des finances, de l'économie générale et du contrôle budgétaire

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaJoël Giraud, rapporteur général :

Effectivement, le sujet mérite débat. Nous avions auditionné le directeur de la législation fiscale sur ce sujet. L'audition n'a pas été de la plus grande clarté – ou alors j'ai une notion de la lumière qui est un peu différente de la sienne...

En déposant des amendements de suppression de l'article 51, vous semblez considérer, chers collègues, que l'exit tax dans sa forme actuelle est un outil efficace pour lutter contre l'évasion fiscale. Pour ma part, je dispose d'un excellent rapport sur l'exil fiscal de Valérie Rabault. Elle y montre que les départs de France n'ont cessé d'augmenter depuis 2011 : le nombre de redevables quittant le territoire est passé de 200 personnes en 2002 à 800 en 2015 – le dernier chiffre connu.

L'exit tax ne permet donc pas de retenir les Français qui veulent partir. C'est, je crois, tout simplement parce que leur principal motif n'est pas forcément la fiscalité : souvent, quand il s'expatrie, un entrepreneur a des projets entrepreneuriaux à l'étranger. Tout le monde n'obéit pas forcément à une logique fiscale : il n'y a pas que des voyous sur la Terre !

S'agissant du rendement de cette taxe, on a découvert qu'il était en fait complètement dérisoire. Cet impôt est inefficace puisque personne ne le paye vraiment. Sur 5,4 milliards de plus-values potentielles, la quasi-totalité de la somme est en sursis d'imposition ; le rendement réel est de plus ou moins 10 millions d'euros par an, et encore... Car, à la fin, il y a des restitutions possibles.

J'entends bien les arguments selon lesquels un impôt qui rapporte peu n'est pas forcément un mauvais impôt, dans la mesure où il permet de lutter contre la fraude fiscale. J'en profite d'ailleurs pour vous remercier, monsieur Coquerel parce que si, souvent, je hurle contre les « amendements des lobbies », ce n'est jamais le cas des vôtres.

Il reste qu'il faut toujours mettre en balance le rendement d'un impôt, ses effets économiques et son efficacité par rapport à l'objectif recherché. En l'espèce, malheureusement, aucun de ces trois objectifs n'est pas atteint.

Considérant qu'il faut un vrai dispositif anti-abus, je vous proposerai de nous caler sur ceux qui existent, plus ou moins, dans l'Union européenne, à des degrés divers. On renforcerait le dispositif proposé à l'article 51, en mettant en place un système beaucoup plus coercitif à partir d'un certain niveau de plus-values latentes. Mieux vaut prévoir un système cohérent au niveau européen et plus efficace.

J'émettrai un avis défavorable sur les amendements de suppression de l'article.

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