La France est une grande nation en matière de recherche comme en matière d'enseignement supérieur. Tenir notre rang dans la compétition internationale, jouer un rôle déterminant dans l'élucidation des grandes questions scientifiques, favoriser l'innovation, mieux former et mieux diplômer nos étudiants sont les éléments fondamentaux de mon engagement en tant que ministre.
Le budget 2019 de la mission interministérielle « Recherche et enseignement supérieur » (MIRES) est la traduction immédiate de cette ambition.
Hors remboursement des intérêts de la dette, la MIRES est l'un des trois postes de dépenses et d'investissements les plus importants du budget général avec les missions « Défense » et « Enseignement scolaire ». Composée de neuf programmes, la MIRES s'inscrit, par sa structure même, dans un périmètre interministériel dont le ministère de l'Enseignement supérieur, de la recherche et de l'innovation, que je représente, est le principal maître d'oeuvre.
La MIRES finance ainsi plus de la moitié des opérateurs de l'État. Ces opérateurs, ce sont bien évidemment les 73 universités et les centaines d'écoles qui structurent et animent notre territoire national dans l'Hexagone comme dans les territoires ultra-marins. Il y a également nos organismes de recherche qui comptent parmi les plus importants du continent européen et sont des acteurs incontournables de la recherche à l'échelle mondiale. Je songe bien évidemment au Centre national de la recherche scientifique (CNRS), au Commissariat à l'énergie atomique et aux énergies alternatives (CEA), à l'Institut français de recherche pour l'exploitation de la mer (IFREMER), ou encore à l'Institut national de la santé et de la recherche médicale (INSERM).
La MIRES est une mission fondamentalement tournée vers la préparation de notre avenir commun. C'est le cas aussi bien au travers du financement de l'enseignement supérieur que de la recherche et de l'innovation. Il s'agit d'une priorité stratégique du Gouvernement. C'est pourquoi le budget que j'ai l'honneur de vous présenter a vu ses crédits augmenter de 5,3 % en deux ans, soit 1,3 milliard d'euros, dans un contexte financier que chacun connaît.
En 2019, le budget du ministère de l'enseignement supérieur, de la recherche et de l'innovation (MESRI) atteindra, si le Parlement l'y autorise, près de 25,1 milliards d'euros, soit une progression de 549 millions d'euros par rapport au budget 2018, qui avait reçu les suffrages du Sénat le 7 décembre dernier. Sur le périmètre de l'ensemble de la mission, la hausse est également significative et s'établit à 500 millions d'euros au total.
Chaque programme piloté directement par mon ministère bénéficiera ainsi en 2019 de l'effort collectif consenti par la Nation en vue de la préparation de notre avenir. Le programme 150, dédié à l'enseignement supérieur, sera crédité de 13,6 milliards d'euros, soit une hausse de 166 millions d'euros. Le programme 231, consacré à la vie étudiante, notamment au paiement des aides directes ou indirectes à destination des étudiants qui en ont le plus besoin, disposera de 2,7 milliards d'euros, soit un montant en hausse de 7 millions d'euros. Il faut aussi mentionner l'effet positif de la suppression de la cotisation de 217 euros au régime de sécurité sociale des étudiants et le financement de la vie étudiante via la contribution de vie étudiante et de campus (CVEC).
La recherche est tout aussi prioritaire. Le programme 172 disposera d'une hausse de 171 millions d'euros pour s'établir à 6,9 milliards d'euros. De même, en matière spatiale, le programme 193 sera doté de 1,8 milliard d'euros, disposant ainsi de 205 millions d'euros supplémentaires.
L'objectif affiché dans la loi de programmation des finances publiques d'une MIRES dépassant les 28 milliards d'euros à l'horizon 2020 est pour l'heure respecté. À côté de cela, il convient de prendre en considération le financement du programme d'investissements d'avenir (PIA), mais également les investissements conséquents des collectivités territoriales et des entreprises en faveur de l'enseignement supérieur, de la recherche et de l'innovation. On n'a jamais autant investi pour notre avenir qu'en ce moment. C'est une vérité qu'il est nécessaire de rappeler.
Derrière les chiffres et ces masses financières considérables, il y a des enjeux et des chantiers qui occuperont mon ministère dans les prochains mois.
En matière d'enseignement supérieur, l'année 2019 sera celle de la montée en puissance du plan « Étudiants ». Un peu plus de 123 millions d'euros seront consacrés, au sein du programme 150, au financement des parcours personnalisés de réussite et aux mesures indemnitaires permettant de soutenir et de valoriser l'engagement de tous les personnels dans la mise en oeuvre de la nouvelle procédure nationale de préinscription comme dans l'innovation pédagogique.
À cet égard, le PIA continuera à soutenir la rénovation des cursus universitaires par le déploiement du nouvel appel à projets dédié aux nouveaux cursus à l'université (NCU). Ce dispositif, conjugué aux dispositions de la loi du 8 mars 2018 relative à l'orientation et à la réussite des étudiants, sera amplifié par la mise en oeuvre du nouvel arrêté de licence publié en juillet dernier. Il s'agit de rénover tant le format que le contenu des enseignements de premier cycle afin de permettre à chaque étudiant de construire son parcours avec des passerelles et des spécialisations progressives.
La réforme des études de santé, à travers la suppression du numerus clausus dès 2020, s'inscrira bien évidemment dans cette démarche. Il s'agira, à travers la disparition de la première année commune aux études de santé (PACES) dans son format actuel, d'ouvrir la voie des études médicales et paramédicales à des profils d'étudiants plus diversifiés, tout en garantissant l'exigence des formations. Une concertation est en cours. Nous travaillons à ce chantier avec Agnès Buzyn, ministre des solidarités et de la santé, en vue de proposer au Parlement un train de mesures législatives à l'horizon du premier semestre 2019.
L'année 2019 permettra également d'aller plus loin dans l'autonomie des universités. Avant la fin de cette année, nous publierons l'ordonnance relative aux regroupements expérimentaux, en application de la loi du 10 août 2018 pour un État au service d'une société de confiance afin de replacer nos universités au coeur de politiques de sites fortes, articulées autour des spécificités territoriales, et de leur donner la visibilité internationale qu'elles méritent. Avec cette ordonnance, chaque université qui le souhaitera pourra développer son projet et sa signature personnelle, au-delà de sa mission de service public réaffirmée.
J'expérimente aussi depuis la rentrée un dialogue stratégique de gestion avec neuf universités, afin de d'échanger directement avec elles sur leurs projets, leurs besoins et leurs visions. Ce dialogue a vocation à être élargi à l'ensemble des universités dans les meilleurs délais. Je crois fondamentalement que c'est dans l'échange direct entre le ministre et les chefs d'établissement que nous élaborerons des projets universitaires répondant aux enjeux propres à la vie de chaque établissement. L'enjeu de leur signature, c'est de leur permettre de rayonner dans leur environnement local mais aussi international.
L'enjeu territorial que représente l'offre de formation est également essentiel. C'est pourquoi nous avons aussi travaillé, pour l'année 2019, à l'expérimentation de déploiements d'offres de formation de proximité avec quatre régions : Île-de-France, Occitanie, Bretagne et Grand-Est.
Le patrimoine immobilier est également un outil incontournable pour ancrer les universités dans leur territoire. Nous avons élargi l'an dernier le principe de spécialité à l'occasion de la loi de finances pour 2018. Nous irons plus loin cette année avec une deuxième vague de dévolutions, en cours de finalisation pour les universités de Bordeaux, Marseille, Caen et Tours, et, en 2019, avec une vague continue de dévolutions afin de permettre à chaque établissement de saisir les opportunités liées à la valorisation de son patrimoine d'ici à la fin de l'année 2022.
L'année 2019 sera également déterminante en matière de vie étudiante.
Pour la première fois, nous avons réduit, de façon significative, le coût de la rentrée universitaire par la suppression de la cotisation de 217 euros au régime de la sécurité sociale des étudiants et par la mise en place du paiement à date des bourses.
Pour la première fois cette année, les centres régionaux des oeuvres universitaires et scolaires (CROUS) ont collecté la contribution de vie étudiante et de campus (CVEC), qui permettra aux établissements d'enseignement supérieur de proposer aux étudiants de nouvelles prestations autour de la santé, du bien-être, mais aussi des prestations sportives et culturelles, tout en leur assurant un meilleur accueil. À cette date, le produit consolidé de la collecte 2018-2019 n'est pas connu mais je tiens à vous rassurer – cela a d'ailleurs été dit à plusieurs reprises : ce qui a été versé pour la vie étudiante financera la vie étudiante. Le plafond prévisionnel pour la rentrée 2019-2020 a été fixé, en loi de finances, à 95 millions d'euros, sur le fondement des prévisions réalisées au printemps dernier. Le produit de la CVEC ira bien à la vie étudiante. C'est pourquoi ce plafond sera révisé l'année prochaine selon le montant qui sera effectivement perçu par les écoles et les universités.
Financer la recherche et donner à nos chercheurs les moyens de leurs ambitions scientifiques est un axe prioritaire de ce budget 2019.
Le budget de la recherche augmentera de 2,5 % cette année, soit une hausse de près de 8 % en deux ans. Cet effort souligne le caractère stratégique de la recherche pour notre pays, qui demeure aujourd'hui encore une grande nation scientifique. La récente attribution du prix Nobel de physique à Gérard Mourou nous le rappelle, tout comme la réussite du centième lancement du programme Ariane 5.
Toutefois, nous faisons face à une concurrence intense liée aussi bien aux performances des États-Unis, du Royaume-Uni ou de l'Allemagne qu'à l'arrivée de nouveaux acteurs internationaux de la recherche – je songe bien évidemment à l'Inde et à la Chine.
Afin de faire face à ces défis internationaux, mes priorités en matière de recherche sont simples : continuer à soutenir la recherche fondamentale ; mobiliser les forces scientifiques pour répondre aux grands défis sociétaux et renforcer les partenariats entre universités et organismes de recherche.
Pour mettre en oeuvre ces principes, nous renforcerons les écosystèmes territoriaux organisés autour des universités développant leur signature en matière de recherche et d'innovation, en impliquant les organismes par le biais des unités mixtes de recherche.
Il est aussi indispensable de renforcer les missions nationales des organismes de recherche en leur confiant des programmes prioritaires de recherche, à l'instar du programme pour l'intelligence artificielle, piloté par l'Institut national de recherche en informatique et automatique (Inria), et de celui pour le climat, piloté par le CNRS. Cela se fera en encourageant l'excellence scientifique de demain. C'est pourquoi 300 nouveaux doctorants seront recrutés par le CNRS d'ici à 2020, afin de renforcer les laboratoires de recherche conjoints entre le CNRS et les universités.
Dans cette compétition mondiale qui tend plus que jamais à faire de la recherche un enjeu de souveraineté, j'ai la conviction qu'il ne faut pas opposer le financement sur projet au financement dit « de base ». Il faut faire les deux, et il faut le faire au bon niveau.
C'est pourquoi, afin de faciliter le travail des chercheurs au quotidien, j'ai décidé de reconduire en 2019 le financement direct « de base » aux laboratoires à hauteur de 25 millions d'euros. La rémunération des personnels des organismes bénéficiera également d'une revalorisation de 28 millions d'euros dans le cadre du protocole « parcours professionnels, carrières et rémunérations » (PPCR).
S'agissant du financement sur projet, le budget de l'Agence nationale de la recherche (ANR) est augmenté de 33 millions d'euros en autorisations d'engagement (AE), soit 65 millions d'euros en deux ans. Cela correspond à un engagement ferme en termes de crédits de paiement : 86 millions d'euros en 2019, soit 220 millions d'euros supplémentaires en deux ans. C'est bien la preuve que cette dynamique se poursuit dans la durée.
Au-delà de l'ANR, le ministère soutient les initiatives vertueuses permettant d'associer le meilleur de l'initiative privée et de la recherche publique. C'est pourquoi nous poursuivrons aussi, en 2019, l'effort de 5 millions d'euros au profit des instituts Carnot, qui sont plus que jamais les leviers du rapprochement entre la recherche et l'industrie.
Après avoir régularisé la situation de la France auprès des organisations scientifiques internationales à hauteur de 300 millions d'euros en 2018, dont plus de 170 millions d'euros hors secteur spatial, mon ministère restera en 2019 pleinement engagé dans le financement des organisations scientifiques internationales comme des très grandes infrastructures de recherche (TGIR). Les crédits dédiés seront en 2019 en hausse de 23 millions d'euros. Ce sont des choix lourds, exigeants mais fondamentaux pour repousser la frontière de la connaissance.
Afin de relever le défi des grandes questions scientifiques et technologiques particulièrement structurantes pour notre avenir, telle que l'intelligence artificielle, près de 29 millions d'euros, issus de la MIRES et du PIA, financeront le volet « recherche » sur l'intelligence artificielle en 2019. Ces financements monteront en puissance année après année.
Vous le savez, notre pays et l'Europe ont construit au fil des années un secteur spatial parmi les plus avancés au monde. À la clé, des enjeux technologiques, industriels, scientifiques et de souveraineté qui profitent aujourd'hui de l'émulation issue de l'arrivée de nouveaux acteurs dans ce domaine, comme l'américain Space X. Afin de répondre à cette nouvelle donne, de finaliser le programme Ariane 6 tout en préparant l'avenir, un effort significatif sera consenti en 2019 en faveur du programme 193 dont le budget progressera de 13 % pour atteindre 1,8 milliard d'euros.
Enfin, notre recherche est indéfectiblement liée aux enjeux de santé. Afin de répondre aux enjeux sanitaires, cliniques et épidémiologiques des pathologies qui frappent nos concitoyens, le ministère déploiera en gestion 17 millions d'euros pour consolider le financement des plans santé qui sont principalement pilotés par l'INSERM.
Parce que la recherche n'est plus simplement la solution d'une équation financière mais avant toute chose une entreprise fondamentalement humaine, nous avons travaillé, depuis le printemps dernier, à consolider le statut des chercheurs afin de mieux valoriser leurs compétences sur le marché du travail et de resserrer leurs liens avec les entreprises et l'innovation. Dans cet esprit, nous avons obtenu, en mars dernier, l'inscription du doctorat au répertoire national des certifications professionnelles. Également dans cette logique, nous avons souhaité, avec Bruno Le Maire, ministre de l'économie et des finances, rénover le statut du chercheur-entrepreneur issu de la loi du 12 juillet 1999 sur l'innovation et la recherche, dite « loi Allègre », dans le cadre de l'article 41 du projet de loi relatif à la croissance et à la transformation des entreprises (PACTE).
Un dernier mot s'agissant du rayonnement international de la politique conduite par mon ministère. Sur ce sujet, vous le savez, l'Europe joue un rôle fondamental. C'est à la fois le lieu géographique naturel de la coopération scientifique et universitaire et celui dans lequel se dessinent l'université et la recherche de demain.
Imaginer l'université de demain à l'échelle de l'Europe, c'est répondre à la fois à des objectifs d'attractivité de nos universités dans la compétition mondiale et d'excellence scientifique. Pour y parvenir, nous devons projeter nos politiques et nos pratiques à l'échelle européenne, dans le cadre de la préparation du programme « Horizon Europe ». Premier programme mondial en matière de recherche, il revêt une importance particulière dans le contexte européen que nous connaissons tous. À l'heure actuelle, les acteurs français ne s'investissent pas suffisamment dans les programmes européens. J'ai engagé un chantier à ce sujet pour y remédier dans les prochains mois.
Imaginer l'université de demain à l'échelle de l'Europe, c'est aussi renforcer l'identité européenne de la jeunesse par une université inclusive en donnant à chaque jeune l'opportunité de construire son avenir, non seulement à l'échelle de son propre pays mais aussi à l'échelle du continent. À ce propos, je me félicite du lancement par la Commission européenne de l'appel à projets « Universités européennes ». C'était une volonté du Président de la République dans son discours de la Sorbonne du 26 septembre 2017, c'est également un jalon indispensable pour affirmer clairement que notre avenir commun n'est pas concevable en dehors de l'Europe. Cet appel à propositions de 30 millions d'euros pour six projets pilotes permettra de regrouper des établissements français et européens d'au moins trois pays, afin de bâtir les premiers projets pilotes d'universités européennes sous forme de réseaux fondés sur un très fort niveau d'intégration en matière de cursus, de diplômes, de recherche, d'innovation, mais aussi d'échanges humains. Tous les établissements français sont invités à faire acte de candidature. Nous verrons les premières universités européennes émerger à la rentrée 2019. La France apportera son soutien à la constitution de ces projets à hauteur d'au moins 100 millions d'euros sur dix ans.
Un dernier mot s'agissant de la fin de gestion de l'exécution du budget 2018.
Le projet de loi de finances rectificative (PLFR) présenté ce matin en conseil des ministres procède, comme chaque année, à des ajustements, dans une logique de bonne gestion publique et de maîtrise du déficit. Cette année, nous avons décidé de ne pas procéder par décrets d'avance. Dans ce cadre, le ministère de l'enseignement supérieur, de la recherche et de l'innovation voit ses crédits disponibles augmenter de 110,8 millions d'euros, au profit de l'enseignement supérieur, de la recherche et de la vie étudiante. Ce schéma permettra au ministère de financer l'ensemble des dépenses prévues pour la fin 2018. Le reste des crédits mis en réserve, qui représentent un total d'un peu plus de 200 millions d'euros, sera annulé en toute fin d'année.
Tels sont, en quelques mots, les axes prioritaires qui seront poursuivis avec ce budget pour 2019 aujourd'hui soumis à votre examen. Je me tiens bien entendu à votre disposition pour répondre à l'ensemble de vos questions.