Notre justice fait face depuis trop longtemps à de sérieuses difficultés : juridictions sous-dotées et encombrées, vacances de poste, délais de traitement excessifs, surpopulation carcérale, personnel pénitentiaire sursollicité… la liste est encore longue.
Les raisons de ces difficultés sont en grande partie d'ordre budgétaire. Depuis des décennies, les crédits de la mission « Justice » sont insuffisants, et il faut bien admettre que la comparaison avec nos voisins européens n'est, sur ce plan, pas glorieuse, en particulier pour ce qui concerne les crédits alloués aux juridictions.
Néanmoins, nous observons que des efforts ont été engagés depuis quelques années, et la majorité actuelle s'inscrit pleinement dans cette dynamique. Le projet de loi que nous allons examiner fixe noir sur blanc, dans sa partie programmation, l'augmentation des moyens de la justice, de manière continue sur toute la période du quinquennat, trajectoire qui permettra, je l'espère, de faire les choix pertinents.
Les efforts budgétaires sont donc là. Certains les trouveront sans doute encore insuffisants – et ils n'auront peut-être pas complètement tort, eu égard à la situation dont nous héritons –, mais le budget global est contraint. Nous nous sommes en effet engagés à maîtriser les dépenses publiques et c'est un cap qu'il nous faut tenir.
Cependant, la justice n'a pas uniquement besoin de crédits supplémentaires. D'où l'intérêt de la seconde partie de ce projet de loi, qui propose une véritable réforme : en effet, en permettant aux juges de recentrer leur office, en simplifiant les procédures, en améliorant la dématérialisation, nous donnerons à tous les acteurs de la chaîne judiciaire les moyens d'optimiser leur travail. Cela bénéficiera aux justiciables, qui seront mieux informés et pourront constater une accélération du temps de traitement de leurs dossiers.
Le texte que nous allons examiner a été assez largement modifié en première lecture par le Sénat, qui nous propose des apports intéressants – je pense en particulier aux précisions concernant les plateformes en ligne ou à la suppression de la vidéo-audience. Nous avons néanmoins des points de désaccord profonds avec la version adoptée par le Sénat, souvent trop frileux concernant la déjudiciarisation de certains actes et, plus globalement, sur la problématique pénale.
Sachez donc, madame la ministre, que, si le groupe Modem était très largement en accord avec la version initiale du projet de loi, nous restons vigilants sur plusieurs points : ainsi, nous sommes, par principe, opposés au développement de la vidéo-audience, nous souhaitons veiller à la place de la victime dans le procès pénal, nous nous interrogeons sur les nouvelles missions confiées aux caisses d'allocations familiales ou encore sur l'extension de la procédure d'amende forfaitaire délictuelle. Nous espérons que l'examen en commission permettra d'éclaircir la plupart de ces questions.
Enfin, nous tenions à souligner que le Sénat avait soulevé des questions importantes mais qui, à nos yeux, n'ont pas vocation à être traitées dans ce texte, déjà fort dense. C'est le cas notamment des articles concernant la justice commerciale et l'aide juridictionnelle. Pouvez-nous nous indiquer si ces questions seront traitées dans les textes à venir et, si oui, dans quels délais ?