En réponse à Mme Moutchou, je voudrais souligner que la pré-plainte en ligne existe déjà, grâce à un système de plateforme : c'est, en réalité, une orientation qui permet de faciliter la démarche de la victime. Nous voulons aller un cran plus loin dans le cadre de ce texte en consacrant la possibilité de déposer plainte en ligne. L'intérêt est de donner une valeur juridique à l'acte effectué en ligne si la personne le souhaite et d'enclencher l'ensemble du dispositif. Nous serons évidemment très attentifs à ce que toutes les plaintes puissent continuer à être déposées physiquement. C'est une obligation prévue par le code pénal, et il n'y a aucune discussion sur ce point : nous souhaitons simplement développer un outil de plus. Nous voulons aussi mettre en oeuvre des moyens supplémentaires. La création de la plateforme relève du ministère de l'intérieur, avec lequel nous travaillons, mais cela nécessite également le renforcement des parquets là où il y aura une implantation de la plateforme. Nous y veillerons.
Vous m'avez interrogée, monsieur Viala, sur la période transitoire entre aujourd'hui et le moment où les 15 000 nouvelles places de prison seront livrées. Cette période transitoire a déjà commencé. La livraison des places de prison s'effectuera de façon graduée et d'autant plus aisée que, sur votre proposition d'une certaine manière, nous allons construire des établissements de nature différenciée. Ainsi, comme nous souhaitons développer les structures d'accompagnement vers la sortie, un certain nombre d'établissements ne seront pas hautement sécurisés et pourront être livrés plus rapidement. À cela s'ajoutent des rénovations importantes, pour lesquelles nous aurons en 2019 une enveloppe de plus de 100 millions d'euros, ainsi que la nouvelle politique des peines. La conjonction de ces trois éléments me permettra de traiter la période transitoire. L'échéance n'est pas le mois prochain, bien sûr. Nous devrions cependant arriver à diminuer le nombre de personnes détenues dans une même cellule dans les quatre ans à venir.
En ce qui concerne les outils nécessaires à la numérisation, je ne vous dis pas non plus qu'on rasera gratis demain matin. Mais j'ai installé une gouvernance de la numérisation de notre système judiciaire, ce qui me permet d'avoir aujourd'hui un calendrier dont j'aurai l'occasion de vous présenter plus tard les principaux éléments. Les trois ou quatre prochaines années seront scandées par des étapes très précises. Je ne compte pas que la plateforme de numérisation pénale « native », qui permettra d'aller du dépôt de plainte jusqu'au bureau du juge, soit totalement disponible avant 2021, mais il y aura des étapes dans sa mise en place.
Je reviendrai plus tard, dans le cours de nos travaux, sur votre question relative à la médiation.
En ce qui concerne la représentation obligatoire en appel dans les contentieux liés à la sécurité sociale, je voudrais souligner qu'il ne s'agit pas de rejouer le jugement de première instance ou de faire un match retour. On peut donc considérer que les obligations ne sont pas les mêmes. Néanmoins, je suis bien consciente de la nécessité d'être très vigilant, et je pourrai, là aussi, vous répondre plus en détail dans la suite de nos travaux.
Les mandataires judiciaires à la protection des majeurs se verront confier des responsabilités nouvelles, qui sont jusque-là réservées aux juges. Il me semble qu'il serait prématuré, monsieur Matras, d'envisager la création d'un ordre, mais on doit en effet aider cette profession à se structurer, à mieux se former et pourquoi pas à organiser ses propres modalités de contrôle interne. Nous pourrions y réfléchir dans les mois qui viennent, à la faveur de la mission sur les majeurs protégés qui a été confiée à Mme Abadie et M. Pradié.
S'agissant de la procédure pénale numérique, qui est un projet lancé avec le ministère de l'intérieur, et de la question de l'interopérabilité, des pilotes de confiance seront proposés dès 2019 dans un certain nombre de juridictions. Nous garderons CASSIOPEE, qui sera interconnecté, et le déploiement commencera en 2019 au niveau de l'appel.
J'ai répondu à votre question, monsieur Gosselin, sur la transition pénitentiaire. Les 7 000 places ne sont pas de « la poudre aux yeux ». Nous allons livrer, je l'ai dit, des établissements différenciés et nous nous sommes engagés à créer 15 000 places supplémentaires par rapport à la situation que nous avons trouvée en arrivant aux responsabilités. Il y aura des livraisons progressives et le développement des établissements que je viens d'évoquer.
Je ne reprendrai pas l'expression de « laissés-pour-compte » : je considère que ce ne sera le cas de personne. Je me suis rendue dans un petit tribunal d'instance à Flers, dans l'Orne, qui est une région rurale. J'ai pu y dialoguer avec des magistrats et des personnels du greffe qui accueillent les personnes – il y a dans ce tribunal un service d'accueil unique du justiciable. On voit réellement le besoin qui existe et sa satisfaction grâce à des personnels formés, qui ne réalisent pas seulement un accueil sur le plan judiciaire, au sens strict du terme, mais c'est important de le faire aussi.