Intervention de Fabien Roussel

Séance en hémicycle du lundi 12 novembre 2018 à 16h00
Projet de loi de finances rectificative pour 2018 — Discussion générale

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaFabien Roussel :

À mon avis, vous pouvez attendre longtemps.

Vous allez nous dire qu'il faut attendre, qu'il faut vous faire confiance, que les choses avancent aussi en Europe. Sauf qu'au rythme auquel elles avancent, nous y serons encore dans un siècle, surtout sachant que l'unanimité est de mise en Europe pour régler les questions fiscales ! Rappelez-moi, monsieur le ministre, depuis combien de temps le projet d'assiette commune consolidée pour l'impôt des sociétés est sur la table ? Depuis 2011 officiellement, et en réalité depuis 1975 ! Et nous venons d'apprendre que la taxe sur les GAFA est reportée à 2020, voire à 2021 !

Non, il ne faut plus reporter à demain les mesures indispensables : il y a urgence ! C'est maintenant que la paix est menacée, que les tensions croissent, et que les idées les plus extrêmes à droite enflent et se nourrissent du désespoir.

L'urgence, c'est de redonner de l'espoir ; c'est de montrer qu'enfin un État ou un Parlement européen vont entendre cette colère et se mobiliser pour lutter contre la financiarisation de l'économie, pour réduire les inégalités, pour lutter contre le chômage, la pauvreté, pour restaurer de vrais services publics, humains et efficaces, dans tous les pays, dans toutes nos villes et nos villages.

L'urgence, c'est aussi de relever le défi climatique. Il n'est pas possible d'espérer gagner un demi degré en réduisant nos émissions de gaz à effet de serre en faisant des choix politiques exclusivement centrés sur la rentabilité du capital, au détriment de l'être humain et de la planète.

Le budget rectificatif que vous nous présentez ne corrige pas les choix effectués jusqu'à présent, c'est peu de le dire. Vous affichez à la moindre occasion votre volonté de lutter contre le changement climatique mais vous annulez 600 millions d'euros de crédits du programme « Soutien à la transition énergétique ». Pourquoi ne pas mobiliser ces crédits ? Six cents millions d'euros, cela équivaut à 75 % du coût du crédit d'impôt pour la transition écologique. Quelle est votre logique, alors que selon de nombreux experts, il faudrait, pour atteindre nos objectifs climatiques, doubler l'effort actuel de l'État dans la transition écologique ?

En lieu et place d'une écologie positive, vous optez pour une écologie punitive. Vous préférez augmenter massivement les taxes sur les carburants plutôt que d'investir davantage dans les énergies renouvelables et les infrastructures de transport. Comment ne pas comprendre la colère des Français, des travailleurs, des retraités qui vous disent haut et fort qu'ils en ont marre de jouer les variables d'ajustement de votre budget ? Et ils ne sont pas les seuls ! Ceux qui se chauffent au gaz ont vu leur facture bondir de 24 % depuis le début de l'année. En neuf mois, les tarifs de l'électricité ont augmenté de 42 %. Et ce n'est pas le chèque énergie qui va compenser ces hausses… Tous les Français subissent de plein fouet la hausse de l'inflation, deux fois plus rapide qu'il y a un an à la même époque.

C'est toujours aux mêmes que vous réclamez des efforts, jusqu'à l'écoeurement. Sur les 14 milliards d'euros d'économies au titre de la cure d'austérité dans le budget pour 2019, 3,5 milliards proviennent du quasi-gel des prestations sociales, qu'il s'agisse des retraites, des APL ou des allocations familiales. Et pendant ce temps-là, pour les premiers de cordée, c'est toujours la fête : leur patrimoine et leur richesse ne font que croître. Voilà exactement ce qui nourrit la colère et menace notre pacte social.

Il est encore temps d'éviter l'irréparable, mais il y a urgence. Et cela commence par un réexamen de ce budget rectificatif, en l'orientant résolument vers l'être humain et la préservation de notre planète. Tel est le sens des propositions que les députés communistes vous feront lors de l'examen de ce projet de loi.

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