Intervention de Régis Juanico

Séance en hémicycle du mardi 13 novembre 2018 à 15h00
Projet de loi de finances pour 2019 — Enseignement scolaire – sport jeunesse et vie associative

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaRégis Juanico :

Monsieur Blanquer, votre ministère devait être « sanctuarisé » sur le plan budgétaire. Il n'en est rien.

Après une hausse sans précédent des crédits pour l'enseignement scolaire et la création de 54 000 postes entre 2012 et 2017, vous annoncez la suppression de 3 500 postes en 2019, ce qui se traduira par une dégradation des conditions de travail des personnels.

Ce sont 2 650 postes d'enseignants qui sont supprimés dans le second degré, alors que 40 000 élèves supplémentaires sont attendus à la rentrée 2019, dont 38 000 au collège.

Ce sont également 400 postes administratifs qui sont supprimés, lesquels s'ajoutent aux 200 supprimés l'année dernière. Il y aura donc moins de personnels administratifs en 2019 qu'en 2012, ce qui entraînera des conséquences néfastes pour l'accompagnement du système éducatif sur nos territoires, en particulier dans les directions académiques.

Enfin, 500 postes sont supprimés dans l'enseignement privé sous contrat.

Les suppressions de postes dans l'éducation nationale représentent 40 % du total des suppressions dans la fonction publique d'État, ce qui veut dire que, d'ici à 2022, vous devrez rendre plus de 20 000 postes supplémentaires.

Le dédoublement des classes de CP et de CE1 en réseau d'éducation populaire – mesure que nous soutenons – nécessitera 4 000 postes supplémentaires en 2019. Or vous ne créez que 1 800 postes dans le premier degré. Le second degré paie pour le premier.

Nous regrettons que ce dispositif se déploie au détriment d'un autre, le « plus de maîtres que de classes » – dont l'évaluation pédagogique est pourtant très satisfaisante – qui perd 1 400 postes, mais aussi la suppression brutale de la réforme des rythmes scolaires sans évaluation sérieuse, qui permettait à 80 % des élèves de bénéficier d'activités périscolaires sportives ou culturelles tous les jours de la semaine, et pas seulement le mercredi.

Monsieur le ministre, les enseignants ne demandent pas des heures supplémentaires mais, plutôt, des moyens humains supplémentaires et la présence d'un plus grand nombre d'adultes pour les épauler – j'en veux pour preuve les récentes violences dans les établissements, dont témoigne le mouvement spontané « Pas de vagues ».

La vie associative souffre dans notre pays : le nombre de contrats aidés a diminué, passant de 460 000 en 2016 à 100 000 l'année prochaine. En 2017, déjà, 25 000 associations culturelles, sportives et médico-sociales ont mis la clé sous la porte, et tout porte à croire qu'en 2018, les fermetures de structures se sont multipliées. Allez-vous enfin prendre en compte les alertes qui ne cessent de nous remonter du terrain ? Allez-vous enfin entendre le découragement de nombreux bénévoles associatifs, qui ne se sentent pas suffisamment soutenus ?

L'éducation nationale et le sport ont un point commun sur le plan budgétaire : vos feuilles de route, madame et monsieur les ministres, sont dictées par un organisme technocratique à l'idéologie libérale, le comité d'action publique 2022, ou Cap 2022, dont l'obsession est d'obtenir 4 milliards d'économies supplémentaires dans les ministères d'ici à 2022. Comment pouvez-vous accepter cela, en tant que responsables politiques ?

Vos crédits sont des crédits d'investissement pour l'avenir des jeunes générations. Ils ne doivent pas être une variable d'ajustement de la maîtrise des dépenses publiques. Comme Marie-George Buffet l'a très bien expliqué dans son rapport pour avis, l'enjeu est de savoir si l'État jouera encore un rôle dans la définition d'une politique publique du sport, voire si un ministère des sports de plein exercice sera maintenu.

Les crédits du sport, qui sont déjà insuffisants, puisqu'ils ne représentent que quelque 80 millions d'euros, vont encore être réduits. Le projet de loi de finances pour 2019 aurait dû être un budget de rattrapage, dans la perspective des Jeux olympiques de 2024. Ce sera, encore une fois, un budget de renoncement, qui fera de l'État un acteur résiduel dans le domaine du sport. Le périmètre financier, à l'intérieur duquel l'État décidera pleinement pour ses missions régaliennes, sera en effet réduit à 100 millions d'euros. En deux exercices budgétaires, les crédits du sport baisseront de 55 millions d'euros, au lieu des 70 millions initialement prévus. Vous avez déclaré vous en satisfaire, madame la ministre. Ce n'est pas notre cas.

En 2019, le montant des taxes affectées au financement du sport sera à un niveau historiquement bas. En 2017, 77 % des taxes affectées allaient au financement du sport, soit 297 millions d'euros. En 2019, ce seront 40 % seulement, soit 146 millions d'euros. Le reste, c'est-à-dire 220 millions d'euros, sera reversé au budget général de l'État.

Vous nous demandez de nous prononcer à l'aveugle sur l'Agence du sport, alors que, comme l'a dit la rapporteure spéciale Perrine Goulet, le périmètre et les missions de cette future agence restent très vagues. Les parlementaires, garants du contrôle des crédits budgétaires et extrabudgétaires qui seront affectés à cette agence – 350 millions d'euros – ne sont pas du tout associés, à ce stade, à la gouvernance de cette instance, ce qui est inacceptable.

De plus, une incertitude majeure pèse sur le sort des personnels de votre ministère. Les services déconcentrés de proximité dans les directions de la jeunesse, des sports et de la cohésion sociale sont directement menacés dans leurs missions. Le devenir des 1 600 conseillers techniques sportifs, sur les 2 700 personnels que compte le ministère des sports, reste dans un flou absolu.

Madame la ministre, vous n'avez pas répondu aux questions précises que nous vous avons posées en commission sur le sort des CTS. Vous avez annoncé un projet de loi sur la question, alors que nous attendions tous, pour 2019, un projet de loi relatif au sport et à la société, qui préparerait, sur les plans sportif, territorial et sociétal, les Jeux olympiques de 2024. Acceptez-vous un moratoire sur le statut des CTS ? Vous engagez-vous à publier le rapport de l'inspection générale de la jeunesse et des sports sur les CTS ?

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